Quel statut pour les magistrats du parquet ?
Un collectif d’avocats, de procureurs, de magistrats et de chercheurs estime, dans une tribune au « Monde », que l’indépendance de la justice doit être débattue au cours de la campagne présidentielle.
En effet, la réforme du statut du parquet, annoncée depuis au moins deux quinquennats, mais toujours repoussée, n’aura pas lieu durant celui qui se termine, sacrifiée sur l’autel des « affaires », dont le dernier avatar est la mise en examen du garde des sceaux, Eric Dupond-Moretti, pour « prise illégale d’intérêts » et la mise en cause par celui-ci du Parquet national financier.
Les prérogatives dont dispose constitutionnellement et légalement le pouvoir exécutif pour faire ou défaire la carrière des magistrats du parquet, en particulier des procureurs et procureurs généraux, jettent pourtant une suspicion permanente sur le traitement par le ministère public des dossiers dits « sensibles », notamment politico-financiers. L’ont d’ailleurs relevé différentes institutions, telles la Cour européenne des droits de l’homme ou I’Organisation de coopération et de développement économiques. Cette dernière était notamment critique devant le peu d’empressement de la France à engager des poursuites en matière de corruption, cela, il est vrai, avant la création du Parquet national financier [en 2014].
L’interdiction faite au ministre de la justice, depuis la loi du 25 juillet 2013, d’adresser des instructions aux magistrats du parquet dans des affaires individuelles n’a pas mis un terme à cette suspicion. D’autant que le cordon ombilical qui relie le parquet à l’exécutif perdure, tant au travers des dispositions de l’ordonnance statutaire du 22 décembre 1958 prévoyant que les magistrats du parquet sont placés sous l’autorité du ministre de la justice que de l’obligation dévolue aux procureurs et procureurs généraux de faire remonter à « leur » ministre des rapports d’information lors de procédures « sensibles ». Les critères de cette remontée d’informations restant très flous, aléatoires et finalement laissés à l’appréciation de l’exécutif.
La carrière des magistrats est surtout, et toujours, aux mains du garde des sceaux, qui peut ainsi décider de promouvoir ou non tel magistrat. Certes, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) intervient dans ce processus de nomination, mais il n’a pas, dans les textes, la certitude d’avoir le dernier mot.
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