Éducation : les contrevérités de Macron

Éducation : les contrevérités de Macron

 

Jean-Paul Delahaye, inspecteur général honoraire, et Claude Lelièvre, historien de l’éducation, attirent l’attention, dans une tribune au « Monde », sur « l’inexactitude » des propos récents tenus par Emmanuel Macron sur l’éducation.

 

Tribune.

Nous avons relevé plusieurs erreurs factuelles dans les propos sur l’éducation tenus le 15 décembre par le président de la République lors de son intervention télévisée [sur TF1]. Emmanuel Macron a justifié la décision de rendre l’instruction obligatoire à 3 ans en indiquant qu’il « y avait 10 % à 15 % des enfants qui n’allaient pas à l’école du tout, les plus modestes. Maintenant, ils y vont ».

Nous attirons l’attention sur l’inexactitude de ce propos. D’après les services statistiques du ministère de l’éducation nationale, dont les informations ne semblent pas être parvenues au chef de l’Etat, 97,7 % des enfants de 3 ans étaient scolarisés en 2019, c’est-à-dire la quasi-totalité de la classe d’âge, au moment du vote de la loi pour une école de la confiance, qui instaure cette obligation.

La loi de 2019 n’a donc eu aucun effet sur la scolarisation des enfants de 3 ans. En revanche, nous observons que notre pays enregistre, sous l’autorité d’Emmanuel Macron, un recul significatif de la scolarisation des enfants de moins de 3 ans, qui était de 11,6 % en 2017 et qui est tombée à 9,4 % en 2020, ce qui, chacun en conviendra, n’est pas vraiment un progrès.

En réalité, l’obligation scolaire portée à 3 ans n’a eu qu’un seul effet, que le président de la République n’a pas cru bon de signaler à nos concitoyens : la prise en charge désormais obligatoire par les communes des dépenses de fonctionnement des classes des écoles maternelles privées sous contrat, dont 97 % relèvent de l’enseignement catholique. Cette prise en charge étant compensée par l’Etat à hauteur de 100 millions d’euros, prévus dans le budget 2022, cela signifie qu’avec l’obligation scolaire à 3 ans l’exécutif vient de renforcer la concurrence privée de notre école publique.

Emmanuel Macron a également affirmé que « partout où il y a de la pauvreté on a dédoublé les CP et CE1 et on commence à en voir les résultats ». Il faut effectivement alléger les effectifs des classes à l’école primaire et poursuivre l’effort engagé depuis 2013, car l’histoire de notre école ne commence pas en 2017.

De 2013 à 2017, en effet, avait été mis en place dans les écoles de l’éducation prioritaire et des zones rurales isolées le dispositif « plus de maîtres que de classes », qui permettait, outre un allègement des effectifs, une plus grande collaboration entre les enseignants, de manière à diversifier les approches pédagogiques et à être au plus près des besoins des élèves. En 2017, 5 000 postes y étaient consacrés. Alors qu’ils donnaient pleinement satisfaction, ces postes ont été supprimés brutalement et sans évaluation, et ont été utilisés pour le dédoublement des classes. Aujourd’hui, plus de 10 000 postes sont utilisés à cette fin.

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