« Stopper le déclin français » ( Laurent Wauquiez)

« Stopper le déclin français » ( Laurent Wauquiez)

Laurent Wauquiez président de la région Auvergne Rhône-Alpes insiste dans une interview au JDD sur la nécessité de retrouver la valeur travail en France pour stopper le déclin.

 

Valérie Pécresse a remporté le congrès des Républicains. Est-ce une bonne candidate pour 2022?
J’ai toujours dit que je serais totalement engagé derrière la personnalité qui sortirait vainqueur de notre congrès. Mon soutien à Valérie sera donc total, et je serai pleinement engagé dans cette campagne.

 

A quelle place souhaitez-vous participer à sa campagne?
Je ne m’engage pas pour une place. Ce qui sera utile, je le ferai. Le seul sujet, c’est réussir le redressement de notre pays, et j’y consacrerai toute mon énergie.

 

Lorsque vous présidiez le parti, Valérie Pécresse vous accusait de « rétrécir » la droite. Tout est pardonné?
Je ne vais pas faire semblant : il nous est arrivé d’avoir des désaccords. Mais on ne construit pas en regardant vers le passé. Je ne suis pas guidé par les rancœurs. Ce congrès a montré une vraie convergence des positions, chez tous les candidats. La droite est désormais rassemblée autour d’une vision commune, forte sur le régalien, exigeante sur la revalorisation du travail et la baisse de la dépense publique. Ces thèmes-là, je les défends depuis des années. Ça me fait plaisir de voir que les esprits ont évolué. L’époque où on nous parlait de droites irréconciliables est derrière nous.

 

La présidentielle de 2022 est-elle gagnable pour la droite?
La question n’est pas de savoir si on peut gagner. On doit gagner. Appelons les choses par leur nom : ce que nous vivons, c’est la décadence de notre pays, et ce, depuis des années. La responsabilité de notre génération pour cette élection est immense : la France va-t‑elle décrocher de l’Histoire durablement, changer de nature et s’appauvrir, ou est-elle capable de retrouver un élan ? Je m’engage dans cette campagne aux côtés de Valérie Pécresse avec une seule obsession : stopper le déclin français et retrouver l’espoir.

 

Vous retrouvez-vous dans le projet de Valérie Pécresse, ou faut-il qu’elle l’amende?
Que Valérie Pécresse reste fidèle au programme sur lequel elle a été élue me semble indispensable. Rien ne serait pire que changer de discours une fois la primaire passée, comme le suggèrent certains stratèges politiques en chambre soucieux d’acquérir des parts de marché politique. L’inconstance a beaucoup coûté à la droite par le passé. De grâce, gardons notre colonne vertébrale. Cela a toujours été mon repère en politique : soyons fidèles à nos convictions.

 

Quels doivent être les sujets majeurs de cette présidentielle?
Pour pouvoir se reconstruire, la France doit trancher deux nœuds gordiens. Le premier, c’est la déconstruction de notre rapport au travail. Il y a dix ans, je mettais en garde contre le danger que l’assistanat devienne un cancer pour notre société. Nous y sommes. Aujourd’hui, les entreprises n’arrivent pas à recruter, malgré le taux de chômage. Les Français n’ont pas perdu le sens du travail, c’est le travail qui a perdu son sens. Car la différence entre ce qu’on gagne en travaillant et ce qu’on gagne en restant chez soi est trop faible. La volonté de Valérie Pécresse de recreuser cet écart est donc fondamentale.

 

Elle souhaite augmenter de 10% les salaires, jusqu’à 3 000 euros net, ce qui coûterait 20 milliards d’euros… N’est-ce pas là « l’argent magique » que vous dénonciez?
Cela doit être financé par des économies, et nous avons montré dans nos Régions que nous savions faire. J’ai baissé de 15 % les dépenses administratives, dans ma Région. Les deux sont liés : tout ce que nous économiserons pourra être rendu aux Français. C’est le contraire du « quoi qu’il en coûte » : cesser de ponctionner des sommes toujours plus importantes et d’appauvrir les classes moyennes pour financer un appareil d’État dépensier. On peut rendre un service public meilleur sans injecter plus d’argent.

 

Son projet répond-il selon vous à la préoccupation identitaire?
C’est le deuxième nœud gordien : identité, défense de la France et reprise en main des sujets de sécurité. Valérie Pécresse a été d’une très grande clarté sur sa volonté de retrouver une fierté et une identité commune française.

 

La croissance va dépasser les 6% cette année, le chômage baisse. Est-ce que la droite aurait fait mieux?
Il serait caricatural de prétendre que rien n’a été fait. Mais ­Emmanuel Macron a-t‑il stoppé la décadence de notre pays? La montée de la violence a-t-elle été endiguée ? La tendance à produire de moins en moins et importer de plus en plus a-t‑elle été enrayée? Le communautarisme et l’islamisme ont-ils régressé dans nos quartiers? Non. Les fractures françaises ont continué à se creuser.

 

Emmanuel Macron a appelé cette semaine à ne pas « manipuler » l’Histoire. Qu’en pensez-vous?
Ce qui me laisse songeur chez Emmanuel Macron, c’est cette capacité à dire une chose et son contraire… Quand le même président de la République expliquait qu’il n’y avait pas de « culture française », que la colonisation était un « crime contre l’humanité », quand il est allé en Algérie humilier la France, n’était-il pas dans la manipulation de l’Histoire? Mais je le dis aussi avec netteté : quand Eric Zemmour prétend que le régime de Pétain aurait sauvé des Juifs, c’est inacceptable pour l’historien que je suis.

 

Eric Zemmour, est-ce un ami ou un adversaire?
Je ne me livrerai pas à la facilité de la diabolisation. Il y a, c’est une évidence, une angoisse des Français qui ne veulent pas que le pays change de nature. Mais Eric Zemmour ne peut pas gagner. Voter pour lui n’aura qu’une conséquence : permettre à Macron de poursuivre la politique qu’il mène et que pourtant une majorité de Français rejette.

Pourquoi?
Parce qu’il confond fermeté et brutalité. Les outrances ne font pas la force des convictions. Et puis il a la lucidité du constat, mais où est l’espoir? Où est l’avenir? Pour redresser le pays, il faudra de la lucidité et de l’optimisme. La lucidité, quand Emmanuel Macron préfère raconter une belle histoire plutôt que voir ce qu’il se passe. Et l’optimisme, parce qu’il n’y a aucune fatalité. Je suis convaincu que nous pouvons renouer avec un élan français.

 

Vous saluez sa « lucidité ». Zemmour a-t‑il aussi raison sur le constat d’un « grand remplacement »?
Il y a un danger qu’on ne reconnaisse plus, demain, la France qu’on aime. C’est une évidence, même si je n’utiliserais pas les mêmes mots.

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