En ville, pour une sobriété de l’éclairage nocturne
Un collectif de scientifiques, de journalistes et de militants associatifs réclame, dans une tribune au « Monde », une sobriété de l’éclairage nocturne dans les agglomérations et demande aux Etats et organisations internationales de reconnaître le ciel étoilé comme Patrimoine mondial de l’humanité.
Tribune.
Avec plus de 11 millions de points lumineux pour l’éclairage public et 3,5 millions d’enseignes publicitaires irradiant de mille feux le ciel hexagonal, le nouveau « siècle des lumières » est en passe d’éteindre la nuit et son chatoiement de lumières astronomiques. Les pieds sur terre et la tête dans les étoiles, l’homme fut de tout temps attiré par ce mystère nocturne fait non seulement d’étoiles et de planètes, mais aussi des volutes de la voie lactée, d’alignements et de conjonctions suggestives et d’étoiles filantes. La nuit noire et les astres qui la peuplent, sources d’émerveillement, disparaissent sans coup férir et dans un silence assourdissant.
Cette explosion de lumières artificielles, qui a crû de 84 % ces vingt dernières années en France, induit une pollution lumineuse qui ne semble pas près d’être endiguée. Or ce feu d’artifice a des conséquences concrètes sur la biodiversité, le climat, notre santé et l’observation du ciel.
Avec la destruction des milieux et l’épandage des pesticides, la pollution lumineuse est une cause majeure de l’effondrement des populations d’insectes et de la biodiversité dans son ensemble. Rappelons que 28 % des vertébrés et 64 % des invertébrés sont exclusivement ou partiellement nocturnes et donc directement exposés à l’éclairage artificiel. Le constat est accablant : 38 % des chauves-souris ont disparu en France hexagonale ces dix dernières années. Une étude de la revue britannique Science Advances du 25 août montre l’impact de l’éclairage public sur les chenilles de nuit, moins nombreuses dans les haies et herbes éclairées. Une autre a montré que des prairies soumises à la pollution lumineuse enregistrent une baisse de 62 % de visites des pollinisateurs comparativement à une prairie non éclairée.
Eclairage public et publicités lumineuses
En outre, une très grande partie des animaux nocturnes se repèrent habituellement avec les astres et perdent leurs repères. La lumière artificielle modifie substantiellement les cycles biologiques du vivant, les interactions et le comportement des espèces. Elle supprime et fragmente les habitats naturels la nuit, justifiant la mise en place de trames noires à préserver et à restaurer.
Parallèlement, les appels répétés au civisme climatique semblent éviter soigneusement d’aborder les émissions de gaz à effet de serre liées à l’éclairage public et aux publicités lumineuses. L’électricité nécessaire à cet éclairage représente pourtant 41 % de la consommation des collectivités.
De surcroît, un récent rapport de l’Académie nationale de médecine propose de classer l’exposition à la lumière la nuit dans la catégorie des perturbateurs endocriniens, eu égard aux effets sanitaires associés à un cycle biologique perturbé par la lumière artificielle.
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