France : un manque majeur de culture scientifique
L’anthropologue Katia Andreetti et le député (MoDem) Philippe Berta préconisent, dans une tribune au « Monde , extrait», le lancement d’« états généraux de la culture scientifique et technique », pour mieux lutter contre le complotisme et mettre la science à portée de tous.
Tribune
Collective, intersectorielle et intergénérationnelle, la crise sanitaire a marqué de son sceau l’histoire mondiale. Science, santé et technologie se sont imposées comme pierres angulaires de la protection des populations et des équilibres démocratiques. Matière à penser, à conceptualiser et à rationaliser le futur, l’ébullition scientifique générée par le Covid est une avancée majeure que les pouvoirs publics doivent accompagner afin d’en faire l’une des matrices de nos politiques publiques de demain.
Le lancement d’un plan d’investissement de près de 7 milliards d’euros par le président de la République en marque les prémices. La capacité de notre recherche biomédicale, la souveraineté industrielle et sanitaire, l’investissement renforcé, l’équité d’accès aux soins, l’impulsion stratégique de l’innovation en santé confirment que d’innovantes trajectoires se dessinent. Il est temps que nos politiques en prennent conscience !
Anticiper les situations futures
Les sciences sont plurielles et mobilisent des méthodologies spécifiques et interdépendantes, des technologies de pointe, des professionnels qualifiés, des écosystèmes de recherche et exigent des investissements stratégiques audacieux. Face à la célérité de la recherche et des mutations sociales, un grand nombre de nos lois sont, de facto, juridiquement caduques, en témoigne la révision de la loi de bioéthique qui, pour ses aspects scientifiques, est loin du tempo imposé par le rythme des découvertes scientifiques. A contrario, si les avancées entrevues par la loi de programmation pluriannuelle de la recherche sont une première esquisse, elles impliquent d’aller plus loin. Politique et science doivent coordonner leurs temporalités dans des réalités sociétales : un défi pour les décideurs politiques, une nécessité pour renforcer la connaissance scientifique de tous.
Instructifs sont les maux imposés par la crise aux mondes scientifique, médical et socio-politique. Leurs analyses tant qualitatives que quantitatives sont, plus que jamais, déterminantes afin d’anticiper les situations futures et la vie post-Covid. Quant aux mécanismes opérationnels, ils représentent de fertiles laboratoires d’idées, des pôles d’excellence pour l’élaboration de projets ambitieux. L’acculturation scientifique en est un. La pandémie le démontre : notre société française souffre d’un déficit d’acculturation scientifique majeur. Mus par des raisons qui leur appartiennent, on a vu des politiques et des médecins parler science, la multiplication d’infox, le défilé « d’experts » sur les chaînes d’information en continu, le tout faisant perdre à la science ce qui fait son essence : son indépendance. Une belle affaire pour les complotistes, les extrémistes et les populistes.
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