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La grande naïveté de la France face aux ingérences étrangères

La grande naïveté de la France face aux ingérences étrangères

Le sénateur André Gattolin, rapporteur d’une mission d’information, s’inquiète dans l’Opinion  des pratiques de la Chine, de la Russie ou de la Turquie

 

 

 

 

 

André Gattolin, sénateur des Hauts-de-Seine (RDPI, auparavant groupe LREM) est le rapporteur de la mission d’information sur « les influences étatiques extra-européennes dans le monde universitaire et académique français ».

Pourquoi cette mission ? Quels signaux vous ont alerté ?

L’Australie, le Royaume-Uni, l’Allemagne ou les Etats-Unis ont commencé à s’interroger sur les conditions dans lesquelles certaines puissances étrangères influent sur nos universités, sur notre recherche nationale. Plusieurs de ces pays, comme l’Australie, ont mis en place une législation pour encadrer cette coopération universitaire, certes à très grande échelle avec la Chine dans son cas. Ces pays se sont aperçus que la globalisation des savoirs, le développement très rapide du marché de l’enseignement supérieur pouvaient produire des dégâts collatéraux pour les libertés académiques et l’intégrité scientifique. Quelque 47 instituts Confucius ont été fermés aux Etats-Unis. Le Royaume-Uni s’inquiète de la dépendance économique de ses universités aux droits de scolarité des étudiants chinois. Si deux collaborations avec des instituts Confucius ont été suspendues (à Lyon et Paris 8 Nanterre), la France, elle, semble encore faire preuve de naïveté. A Brest, une école de commerce privée a récemment été rachetée par des fonds chinois et abrite un institut Confucius.

Comment maintenir l’ouverture du monde académique tout en prenant en compte cette menace ?

Les échanges universitaires et les projets de recherche internationaux se multiplient, avec une nette accélération ces dernières années. Il faut avoir l’esprit que des « trous dans la raquette » existent. Campus France est ainsi l’organisme chargé de faire venir des étudiants étrangers sur notre sol et de rattraper notre retard en la matière. Les Marocains sont les plus nombreux à étudier ici, suivis de près par 35 000 Chinois (chiffres 2019). Très bien mais tout cela ne doit pas se faire à n’importe quel prix. A ma connaissance, il n’existe pas d’institution chargée du contrôle de ces flux, hormis évidemment les services de renseignement. La Conférence des présidents d’université nous dit ne pas toujours savoir ce qui se passe dans les laboratoires, dans les coopérations initiées.

« Ankara peut agir à un double niveau. En ouvrant des lycées turcs dans le but de contrôler sa diaspora et en développant l’agitation autour de questions sensibles comme le génocide arménien »

Quelles peuvent être les solutions ?

Une des pistes serait de demander davantage de transparence. En France, il n’existe pas d’obligation de déclaration d’éventuel conflit d’intérêts ou de source de financement. Alors même que les Chinois savent très bien repérer un chercheur en pointe dans son domaine et lui proposer un financement. Quand un grand centre universitaire étranger passe des partenariats avec des laboratoires étrangers et qu’on découvre qu’il s’agit de véritables accords de coopération avec possibles fuites de données, ce n’est pas normal.

Certaines interférences peuvent venir d’instruments en apparence plus anodins. Vous vous interrogez ainsi sur le classement de Shanghai (des meilleures universités mondiales).

Il faut se méfier des indices de performance. Ce classement valorise les établissements universitaires les plus puissants, en termes de taille, de coopération internationale. C’est devenu un référent mondial, mais ce sont d’abord des normes mises en place par la Chine.

Des tentatives d’ingérence viennent aussi de Russie, de Turquie…

La Russie ne pratique pas d’entrisme officiel mais peut être très présente sur certains domaines. On voit ainsi de prétendus chercheurs russes sur l’Arctique ou sur les extractions de pétrole qui ne sont pas seulement des universitaires. Ankara peut agir à un double niveau. En ouvrant des lycées turcs dans le but de contrôler sa diaspora et en développant l’agitation autour de questions sensibles comme le génocide arménien.

Vous avez choisi de ne pas aborder la question du wokisme et de la cancel culture, venus des Etats-Unis, dont l’empreinte dans le monde académique nourrit la polémique. Pourquoi ?

Nous nous intéressons aux politiques étatiques étrangères et ne voulions pas nous immiscer dans des controverses internes au débat universitaire.

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