Crypto-monnaies : une menace pour les banques
C’est la question que pose Aurore Galves-Orjol, présidente de l’association Crypto Lyon, dans une tribune publiée en amont du Forum Finance Lyon organisé par La Tribune .
Ce sont les contributions scientifiques de plusieurs chercheurs qui ont permis de résoudre le problème de double dépense rencontré lors des précédentes tentatives de développement de « cash numérique ». Grâce au premier protocole à blockchain nous pouvons supprimer les intermédiaires dans nos process de paiement, mais également de financement. En effet, nous pouvons directement opérer des transactions de personnes à personnes.
Aujourd’hui, nous envoyons des devises hors des frontières de notre pays de résidence ; avec Bitcoin, fini les virements SWIFT ou Western Union, plus besoin de passer par une banque car l’échange est décentralisé, plus rapide, plus sûr et moins coûteux.
De même que pour financer l’innovation, les investisseurs ont désormais la possibilité de s’adresser directement aux porteurs de projets sans passer par des plateformes intermédiaires comme Leetchi, Kickstarter ou Ulule.
Bien qu’il capitalise plus de 50% du marché, Bitcoin n’est pas seul. Plus de 2 000 crypto-monnaies sont référencées sur coinmarketcap.com. Elles n’utilisent pas toutes les mêmes technologies et ne répondent pas au même cas d’usage.
Nombre de ces projets se sont financés par des levées de fonds, appelées ICO (initial coin offering). A mi-chemin entre l’émission de titres (IPO) et le crowdfunding, elles comportent deux atouts majeurs : les porteurs de projet ne vendent pas de parts de leur société mais seulement des jetons (droit de vote, droit d’usage,…) et ils sont en relation directe avec les investisseurs.
Ces dernières années, de nombreuses levées de fonds, ouvertes aux particuliers et petits porteurs, ont eu lieu afin de financer des projets « Blockchain ». On assiste donc à un changement de paradigme car les banques ne sont plus les seules à soutenir l’innovation. Revers de la médaille : ces technologies naissantes n’ont pas encore fait leurs preuves – ces placements financiers restent donc très risqués.
Aujourd’hui, nous avons une solution technique pour le faire mais restons réalistes. Est-ce que notre monde peut-il réellement se passer de banques ? Elles qui sont capables de financer l’économie par la dette, d’accompagner leurs clients lors de démarches juridico-financières et de fournir du conseil – ce qui constitue leur plus grande valeur ajoutée. Ce qui ne les empêche pas de s’intéresser aux crypto-monnaies : elles sont nombreuses à s’être regroupées autour du projet Ripple ou d’Ethereum par exemple. HSBC utilise un protocole à Blockchain privée afin d’accélérer ses transactions inter-filiales et JP Morgan, dont le CEO est connu pour critiquer Bitcoin sur les réseaux sociaux, investit tout de même largement sur ce marché.
Quant à savoir si les crypto-monnaies peuvent remplacer l’euro et les monnaies fiduciaires… il va falloir s’armer de patience. Le principal défi reste l’adoption utilisateur qui était jusque là freinée par l’incapacité de Bitcoin à engendrer un volume de transaction suffisant.
Avec l’apparition de Lightning network, une surcouche du réseau Bitcoin, les transactions sont désormais instantanées. Il reste encore à développer le réseau d’acteurs économiques acceptant ce mode de paiement, encore trop restreint. Par ailleurs, le gouvernement français n’accepte pas la dénomination « crypto-monnaie » ne voulant pas de concurrence à l’usage de l’euro, il préfère parler de « crypto-actif » pour soutenir le financement de l’innovation.
Les consommateurs vont-ils changer de moyen de paiement ?
Impossible de prédire l’avenir, mais nous voyons déjà les consommateurs changer leurs habitudes. Ils se tournent vers les néo-banques (Revolut, N26, Nickel…) ainsi que vers le paiement par smartphone (Google pay, Apple pay, Wechat).
Les crypto-monnaies, à l’instar des néo-banques, vont pousser les acteurs traditionnels à se ré-inventer et refondre leurs services afin de s’adapter aux besoins leurs clients. Aucun doute à avoir sur la capacité des banques à les intégrer dans le mix des placements déjà proposés afin de diversifier leur offre, il s’agit juste d’une question de temps pour ces acteurs institutionnels précautionneux.
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