Les charcutiers industriels font condamner l’application d’évaluation des produits
C’est un peu le monde à l’envers puisque Yuka , l’application d’évaluation des produits industriels a été condamnée par les tribunaux à la demande des charcutiers industriels.
Pourtant Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a déclaré en 2015 que la charcuterie enrichie en nitrites était cancérogène. Michèle Rivasi explique dans son communiqué « que le nitrate et le nitrite ne sont jamais eux-mêmes cancérogènes. Quelle que soit la dose d’ingestion, ces deux substances ne provoquent jamais directement le cancer – ni chez l’animal, ni chez l’homme. Pourtant, après avoir été injectés dans la viande, nitrate et nitrite se décomposent et s’associent à la matière carnée. C’est alors qu’ils donnent naissance à trois types de molécules cancérogènes : le fer nitrosylé, les nitrosamines, les nitrosamides. »
La précision est importante car l’EFSA (l’autorité européenne de sécurité des aliments) joue sur cette nuance, dans deux rapports publiés en 2017, pour affirmer que l’utilisation du nitrites ne pose pas de problème pour la santé publique et pour justifier le statu quo.
Yuka cependant été condamné à verser 20.000 euros de dommages et intérêts pour « dénigrement » ainsi que « pour pratiques commerciales déloyales trompeuses ». La société devra également payer 10.000 euros au titre des frais d’avocats.
En cause, selon les avocats des charcutiers, « des allégations fausses, dénuées de fondement scientifique, sur le caractère cancérigène des nitrites de la charcuterie » et la pétition réclamant l’interdiction des sels nitrités sur laquelle l’application renvoie les consommateurs , signée par Foodwatch, la Ligue contre le cancer et Yuka.
Yuka craint pour sa survie. « Deux fabricants de charcuterie nous réclament plus d’un million d’euros de dommages et intérêts, sachant que notre bénéfice net en 2020 est d’environ 20.000 euros. C’est totalement disproportionné et cela montre clairement que l’on cherche à nous faire mettre la clé sous la porte », plaide Julie Chapon, cofondatrice de l’appli.
L’application a tenté de diluer sa responsabilité dans l’affaire et surtout de répartir le montant des condamnations éventuelles à suivre, en assignant en « intervention forcée » neuf sociétés disposant d’applis du même type – dont Intermarché et Carrefour. Ces sociétés, qui ne voulaient surtout pas être mêlées à l’affaire, ont obtenu « la caducité de l’assignation » auprès du Tribunal de Brive.
La première audience aura lieu le 25 juin au Tribunal de commerce de Brive face à l’entreprise corrézienne Le Mont de la Coste, un fabricant de saucisson. Ses 80 salariés craignent de perdre leur emploi au vu de la chute des ventes, dont ils rendent Yuka responsable.
L’appli reconnaît avoir une influence importante sur le choix des consommateurs et estime que « 94 % de ses utilisateurs ont arrêté d’acheter certains produits ». Un deuxième procès aura lieu un peu plus tard à Aix-en-Provence opposant ABC, producteur de jambon cuit, et Yuka.
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