Économie : les contradictions du consommateur
Dominique Schelcher, PDG de Système U, Patrick Artus, économiste, Jean Valfort, restaurateur et fondateur de Panorama Group, et Guénaëlle Gault, directrice de L’ObSoCo (L’Observatoire société et consommation), étaient les invités du Club de l’économie du Monde , jeudi 20 mai.
« La guerre n’est pas terminée »
Jean Valfort : Nos restaurants à Paris n’ont pas ouvert. Juillet et août ne sont pas les meilleurs mois et il n’y a rien de pire pour un restaurant que d’ouvrir, d’investir et d’avoir à refermer derrière. La guerre n’est pas terminée et nous n’avons aucune visibilité sur septembre-octobre, quand la météo va se rafraîchir. Combien de temps encore nous faudra-t-il pour nous débarrasser complètement d’une pandémie qui nous empêche de travailler ?
« Malgré un surcoût, de l’ordre de 10 à 15 % pour les fruits et légumes made in France, nous n’en avons jamais vendu autant » Dominique Schelcher, PDG de Système U
Dominique Schelcher : Tant que cette crise ne sera pas derrière nous, il y aura des incertitudes sur le rebond économique. Nous avons actuellement des cas de contamination parmi notre personnel dans des régions jusque-là épargnées. Et quand on regarde, c’est souvent dû à un relâchement dans les mesures de précaution.
Guénaëlle Gault : Selon nos enquêtes, moins d’un Français sur dix pense que, dans six mois, la crise sera finie. Un quart pense même que, dans trois ans, nous y serons toujours. Quand on demande aux Français ce qu’ils feraient s’ils avaient un mois de salaire en plus, ils mettent en priorité l’épargne, puis le remboursement des dettes, le logement et les vacances. Devant tous les autres biens de consommation. Et si on leur donne un an de salaire en plus, la hiérarchie serait exactement la même, avec l’épargne et la dette en tête.
« Vivre et travailler autrement »
D. S. : Les Français se sont plus que jamais focalisés sur les produits locaux. Cela les rassure. Ils font travailler l’économie locale, peut-être qu’un cousin y travaille, et l’impact environnemental du transport est réduit. Nous avons connu des croissances à deux chiffres. Les clients ont joué le jeu. Malgré un surcoût, de l’ordre de 10 à 15 % pour les fruits et légumes made in France, nous n’en avons jamais vendu autant. Signe encourageant du retour à la vie normale, de l’envie de se faire plaisir, les ventes de champagne, qui s’étaient effondrées lors du premier confinement, progressent actuellement de 100 %.
G. G. : Les gens aspirent à vivre, travailler et consommer autrement. Les Français ont bien conscience que le suréquipement, l’hyperconsommation, qui étaient la promesse de bonheur au XXe siècle, peuvent mettre en danger leur santé et l’environnement. Cette préoccupation est devenue massive. On revisite sa vie au prisme de l’essentiel. Mais les contraintes, notamment financières, sont fortes, et il faut les accompagner dans ces changements, sinon cela se transforme en frustration.
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