Archive mensuelle de avril 2021

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États-Unis : sanctions de Trump levées contre la CPI

États-Unis : sanctions de Trump levées contre la CPI

Les États-Unis ont enlevé les sanctions contre la CPI a particulier sa procureur et un autre haut fonctionnaire. Sanctions prises par Trump suite à l’enquête de la CPI sur l’action criminelle des États-Unis en Afghanistan. Cette décision, annoncée par le secrétaire d’État américain Antony Blinken, lève les sanctions imposées à Bensouda suite à son enquête sur la question de savoir si les forces américaines ont commis des crimes de guerre en Afghanistan.

«Nous pensons, cependant, que nos préoccupations concernant ces affaires seraient mieux traitées par l’engagement avec toutes les parties prenantes dans le processus de la CPI plutôt que par l’imposition de sanctions», a déclaré son communiqué.

Blinken a déclaré que Washington était encouragé par le fait qu’un large éventail de réformes était envisagé pour aider la CPI à «hiérarchiser ses ressources et à accomplir sa mission fondamentale de servir de tribunal de dernier ressort pour punir et dissuader les crimes d’atrocité».

Un porte-parole de la CPI a déclaré que la Cour et son organe directeur des États membres se sont félicités de la décision des États-Unis.

La CPI a déclaré que les sanctions étaient une attaque contre la justice internationale et l’état de droit.

Le secrétaire d’État américain de l’époque, Mike Pompeo, s’est également opposé à une enquête ouverte en 2019 sur des crimes de guerre présumés dans les Territoires palestiniens, y compris par les forces israéliennes.

Le reconfinement COVID-19 : la croissance remise en cause

Le reconfinement COVID-19 : la croissance remise en cause

Le ministre de l’économie prend les devants et considère qu’avec les nouvelles mesures restrictives la croissance pourrait être mise en cause. En fait,  la France pourrait voir sa perspective de croissance de 6 % divisée par deux. Tout dépendra en effet de la durée du nouveau confinement. Le chef de l’État a annoncé une durée de quatre semaines mais qui pourrait durer au moins le double voire jusqu’au congés d’été.

«Ces mesures auront un impact sur la croissance économique en 2021. Nous sommes en train de l’évaluer. Il y aura une nouvelle évaluation dans les prochains jours », a déclaré Le Maire à la télévision CNews lorsqu’on lui a demandé s’il s’en tenait à l’objectif de croissance économique du gouvernement pour cette année. Il prévoit une croissance de 6% pour 2021.

Le Maire a rappelé que les nouvelles mesures de verrouillage forceraient la fermeture temporaire de 150 000 entreprises pour un coût de 11 milliards d’euros par mois.

Le Maire a réitéré ses appels à l’Union européenne pour accélérer la mise en œuvre de son plan de relance économique.

«L’Europe doit comprendre que nous devons aller vite et que les fonds de relance promis aux citoyens européens doivent désormais arriver dans les États membres … En 2022 ou 2023, il sera trop tard. Les Chinois et les Américains seront en avance sur nous », a-t-il déclaré.

Bien que le bloc des 27 pays ait accepté le fonds de relance historique l’été dernier, les gouvernements de l’UE continuent de soumettre des plans détaillés sur la manière dont ils envisagent de dépenser l’argent du fonds, que beaucoup doivent encore ratifier. Pendant ce temps-là les États-Unis accélèrent la cadence des plans de soutien à l’économie avec encore récemment un plan destiné soutien des infrastructures de 2000 milliards s’ajoutant un autre récent plan de 3000 milliards. Les États-Unis auront engagé des plans de 7 à 8000 milliards tandis que l’Europe est encore embourbée dans les procédures de son mini plan de 750 milliards.

Covid France : de record en record

Covid France : de  record en record

Le ministère a signalé 46 677 nouveaux cas en 24 heures, 6,2% de plus qu’il y a une semaine, portant le total à 4,74 millions de cas. La veille on avait constaté 59 000 cas

La France a également signalé vendredi 332 nouveaux décès dus au COVID-19, portant le bilan à 96280, mais le nouveau décompte ne comprenait que 32 décès dans des maisons de retraite en trois jours.

La France a rapporté vendredi que 5 254 personnes étaient dans des unités de soins intensifs avec COVID-19, une augmentation de 145 personnes en une journée et la plus forte augmentation quotidienne en cinq mois.

Economie, politique, société: les plus lus

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Contamination : un nombre toujours élevé dans quatre semaines ! Et menaces sur l’été

Contamination : un nombre toujours élevé dans quatre semaines ! Et menaces sur l’été

 

Pour l’épidémiologiste Mahmoud Zureik, la fermeture des écoles et l’extension des restrictions à toute la France métropolitaine pendant quatre semaines pourraient permettre de « revenir à un niveau de plateau élevé » comparable à celui de janvier-février. Mais l’été s’annonce plus dur que l’an passé. (Interview JDD)

« Nous devons, pour les mois à venir, fournir chacun effort supplémentaire. » Lors d’une allocution télévisée mercredi soir, Emmanuel Macron a annoncé de nouvelles restrictions pendant quatre semaines contre le Covid-19. Dès samedi, toute la métropole sera soumise aux mesures renforcées déjà en vigueur dans 19 départements. Les écoles fermeront aussi leurs portes pour laisser place à l’enseignement à distance puis à des vacances unifiées sur le territoire. Mais l’effet conjugué de ce tour de vis et le déploiement de la vaccination, veut croire le Président, « va nous permettre, à partir de la mi-mai, de commencer à rouvrir progressivement le pays ».

Ces mesures seront-elles suffisantes pour enrayer la dynamique épidémique? Le calendrier d’allègements esquissé par Emmanuel Macron est-il réaliste? Professeur de santé publique et d’épidémiologie à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines, Mahmoud Zureik analyse ces annonces.

Les mesures annoncées mercredi seront-elles suffisantes pour casser la courbe épidémique?
Elles seront en partie efficaces, de façon non-négligeable, surtout par la fermeture des écoles. Est-ce que ce sera suffisant? Tout dépend de l’objectif. En novembre, le Président a annoncé un objectif de 5.000 contaminations par jour et de 2.500 personnes en réanimation. Ce chiffre était présenté comme un seuil permettant de contenir l’épidémie. Depuis, on n’en parle plus. Si l’objectif est de revenir à un niveau de plateau élevé avec 20.000 à 25.000 contaminations par jour comme en janvier-février, on peut y arriver. S’il s’agit de passer de 35.000 cas quotidiens actuellement à 5.000 contaminations, certainement pas.

Pourquoi?
Cela dépend du chiffre de départ : passer de 35.000 contaminations quotidiennes à 5.000, c’est extrêmement difficile. Cela demande des mesures beaucoup plus strictes et plus longues. Prenons l’exemple du Royaume-Uni : fin décembre, début janvier, ils étaient proches des 60.000 cas par jour. Ils ont mis trois mois pour redescendre sous les 5.000. S’ils avaient réagi avant, la nature et la durée des mesures auraient été bien inférieures.

L’interdiction des voyages entre régions ne va pas entrer en vigueur avant lundi et va donc tarder à produire des effets

A partir de quand pourra-t-on observer un éventuel effet des nouvelles restrictions?
Pas avant deux, trois semaines. Mais l’interdiction des voyages entre régions ne va pas entrer en vigueur avant lundi et va donc tarder à produire des effets. Le paramètre le plus avancé pour observer un impact, c’est le nombre de contaminations. Le nombre d’hospitalisations, de réanimations et de décès, lui, va continuer à augmenter parce qu’il y a toujours un décalage entre les contaminations et les hospitalisations, de 7 à 10 jours environ pour l’hospitalisation et de deux à trois semaines pour la mortalité. Avec le variant anglais, on voit que le passage en réanimation est plus rapide qu’avec le variant classique, donc ce décalage sera peut-être raccourci, de l’ordre de 5 à 10 jours environ contre 7 à 10 jours.

Dans son allocution, Emmanuel Macron a affirmé que les « mesures de freinage renforcées » mises en place dans 19 départements le 18 mars ont eu de « premiers effets ». Est-ce vrai?
C’est encore difficile à dire. On verra dans les jours qui viennent mais, pour le moment, si impact il y a, il est presque négligeable.

L’école est l’un des derniers vecteurs de circulation du virus et il concerne des millions de personnes

En quoi la fermeture des écoles peut avoir un effet bénéfique?
C’est la première fois que le président de la République reconnaît que l’école est un lieu de circulation du virus, ce que l’on pensait depuis des mois. Le variant anglais, avec sa transmissibilité accrue, a rendu la problématique de l’école plus aiguë et visible. Les restaurants sont fermés, les commerces sont fermés, les lieux culturels sont fermés, on a encouragé le télétravail… L’école est l’un des derniers vecteurs de circulation du virus et il concerne des millions de personnes, c’est-à-dire les enfants, les parents et le personnel de l’Education nationale.

 

Indirectement, c’est donc aussi un moyen de réduire les contacts des adultes en les poussant à rester chez eux?
Le chômage partiel ou le télétravail, selon les schémas familiaux, permettra aux parents d’avoir moins de contacts. Cela dit, il ne s’agit pas forcément de rester chez soi, confiné dans un lieu clos. Du point de vue du risque de contamination, être à l’extérieur, en respectant les gestes barrière, c’est mieux que de s’enfermer chez soi. Mais il faut avoir beaucoup moins d’interactions sociales, éviter les squares et les rues avec une densité importante et, si on est avec des gens, ne pas partager de repas. Se balader sur une plage, dans la forêt ou une rue déserte ne présente quasiment aucun risque de contamination.

Les déplacements entre régions seront autorisés ce week-end. Est-ce que cela pourrait envenimer la situation?
Jusqu’à lundi, on aura une sorte de mise en attente des mesures. Pendant ce temps, il y aura des interactions, des brassages, et donc un risque de contamination et de dissémination dont on se serait bien passé. Les gens se sont organisés pour leur lundi de Pâques, c’est donc un compromis, mais qui se fera peut-être un peu au détriment de la maîtrise de l’épidémie.

Avec la vaccination, on peut être optimiste sur le ralentissement de l’épidémie dans les mois qui viennent

Le passage à des restrictions nationales, avec une allocution solennelle, permet-il d’envoyer un signal pour inciter à la vigilance?
Cela envoie un signal sur la gravité de la situation, mais il est difficile de savoir si cela va changer quelque chose. Les restrictions durent depuis un an et, malgré cela, même s’il y a des relâchements, beaucoup de gens sont responsables et conscients du danger!

Quoi qu’il arrive, la situation hospitalière sera toujours très tendue dans quatre semaines?
On aura toujours de fortes tensions hospitalières et un nombre élevé de contaminations. Même si on atteint un pic de contaminations en avril, la descente va être lente. Néanmoins, avec la vaccination, avec le fait que de plus en plus de gens ont contracté le Covid et présentent une immunité, avec la modification des conditions météorologiques qui permettra d’aller plus souvent à l’extérieur, on peut être optimiste sur le ralentissement de l’épidémie dans les mois qui viennent.

On verra les premiers résultats [de la vaccination] pendant le mois de mai

Quand la vaccination produira-t-elle un effet sur la courbe épidémique?
De plus en plus d’études montrent que les vaccins protègent des formes graves mais aussi des contaminations. C’est une très bonne nouvelle! Cela signifie que, même si on n’arrive pas rapidement à un nombre très élevé de personnes vaccinées, pour atteindre l’immunité de groupe, plus on vaccine, moins il y a de place pour le virus. Je dirai que l’on verra les premiers résultats pendant le mois de mai. Les vaccins produisent d’ailleurs déjà leurs effets en Ehpad et sur les personnes très âgées. C’est un signe d’espoir, le bout du tunnel n’est pas très loin.

Vous estimez dans le même temps que l’été sera plus difficile que l’été dernier. Pourquoi?
Parce que le niveau de circulation du virus sera plus élevé. L’année dernière, le 11 mai [date du déconfinement progressif, NDLR], on avait entre 1.000 et 3.000 contaminations par jour selon les estimations. On était dans des conditions presque normales avec un virus qui circulait à bas bruit. Cette fois-ci, on va probablement arriver vers l’été avec une circulation plus élevée du virus.

 

Écriture inclusive : «danger mortel»

Écriture inclusive : «danger  mortel»

 

 

 

Après la féminisation forcenée et souvenait ridicule des substantifs concernant  des professions et fonctions, c’est cette fois l’écriture inclusive qui est mise en cause par l’académie française. Cette graphie consiste à inclure le féminin, entrecoupé de points, dans les noms, comme dans «mes ami·e·s», pour le rendre «visible». Le «point milieu», ce signe situé à mi-hauteur des lettres, peut être utilisé alternativement en composant un mot comme «lycéen·ne» comme suit: racine du mot + suffixe masculin + le point milieu + suffixe féminin. Prenant acte de la diffusion de cette «écriture inclusive» qui «prétend s’imposer comme norme», l’Académie française élève à l’unanimité une solennelle mise en garde: «La démultiplication des marques orthographiques et syntaxiques qu’elle induit aboutit à une langue désunie, disparate dans son expression, créant une confusion qui confine à l’illisibilité. L’Académie française considère que devant cette aberration “inclusive”, la langue française se trouve désormais en péril mortel, ce dont notre nation est dès aujourd’hui comptable devant les générations futures. Il est déjà difficile d’acquérir une langue, qu’en sera-t-il si l’usage y ajoute des formes secondes et altérées? Comment les générations à venir pourront-elles grandir en intimité avec notre patrimoine écrit? Quant aux promesses de la francophonie, elles seront anéanties si la langue française s’empêche elle-même par ce redoublement de complexité, au bénéfice d’autres langues qui en tireront profit pour prévaloir sur la planète.». Membre de l’Académie française, Michael Edwards, poète, philosophe et traducteur franco-britannique, avait confié début octobre au Figaro à quel point l’écriture inclusive abîmait, selon lui, la langue française. «C’est la chair même du français qui est ainsi rongée, et son esprit qui se trouve frappé d’une sorte de bégaiement cérébral», indiquait-il.

Covid: Macron a perdu son pari, la France a perdu trois mois

Covid: Macron a perdu son pari, la France a perdu trois mois

 

Même dans la tonalité du président de la république on a décelé une certaine lassitude. Un sentiment de déjà entendu. Avec une grande partie consacrée à l’auto justification d’une politique sanitaire pourtant très évolutive voire contradictoire.

 

Macron avait fait un pari à savoir ne pas reconfiner la France. Pari perdu car devant la détérioration des statistiques qui rendent compte des contaminations et de leur gravité, le pouvoir central a décidé de reconfirmer tout le pays dans un espace de 10 km et refermant les écoles. Les commerces n’en essentiels vont demeurer fermés.

 

En réalité?, la France a perdu à peu près trois mois  en termes de protection sanitaire car les mesures prises très floues n’ont pas fait la démonstration de leur efficacité. Désormais la crise est Telle qu’il paraît difficile d’ailleurs d’en limiter l’évolution. Les lits de réanimation sont presque tous occupés et Macron a convenu qu’il fallait en augmenter le nombre jusqu’à 10 000 au lieu des 6000 actuels.

 

Ne reste en réalité que le freinage très relatif de ce nouveau confinement et surtout l’espérance de l’accélération de la vaccination. Or sur ce terrain c’est aussi l’échec total et il ne faut pas espérer qu’un nombre significatif de Français seront vaccinés avant l’été. Le président de la république a confirmé que seulement 8 millions de Français avaient été vaccinés en trois mois. C’est évidemment très insuffisant. L’imputation de la responsabilité au nouveau virus par Macron paraît peu convaincante notamment si on compare la situation sanitaire française à celle de la Grande-Bretagne qui pratiquement est parvenue à stopper le nombre de décès grâce précisément à une vaccination massive.

 

« Nous avons tous consenti des efforts importants et le virus a continué de circuler », a reconnu Emmanuel Macron. Le président a alors évoqué  »la propagation dans toute l’Europe d’une nouvelle forme de variant, qui a été identifié pour la première fois chez nos voisins britanniques à la fin de l’année dernière, et qui a en quelque sorte fait apparaître une épidémie dans l’épidémie ». Le chef de l’Etat a une nouvelle fois défendu sa stratégie, avant de constater qu’elle ne suffisait plus.  »Cette stratégie a eu des effets, mais cela reste trop limité (…) nous devons donc nous fixer un nouveau cap. » Le président de la République a donc demandé aux Français  »un effort supplémentaire ».

 

Intervention de Macron au 20h: redite et aveu d’échec

Intervention de Macron au 20h: redite et aveu d’échec  

Pour le professeur Arnaud Benedetti, la communication du chef de l’État, notamment à travers le ton employé, laissait transparaître un léger aveu d’échec et la sensation d’un exécutif tiraillé entre la pression du virus et la crainte de l’opinion.( Tribune dans le Figaro)

Arnaud Benedetti est professeur associé à l’Université Paris-Sorbonne. Il est rédacteur en chef de la revue politique et parlementaire. Il a notamment publié «Le coup de com’ permanent» (éd. du Cerf, 2018) dans lequel il détaille les stratégies de communication d’Emmanuel Macron.

Emmanuel Macron rattrapé par la pression médiatico-épidémique est monté au front. Il lui fallait desserrer l’étau, tant du virus qui n’obéit à aucune autre loi que la sienne que des critiques qui se densifient sur sa gestion sanitaire des dernières semaines.

Alors que le parti des médecins multiplie les alertes, se cabre même depuis l’intervention présidentielle défendant le choix du 29 Janvier de ne pas confiner, l’allocution du Chef de l’État, annoncée dès le matin, a replongé le peuple politico-médiatique de la V ème République dans cette atmosphère monarchique qui instaure la parole d’un seul homme, un instant tout au moins, comme une délivrance messianique.

Or, le temps messianique en régime médiatique est celui de l’attente. La technique de l’Élysée, de ce point de vue, reste inchangée: pré-annoncer, faire mijoter, chaîne info et réseaux aidant, et certifier par l’apparition sur les écrans ce que l’Elysée a laissé inexorablement et de manière pointilliste «fuiter»…

La fermeture des écoles, totem brandi jusqu’à plus soif comme une exception « victorieuse » de la gestion française, redouble cette impression de recul.

Le décor en quelque sorte était planté avant la prestation, la «bande-annonce» communicante ayant déjà amplement infusé, via les chaînes info et les réseaux.

La déclaration d’Emmanuel Macron dans ce contexte s’est articulée autour de trois blocs dont l’objectif consistait à démontrer qu’il existait…une stratégie, que celle-ci était maîtrisée, s’inscrivait dans une continuité et une cohérence d’ensemble, que la carte d’état-major était tenue et surtout que l’on ne reculait pas.

Le premier bloc auto-justificateur constitue désormais une figure pérenne du discours macroniste par temps de crise. Seules les modulations de la voix et de la sémantique le graduent sur un axe allant du péremptoire à l’humilité modérée. C’est cette tonalité qu’a cette fois retenue le Président, après une intervention suite au dernier sommet européen qui avait opté pour le premier registre, frisant l’auto-satisfaction.

 

Le second bloc, central sur le plan discursif, avait pour visée de délivrer les nouvelles mesures dont la plupart traduisent un relèvement des contraintes, lesquelles illustrent en creux la perte de contrôle de l’épidémie par l’exécutif. La généralisation sur tout le territoire des dispositifs s’appliquant jusque-là à dix-neuf départements dit «l’enfoncement de nos défenses» et avoue pratiquement ce que l’expression verbale présidentielle se refuse à reconnaître: l’insuffisance des mesures engagées depuis quelques semaines par le gouvernement.

La fermeture des écoles, totem brandi jusqu’à plus soif comme une exception «victorieuse» de la gestion française, redouble cette impression de recul. Tout se passe comme si la politique du Président pliait toujours plus, mais que seule sa communication ne rompait pas malgré cette forme d’évidence qui dans l’opinion se propage: le retard est la marque de fabrique de cette gestion de crise.

 

Le troisième bloc relevait du combat et de l’espoir, les mots et les annonces se succédant en cascades: le réarmement à venir des réanimations, l’accélération de la vaccination et au bout du bout de ce tunnel qui n’en finit pas l’aurore très pâle d’une réouverture progressive, à pas comptés des commerces et des lieux de vie pour Mai, où les Françaises et les Français auront compris qu’ils ne feront pas, malgré tout, ce qui leur plaît.

Au moment d’évoquer la stratégie, s’est imposée l’impression d’un exécutif tenaillé entre la pression du virus et les doutes de l’opinion.

Au final, n’est-ce pas l’inconscient du Président qui a beaucoup plus dit qu’il n’entendait dire lorsqu’il a prévenu au détour d’une phrase que nous dépasserions, hélas bientôt, la barre dramatique des 100 000 morts, anticipant comme pour le déminer ce que le franchissement de ce seuil produira dans ses répercussions médiatiques et, mutadis mutandis, dans les plis profonds de l’opinion?

C’est ce même inconscient, paradoxe d’une rhétorique aspirant à la pédagogie, qui s’est exprimé lorsqu’évoquant sa stratégie de la tenaille, freiner l’épidémie et accélérer la vaccination, s’est imposée surtout l’impression d’un exécutif tenaillé entre la pression du virus et les doutes de l’opinion.

Remake d’un long remake, la communication présidentielle aura-t-elle redonné sa chance à la parole politique et la parole politique à la puissance publique? Il est permis d’en douter tant la politique justement ne cesse de courir après le virus et la communication après la politique…

Féminisation des noms de métiers par l’académie

 Féminisation des noms de métiers par l’académie

L’Académie française s’est prononcée en faveur d’une ouverture à la féminisation des noms de métiers, de fonctions, de titres et de grades. Approuvé à une très large majorité (seules deux voix se sont élevées contre), le rapport émanait d’une commission d’étude composée de Gabriel de Broglie, Michael Edwards, Danièle Sallenave et Dominique Bona. Quoique très prudent et fort diplomatique, il n’en représente pas moins une sorte de révolution sous la Coupole. C’est la toute première fois que l’institution, créée en 1634, va aussi loin dans la reconnaissance du féminin des mots, renouant en cela avec une pratique courante au Moyen Age.

Pas question de légiférer, rappelle le rapport, l’Académie se contente d’être la gardienne du « bon usage »« Nous voulions rouvrir ce dossier, pour montrer que l’Académie est sensible au fait que des femmes s’interrogent sur la définition de leur métier », indique l’écrivaine Dominique Bona, qui milite depuis longtemps pour cette avancée. Il ne s’agit pas d’avaliser toutes les nouveautés, ni de les freiner d’ailleurs, mais « d’étudier quelles évolutions pratiques il serait souhaitable de recommander » en dégageant, parmi les usages, « ceux qui attestent une formation correcte et sont durablement établis »

 

Pour autant, ses préconisations sont assez claires. Dans le domaine des métiers et des professions, d’abord, « il n’existe aucun obstacle de principe à la féminisation des noms ». La plupart des métiers manuels le sont déjà et depuis longtemps. Le rapport constate à ce propos que « la langue française a tendance à féminiser faiblement ou pas les noms de métiers (et de fonctions) placés au sommet de l’échelle sociale ». Cette résistance augmente à mesure que l’on s’élève dans la hiérarchie professionnelle.

Les mots terminés par un « e » muet (« architecte ») ou un « o » (« impresario ») sont les plus faciles et, sauf quelques cas particuliers (« médecin »), les noms masculins terminés par une consonne se féminisent aisément en ajoutant un « e ». Idem pour les noms en « eur », qui peuvent se féminiser grâce au « e » (« docteure »), sauf lorsqu’un verbe correspond au mot (« chercheur-euse »).

Restent les noms qui posent problème. A commencer par « chef », qui a donné lieu à la création de formes féminines très diverses : « la chef », « chèfe », « cheffesse », « cheftaine » ou même « chève » (comme brève). Quoique n’appartenant pas de manière évidente au « bon usage », concluent les académiciens, c’est pourtant le mot « cheffe » qui l’emporte, car il est le plus employé.

Mais les mots sur lesquels les académiciens achoppent le plus et depuis longtemps sont ceux qui les concernent de plus près : écrivain et auteur. Pour le premier, l’affaire est si sensible que le rapport expédie en deux lignes la forme « écrivaine » – laquelle se contente pourtant d’ajouter un « e » à un mot se terminant par une consonne, selon la règle préconisée plus haut. « Cette forme, lit-on, se répand dans l’usage sans pour autant s’imposer. »

En réalité, beaucoup d’académiciens continuent de trouver ce mot laid, ou dissonant. Ils entendent « vaine », là où ils ne remarquent pas du tout « vain » quand le mot est au masculin. Qu’importe ! Le 21 février, dans son discours de réception de Patrick Grainville à l’Académie Française, Dominique Bona n’a pas hésité à formuler le mot « écrivaine » en parlant de Marguerite Duras, juste pour le plaisir de le faire résonner sous la coupole…

L’écriture inclusive en question

L’écriture inclusive en question

La proposition de loi du 23 mars visant à interdire le langage inclusif de tous les documents des services publics reviendrait, entre autres, à refaire nos cartes d’identité – qui suivent déjà ce système à travers le « né(e) le » –, relève Eliane Viennot, professeuse de littérature française, dans une tribune au « Monde ».

L’« écriture inclusive » a surgi dans le débat public à l’automne 2017, après la découverte de quelques points médians dans un manuel scolaire par des activistes qui avaient obtenu le retrait des ABCD de l’égalité. Jusqu’alors, on parlait plutôt de langage non sexiste, ou non discriminant, ou épicène, ou égalitaire – le point médian n’étant qu’un des moyens, à l’écrit, d’abréger les doublets (« lycéens et lycéennes » devient « lycéen·nes »). Autrement dit, un détail.

Pendant une quarantaine d’années, c’est un autre volet de ce langage qui avait fait débat : la « féminisation des noms de métiers et de fonctions ». Terminologie erronée et trompeuse, puisque le français possède tous les noms voulus pour parler des activités des femmes et qu’il faut juste les retrouver, après des siècles d’ostracisme : autrice, chirurgienne, défenseuse (des droits), écrivaine, lieutenante, maîtresse (des requêtes), pharmacienne, professeuse, rapporteuse (de lois)… Bataille presque gagnée, de nos jours, après la reddition de l’Académie dans son rapport du 28 février 2019.

 

Durant le même automne 2017, un autre pilier du langage non sexiste a fait du bruit, avec la parution du manifeste « Nous n’enseignerons plus que le masculin l’emporte sur le féminin » sur le site Slate.fr. Signé par 314 personnes chargées d’instruire enfants ou adultes, il rappelait que le français est équipé pour résoudre le « conflit » entre les termes féminins et masculins appelant un adjectif commun : l’accord de choix (avec celui qui semble le plus important) ou l’accord de proximité (avec celui qui est le plus proche).

Faire reculer le masculin générique

Le langage inclusif exige encore qu’on en finisse avec l’usage du mot « homme » pour désigner l’humanité – qui est aussi composée de femmes, d’enfants, d’intersexes… donc d’humains. Changement que l’Etat français aurait dû admettre dès 1948, lorsqu’il signa la Déclaration universelle des droits humains de l’ONU, dont le titre enregistrait l’immense progrès du XXe siècle : l’accès des femmes à la citoyenneté.

Le dernier objectif est de faire reculer le masculin dit « générique » – version républicaine et pseudo-scientifique du « genre le plus noble » cher aux amis de Richelieu. C’est lui qui est visé avec la pratique des doublets, abrégés ou non. Faut-il dire « Françaises et Français », « citoyennes et citoyens », « téléspectatrices et téléspectateurs » ? C’est oublier qu’en français, le masculin joue le même rôle que le neutre dans d’autres langues. « Français », « citoyens » et « téléspectateurs » désignent indifféremment les deux sexes, écrivait Alain Peyrefitte dans Le Figaro du 23 juin 1984.

La relance publique implique de mettre de côté les règles budgétaires en Europe

La  relance publique implique de mettre de côté les règles budgétaires en Europe

Roel Beetsma est professeur et vice-doyen de la faculté des sciences économiques et commerciales, à l’université d’Amsterdam, aux Pays-Bas. Il est membre du comité budgétaire européen, un organe consultatif indépendant qui conseille la Commission sur le cadre budgétaire. Il fait aussi partie d’une commission indépendante conseillant le gouvernement néerlandais sur les positions à adopter en matière de politiques financières et économiques de l’Union. (Interview dans l’Opinion)

Faut-il réformer le Pacte de stabilité et de croissance ? Qui fixe les règles budgétaires européennes ?

Habituellement, après une crise, l’investissement public chute. De fait, les études que nous avons menées montrent qu’il a été plus faible après la crise financière mondiale. C’est en particulier le cas pour les pays très endettés, comme l’Italie et le Portugal. Au comité budgétaire européen, nous avons recommandé à la Commission européenne de reprendre le Pacte de stabilité et de croissance et d’adopter ce que nous appelons une règle d’or budgétaire modifiée, permettant un relâchement du plafond d’augmentation de la dépense publique pour permettre de l’investissement public. Nous sommes conscients des inconvénients : les gouvernements sont incités à reclasser des dépenses comme de l’investissement. Donc nous suggérons que la règle d’or modifiée s’applique uniquement aux investissements déjà classifiés comme tels par la Commission. Par exemple, ceux financés par les fonds structurels, qui répondent à certains critères. La part du financement qui vient des Etats membres pourrait être exemptée des règles budgétaires et même majorée par les gouvernements, en ayant un plafond plus élevé.

« Vous devez donc trouver un compromis en permettant, d’un côté, des dépenses favorables à la croissance et en vous assurant, d’un autre, que ces dépenses facilitées en soient vraiment porteuses »

Quels sont ces investissements ? Est-ce si simple de différencier dépenses d’investissement et de fonctionnement ?

Classiquement, ce sont les investissements dans les infrastructures : routes, réseaux électriques, chemins de fer, bâtiments scolaires ou gouvernementaux… A contrario, les salaires des enseignants ne sont pas considérés comme des investissements, alors qu’ils encouragent la croissance. Dans l’idéal, on rendrait flexibles les règles budgétaires pour toute dépense publique porteuse de croissance. Mais les gouvernements souhaitent présenter comme telles toutes sortes de dépenses. Vous devez donc trouver un compromis en permettant, d’un côté, des dépenses favorables à la croissance et en vous assurant, d’un autre, que ces dépenses facilitées en soient vraiment porteuses. C’est plus facile dans le cas des investissements en infrastructures. Il faut noter que les règles budgétaires européennes autorisent déjà une certaine flexibilité pour les investissements publics. Dans le bras préventif du Pacte de stabilité, les gouvernements qui affichent un déficit structurel [c’est-à-dire des recettes inférieures à leurs dépenses sans tenir compte de l’impact de la conjoncture] doivent améliorer ce dernier de 0,5 % du PIB par an. Mais la flexibilité pour l’investissement public peut atteindre environ 0,2 % du PIB. Ce n’est pas rien. Néanmoins, en pratique, les pays n’ont presque jamais utilisé cette possibilité. Ils ont de nombreuses autres possibilités de flexibilité qu’ils exploitent déjà auprès de la Commission : événements inhabituels, réformes structurelles, marges d’incertitudes…

Comment se positionnent les grands pays européens par rapport à la réforme du Pacte de stabilité ?

Les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Autriche et les pays scandinaves sont sceptiques et craignent davantage de flexibilité dans les règles budgétaires européennes. En revanche, la France, l’Espagne et l’Italie y sont favorables. On retrouve la division classique. La Commission va lancer très prochainement des consultations à propos de potentiels changements concernant le Pacte. Il y aura des débats, mais ce qui en sortira n’est pas encore clair…

Covid : pour une culture de la responsabilité politique

Covid  : pour une culture de la responsabilité politique  – la tribune de Jérôme Levy et Rubin Sfadj

 

 

Jérôme Levy ,journaliste,  Rubin Sfadj, avocat militent pour une culture de la responsabilité politique dans la crise sanitaire ( tribune dans l’Opinion)

 « Depuis le début de la pandémie, tous les pays ont commis des faux pas, pas seulement la France ni même l’Europe. Mais une chose est certaine : seuls entrevoient le bout du tunnel ceux qui ont eu le courage de reconnaître leurs erreurs et de les corriger »

Abroger le principe de précaution est nécessaire mais pas suffisant

Depuis le début de la pandémie, tous les pays ont commis des faux pas, pas seulement la France ni même l’Europe. Mais une chose est certaine : seuls entrevoient le bout du tunnel ceux qui ont eu le courage de reconnaître leurs erreurs et de les corriger.

La Grande-Bretagne s’est essayée à l’immunité de groupe avant de revenir sur ses pas.

En Israël, avant d’obtenir les succès que l’on sait, Benjamin Nétanyahou a admis avoir déconfiné trop tôt en septembre.

Les Etats-Unis ont subi l’inaction et les déclarations lunaires de Donald Trump avant de lancer une campagne de vaccination massive.

Les excuses récentes d’Angela Merkel ont ouvert le débat, en Allemagne, sur l’opportunité d’un nouveau confinement.

Dans ce contexte, les déclarations de nos gouvernants résonnent comme une exception française dont on se serait bien passé : aucun “mea culpa”, pas de “remords” ni de “constat d’échec”, comme si c’était des gros mots. Et mercredi soir encore, cette certitude martelée d’avoir tout mieux fait que les autres.

Pourquoi ? En grande partie sans doute à cause d’un mal bien français : la culture de l’irresponsabilité.

Attestation-fleuve. Au-delà même de la sphère politique, il y a ce sentiment en France que celui ou celle qui prend les décisions n’est jamais complètement responsable lorsque ça tourne mal. Que plus on monte dans la pyramide du pouvoir, moins on peut décemment être mis en cause en cas de problème. C’est Jérôme Kerviel que l’on sanctionne plutôt que sa hiérarchie. Plus proche de nous, c’est Gérald Darmanin qui, mis en cause dans l’affaire de désormais célèbre attestation-fleuve, se défausse sur ses services.

Bien sûr, notre pays n’est pas étranger à la judiciarisation de la vie publique. De temps à autre, la condamnation sacrificielle d’un ancien responsable vient rappeler à tous ceux encore en place que la façon la plus sûre d’échapper au même sort est de ne rien faire du tout. Dans un renversement symbolique spectaculaire, le décideur politique français devient ainsi, tel l’enfant-roi, un irresponsable chronique : il est toujours le meilleur en tout, rien n’est jamais de sa faute et, si jamais les faits lui donnent tort, gare à la crise de nerfs.

Si vous alliez une aversion constitutionnelle au risque et une immunité institutionnalisée aux conséquences, vous obtenez ce qui fait la spécificité des défaillances françaises dans la gestion de la crise du coronavirus : une incapacité pathologique non seulement à reconnaître mais surtout, derechef, à corriger la moindre erreur

Comment en est-on arrivé là ? De même que l’Etat infantilise les Français, il semble qu’il ait aussi infantilisé nos dirigeants. Les accros à l’irresponsabilité ont un alibi tout désigné : le sacro-saint principe de précaution.

Si vous alliez une aversion constitutionnelle au risque — avec le principe de précaution, on ne pourra jamais vous reprocher de n’avoir rien fait — et une immunité institutionnalisée aux conséquences — on ne va pas tracasser le capitaine du Titanic pour une histoire de radeaux de sauvetage —, vous obtenez ce qui fait la spécificité des défaillances françaises dans la gestion de la crise du coronavirus : une incapacité pathologique non seulement à reconnaître mais surtout, derechef, à corriger la moindre erreur.

Les tergiversations sur les masques lors de la première vague de la pandémie ? Le principe de précaution bien sûr : il n’y avait, paraît-il, « pas de consensus scientifique » sur le port du masque.

La suspension du vaccin Astra Zeneca ? Encore le principe de précaution, mais « en espérant la reprendre le plus vite possible ». Le mieux, dans ce cas, aurait été de ne pas l’interrompre du tout.

Plus généralement, la campagne de vaccination qui tourne au ralenti n’est pas un échec mais une réussite : bientôt, nous promet-on, « l’Europe sera le premier producteur mondial de vaccins ». En somme, on rase gratis… demain.

Petit jeu. Résultat des courses après un an de ce petit jeu : non seulement le gouvernement a échoué à enrayer la progression du virus, mais il a perdu la confiance de citoyens qui ne savent plus sur quel pied danser. S’il y a une leçon à tirer de ce double échec, c’est que nos dirigeants doivent enfin apprendre à dire, sans détour mais avec humilité : “je me suis trompé(e)”. Rien n’alimente autant la colère dont se nourrissent les extrêmes que le refus obstiné et arrogant de reconnaître une erreur observable par tous.

Pour sortir de cette ornière, une simple rature dans la Constitution n’y suffira pas. Il sera bien sûr indispensable d’abroger légalement le principe de précaution ; mais le plus dur sera de débarrasser les esprits de la culture de l’irresponsabilité.

Telle est la condition sine qua non de notre retour à l’âge de raison.

Jérôme Levy est journaliste. Rubin Sfadj est avocat.

La remise en cause des entreprises à RSE par François de Closets

La  remise en cause des entreprises à  RSE par François de  Closets

Après l’affaire Danone, François de Closets s’interroge sur l’avenir du concept de RSE qui vient en contradiction avec les exigences de rentabilité de certains actionnaires. ( Chronique dans l’opinion)

 

Au XIXe siècle, les sociétés industrielles lièrent pouvoir et propriété. Le propriétaire, artisan ou maître des forges, imposait sa loi et achetait le travail dont il avait besoin. Depuis lors, les travailleurs ont acquis un statut protecteur et l’entreprise est devenue le foyer où se forme la valeur marchande. Sur 30 millions de Français au travail, 90 % sont des salariés. C’est dire que l’entreprise est une des institutions structurantes au même titre que la famille, l’école ou la nation. Elle absorbe la vie laborieuse : 1 600 heures par an, elle est le creuset de la créativité, des espérances, des conflits ou de la résignation. Elle est au cœur de l’existence, mais a-t-elle un cœur ?

Dans les années 1950-1970, les sociétés industrielles se sont éloignées du capitalisme originel. En 1967, John Kenneth Galbraith créa l’événement en publiant The new industrial state dans lequel il montrait que les grandes entreprises étaient aux mains d’une technostructure salariée et que le capital éparpillé en des millions d’actionnaires ne pesait plus rien. L’actionnaire était considéré comme un obligataire. Il touchait son dividende mais n’avait pas voix au chapitre. La structure était aux mains de cadres dirigeants qui décidaient de tout en interaction avec le personnel, les clients, les syndicats, les banquiers ou les fournisseurs, voire le gouvernement. Le monde industriel était sorti du capitalisme sans s’en rendre compte !

 Avant même que s’apaisent les remous du livre, Milton Friedman lançait dans le New York Time sa bombe, en assignant comme seul objectif, seule raison d’être, à l’entreprise la création de valeur pour l’actionnaire, sa création et son accroissement. Bref, l’enrichissement des propriétaires. Galbraith et Friedman eurent tous deux raison : chacun à son tour.

Entre 1950 et 1970, la direction du personnel devenait la gestion des ressources humaines et l’on se prit à imaginer que le contrat de travail pourrait déboucher sur une vraie citoyenneté d’entreprise

Entre 1950 et 1970, l’entreprise avait bel et bien échappé au capital. Elle était perçue comme une communauté dans laquelle chacun devait trouver sa place. Les salariés n’étaient pas seulement un coût mais d’abord une richesse. La direction du personnel devenait la gestion des ressources humaines et l’on se prit à imaginer que le contrat de travail pourrait déboucher sur une vraie citoyenneté d’entreprise.

Rêve vite évanoui car le modèle de Milton Friedman l’emporta sur celui de Galbraith. Conforté par la concurrence, le capital reprit le pouvoir et imposa sa loi. L’entreprise n’était qu’une machine à produire, une boîte noire générant le profit sous forme de dividendes ou de plus-values. Le salarié se vit assigner un seul objectif : enrichir son patron. Par contrecoup, l’attachement à l’entreprise se réduisit au lien commercial. Dans cet espace ubérisé, les salariés sont des mercenaires qui vendent leurs services aux plus offrants.

Quant aux dirigeants, ils ne sont plus les premiers des salariés mais les représentants du capital. Ils doivent obtenir le maximum de productivité pour le moindre coût et faire monter le cours en bourse. La déshumanisation du travail, l’accroissement des inégalités et les atteintes à l’environnement que peut engendrer ce système sont des externalités et n’ont pas à être prises en compte.

Ce modèle s’est imposé par son efficacité économique mais il reste aussi peu satisfaisant sur le plan humain que sur le plan environnemental. Peut-on réduire l’entreprise au profit, le travailleur au salaire et la nature à des économies externes. ? L’idée d’enrichir les finalités en ajoutant des objectifs sociaux et environnementaux à la seule maximalisation du profit faisait son chemin. Mais les dirigeants sont tenus par le cadre légal et se mettraient en infraction s’ils ajoutaient des dimensions supplémentaires aux objectifs réglementaires. La nouvelle entreprise a besoin d’un cadre juridique.

Ce qui fut fait en 2010 aux Etats-Unis lorsqu’apparurent trois nouveaux types de sociétés que nous avons regroupées sous le titre de « sociétés à missions ». Notre loi Pacte de 2019 introduit ces statuts qui permettent d’ajouter des objectifs sociaux et écologiques aux seuls objectifs commerciaux. On a donc vu apparaître en France, mais aussi en Amérique et en Italie, des entreprises qui se donnent des objectifs plus étendus que ceux prévus par le libéralisme friedmanien. Sont-elles l’avant-garde d’une rupture avec le capitalisme du seul profit ? La réponse devait venir du marché concurrentiel, car, avec ou sans « missions », une entreprise doit d’abord être rentable et ne peut survivre que si elle assure sa compétitivité.

L’affaire Danone apporte une première réponse. Notre champion des yaourts est la première entreprise du CAC40 à avoir pris le statut d’entreprise à missions et ce, bien qu’il compte des fonds activistes parmi ses actionnaires. Il se donnait comme « raison d’être » « d’apporter la santé par l’alimentation au plus grand nombre. ». Une transformation approuvée par le conseil d’administration et l’Assemblée générale. Le PDG et ardent promoteur de ce nouveau capitalisme pouvait conclure : « Vous avez déboulonné la statue de Friedman ».

Déboulonné, oui, détruite, non. Car la Bourse, elle, en reste aux résultats financiers. L’entreprise, que ce soit Danone ou une autre, est condamnée au grand écart entre le respect de ses « missions » et les performances boursières. Or les fonds activistes constatent que le compte n’y est pas. Sur l’ensemble de l’exercice 2020, le chiffre d’affaires a reculé de 1,5 % et le résultat net courant de 13 %. Le dividende est rogné et le cours dévisse de 30 %. C’en est trop, ou pas assez comme on voudra. Emmanuel Faber le champion du nouveau capitalisme est évincé. Danone va se recentrer sur la première de toutes ses missions : les résultats comptables. Nul doute que, dans l’avenir, les quarante du CAC ne seront guère empressés à se lancer dans l’aventure du capitalisme multimissionné.

Retenons ce brutal rappel à l’ordre : une société cotée doit d’abord être rentable. Les « missions » viennent en plus de la compétitivité, elles ne la remplacent pas

L’entreprise de Friedman a-t-elle définitivement gagné ? Ce serait trop vite conclure car elle est toujours prisonnière de ses limites et l’on ne peut tirer des conclusions générales d’un cas particulier. En revanche ce précédent doit enrichir la réflexion sur le dépassement de l’entreprise. Retenons ce brutal rappel à l’ordre : une société cotée doit d’abord être rentable. Les « missions » viennent en plus de la compétitivité, elles ne la remplacent pas. Mais comment financer les coûts supplémentaires ou le manque à gagner ? Il n’est qu’une source de productivité à exploiter, c’est le travail.

La pression qu’entretient le management libéral déshumanisé lui permet-elle d’atteindre son plus haut niveau de productivité ? Toute amélioration sociale dans l’entreprise se traduira-t-elle par une moindre efficacité ? Si tel est le cas, alors il y a peu à espérer de ces « missions » qui promettent tant dans leurs intentions et tiennent si mal au niveau des résultats. Mais on peut aussi espérer que le personnel se mobilise davantage apporte plus d’énergie et de créativité dans une entreprise qui sait atteindre l’individu au-delà du salarié. Les patrons « paternalistes » du XIXe siècle l’avaient pressenti et ne s’en portèrent pas plus mal.

Au XXIe siècle, il est bien des façons de renforcer cette adhésion aux valeurs de l’entreprise. Et, pour commencer, faire de chaque salarié un actionnaire mais aussi pousser plus avant la valorisation des tâches, les possibilités de promotion, la reconnaissance du mérite, l’écoute des individus, la prise en compte des difficultés, bref redonner tout son sens à cette expression de « ressources humaines ». En contrepartie de ces progrès sociaux peut-on susciter un attachement qui améliore la productivité ? Doit-on, au contraire, reconnaître que l’entreprise friedmanienne est indépassable ?

C’est la question préjudicielle. Si l’amélioration sociale incite au relâchement, les entreprises n’iront pas bien loin dans leurs nouvelles « missions ». Si au contraire elle provoque l’engagement alors on pourra voir comment l’accompagnement fiscal, la législation écologique, le cadre réglementaire pourront permettre à la nouvelle entreprise de l’emporter et de régénérer le capitalisme.

Covid Turquie : hausse des 40.000 cas quotidiens, un record

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Il faut sans doute prendre avec des pincettes les chiffres des contaminations en Turquie. Ceci étend d’après les chiffres officiels le nombre de contaminés aurait atteint un chiffre de record de 40 000 en 24 heures en raison notamment de la réouverture des restaurants Selon le ministre de la Santé, 40.806 nouveaux cas de coronavirus ont été diagnostiqués en 24 heures et 176 personnes sont décédées des suites du Covid.

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