Andrew Todd,Architecte, spécialiste de la construction en bois estime que le bois est notre parent. Il peut nous orienter dans notre pensée, dans notre communication, dans notre éducation et dans notre politique, explique l’architecte dans une tribune au « Monde ».
Tribune.
François Hallé, botaniste et concepteur de la splendide exposition « Nous les arbres » à la Fondation Cartier, et Michel Druilhe, président de [l’Interprofession nationale de la filière forêt-bois] France bois forêts, chef de file des exploitants, se querellent sans se nommer, le premier à l’occasion de tribunes dans Le Monde, la plus récente datant du 21 mars, le second dans Les Echos, notamment dans un texte du 4 décembre 2020.
Sans citer le nom de Francis Hallé, Michel Druilhe fustige les avis d’un « biologiste botaniste » opposé à l’exploitation des forêts à des fins de profit. Il prône (sans donner de chiffres) leur « exploitation raisonnée et raisonnable », à condition qu’elles soient « plantées et récoltées avec méthode ». Francis Hallé souhaite réserver l’exploitation à des « plantations monospécifiques », laissant la « vraie forêt » en libre évolution.
Un signe de progrès écologique
Architecte engagé dans la construction en bois, j’entends ces deux voix dans deux oreilles opposées. Familier de leurs mondes respectifs, c’est comme si je me promenais avec un livre de biophilosophie dans une main – La Vie des plantes, (Payot & Rivages, 2016) du philosophe italien Emanuele Coccia, par exemple –, et une hache dans l’autre, pour décider de mes actions professionnelles. Dans le jargon psychologique anglo-saxon, il paraît que je suis « conflicted ».
Nous devrions construire davantage en bois – captant ainsi le CO2 – et diminuer la part de la production forestière qui part en fumée ou en pâte à papier
Ce conflit Hallé/Druihle risque de dévier notre attention de problèmes plus importants. Si nous nous inquiétons de la provenance des mille chênes multicentenaires voués à être sacrifiés pour reconstruire la charpente de Notre-Dame, c’est un signe de progrès écologique : personne n’a pleuré auparavant pour les plages détruites et les milliers de barils de pétrole brûlés pour faire le béton du Parc des Princes, par exemple. Ni pour les bâtiments fantômes en bois – tel un cocon d’insecte – qui donnent forme à tout édifice coulé en béton.
Nous devrions construire davantage en bois – captant ainsi le CO2 – et diminuer la part, 62 %, d’après la FAO [Food and Agriculture Organization], de la production forestière qui part en fumée ou en pâte à papier. D’après Emanuele Coccia, « la nature se dévore en permanence ». Nous devons tous manger, mais sans nous goinfrer. Et manger bien, tout en sachant où on met les pieds.
0 Réponses à “Environnement : le rôle du bois”