Responsabilité pénale et drogue
Tribune dans le Monde de Jean-Christophe Muller,Avocat général à la cour d’appel de Paris et deDavid Sénat, Avocat général à la cour d’appel de Toulouse
Un premier expert psychiatre, le docteur Daniel Zagury, avait estimé que la dégradation de l’état psychique de l’auteur trouvait son origine dans sa consommation volontaire et régulière de cannabis, augmentée dans les jours précédant les faits. Il estimait que ses troubles psychiques avaient été induits par la prise consciente, volontaire et régulière de cannabis en très grande quantité. Cet expert concluait que sa responsabilité pénale devait donc être retenue, mais en tenant compte du fait que la nature des troubles psychiques avait largement dépassé les effets attendus. Si ces conclusions avaient été suivies, le meurtrier de Sarah Halimi aurait pu être jugé par une cour d’assises, encourant une peine maximale de trente ans de prison du fait de l’altération du discernement (ces faits étant normalement punis de la réclusion criminelle à perpétuité).
Deux autres collèges d’experts sont intervenus. Un premier concluait à l’irresponsabilité pénale ; un des membres de ce collège, le docteur Paul Bensussan, expliquait dans la presse que la dégradation de l’état psychique de l’auteur était déjà amorcée, que sa consommation de cannabis l’avait aggravée mais que l’auteur ne pouvait en mesurer les effets. Un troisième collège d’experts concluait de manière plus ambiguë à l’existence d’une bouffée délirante d’origine exotoxique « orientant plutôt classiquement vers une abolition du discernement ». On le voit, le débat dont les termes étaient posés par un total de sept experts psychiatres non unanimes méritait à tout le moins que la question fût publiquement débattue et tranchée par un jury populaire.
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