Economie–Industrie du futur : le retard français
Un article intéressant du journaliste Pierrick Merlet dans la Tribune qui explique comment le gouvernement pourrait éventuellement parvenir à combler le retard de la France en matière d’industrie du futur.
Dans l’espoir de revenir au niveau des autres pays européens, le gouvernement français a décidé l’an dernier d’allouer, dans son plan France Relance doté de 100 milliards d’euros, une enveloppe spécifique à l’industrie du futur d’un montant de 280 millions jusqu’en 2022. Les PME et ETI peuvent en bénéficier grâce à un guichet dématérialisé géré l’Agence de services et de paiement (ASP). Ouvert du 27 octobre au 31 décembre 2020 dans un premier temps, le mécanisme offrant un co-financement public de 10 à 20% – voire 40% dans certains cas – n’a pas manqué de séduire les industriels, au point de consommer potentiellement tout le budget prévu sur trois ans initialement.
« L’initiative a rencontré un franc succès aussi bien qualitatif que quantitatif. Nous avons reçu 7.750 demandes portant sur des investissements de plus de 2,7 milliards d’euros (chiffres arrêtés au 9 avril, ndlr). Près de 900 décisions positives ont déjà été envoyées représentant 104 millions d’euros d’aides, pour 289 millions d’euros d’investissements industriels », se félicite le cabinet de la ministre déléguée chargée de l’industrie, Agnès Pannier-Runacher.
Pour être éligible à de ce guichet « Industrie du futur », les entreprise doivent répondre à deux critères principaux. Le projet doit tout d’abord porter sur une activité de production industrielle et l’investissement doit faire partie d’une liste de huit types d’équipements arrêtée par un décret du 23 octobre dernier. Sont ainsi concernées les dépenses liées aux équipements robotiques ou à la fabrication additive; les logiciels pour la conception, la fabrication ou la maintenance ; les capteurs physiques collectant des données ; les machines intégrées destinés au calcul intensif ; les machines de production à commande programmable ou numérique ; les équipements de réalité augmentée ou virtuelle ; et les logiciels ou équipements qui recourt à de l’intelligence artificielle.
Selon un premier bilan portant sur le fond des demandes de subventions, la moitié des dossiers concerne des investissements pour des machines à commande numérique, et 17% pour des logiciels et 16% pour des robots/cobots. « Ces investissements correspondent à un rattrapage technologique réalisé par les entreprises françaises et constituent également le premier échelon vers l’industrie du futur« , commente l’équipe de la ministre.
Face à un tel engouement, le gouvernement vient d’annoncer (comme prévu) la réouverture dès le 3 mai de ce guichet dédié à l’industrie 4.0, dont 95% des bénéficiaires sont des PME. En revanche, la nouvelle enveloppe de 175 millions d’euros associée est une nouveauté. « C’est de l’argent nouveau qui n’était pas prévu au départ et tous les secteurs industriels peuvent en bénéficier, comme l’automobile et l’aéronautique (qui ont déjà des fonds spécifiques, ndlr)« , tient à souligner Bercy.
Quitte à mettre de l’argent frais sur la table, la France souhaite que cette rallonge bénéficie dans les deux sens, c’est-à-dire aussi bien à « ses » entreprises clientes qu’à « ses » entreprises vendeuses. Le gouvernement veut donc à la fois structurer l’offre de solutions françaises en matière d’industrie du futur et sa filière. En ce sens, il vient de lancer une plateforme numérique (« Solutionsindustriedufutur« ) pour débuter ce travail de vitrine du savoir-faire français en la matière.
« Notre intention est de rassembler la filière, se doter d’une feuille de route stratégique et faire aller dans le même sens tous ses acteurs au sein d’un tissu déjà dense. L’objectif est d’offrir une meilleure visibilité aux offreurs de solutions français afin de favoriser le lien entre l’offre et la demande. Par ailleurs, l’idée est de travailler sur des projets importants d’industrie du futur qui pourraient avoir un impact sur d’autres filières comme la gestion des déchets par exemple », indique-t-on dans l’entourage d’Agnès Pannier-Runacher.
Par conséquent, à l’occasion d’une réunion de son comité exécutif présidée par le Premier ministre vendredi 9 avril, le Conseil national de l’industrie (CNI) a annoncé la labellisation de la filière « Solutions pour l’industrie du futur ». Ce qui en fait le 19ème comité stratégique de filière française, qui aura pour vocation d’agir « dans la continuité de l’action de l’Alliance pour l’industrie du futur« , précise Bercy.
Pour mémoire, cette structure a été créée en 2015 par François Hollande, sous l’impulsion de son ministre de l’Économie de l’époque, Emmanuel Macron. Sans surprise donc, c’est Frédéric Sanchez, le président du directoire de Fives Group et président de l’Alliance pour l’industrie du futur, qui a été désigné par le gouvernement pour piloter ce comité stratégique de filière. « Il devra proposer à la ministre Agnès Pannier-Runacher d’ici l’été une méthode de gouvernance et un bureau composé d’industriels« , annonce le cabinet de la membre du gouvernement.
Rappel des objectifs par exeisconseil
Cette 4ème révolution ne résulte pas seulement de la digitalisation de l’information avec le développement de technologies comme les objets connectés (IoT), la réalité virtuelle ou augmentée, le cloud computing et le Big data. Elle répond avant tout aux enjeux du monde VUCA (Volatil, Uncertain, Complex and Ambiguous) et aux changements de comportements des consommateurs :
Adaptabilité de la production par rapport à la demande : les moyens de production doivent s’adapter à une demande variable tant en quantité qu’en évolution de produit. Les moyens de production et l’ensemble de la supply chain doivent acquérir de l’agilité pour être en mesure de réagir rapidement aux évolutions du marché.
Personnalisation des productions : les grandes séries se raréfient et les industriels doivent gérer un portefeuille de produits de plus en plus complexe avec des délais/budget d’industrialisation de plus en plus courts. Ceci nécessite un outil de production plus efficace (efficience, moins de défauts, moins de pannes) avec un apprentissage accéléré. Le partage de l’information avec les machines via la digitalisation des données est un levier d’action.
Flexibilité (agilité) des processus : les processus internes de l’entreprise doivent pouvoir rapidement faire face aux changements (Cycle de vie de l’article, supply chain, sous-traitance et partenariat, processus collaboratif). Le système d’information doit pouvoir s’adapter pour faciliter et porter ces changements.
Traçabilité : elle représente un enjeu majeur, que ce soit pour des raisons de qualité, de réglementation, de service client ou de protection du marché. Nous pouvons la segmenter en 2 types de traçabilité : Track and Trace
- Tracking (traçabilité logistique) : Correspond à un suivi quantitatif. Il permet de localiser les produits, déterminer les destinations et les origines.
- Tracing (Traçabilité produit) : Permet de reconstituer qualitativement le parcours des produits. On l’utilise pour rechercher les causes d’un problème qualité.
Culture d’entreprise et management : la culture d’entreprise est à l’origine de la mise en œuvre d’une démarche « Industrie 4.0 » et doit en être considérée comme la pierre angulaire. Elle consiste à réorienter l’ensemble de l’entreprise autour du client, passant ainsi d’une logique « d’Offre » à une orientation sur « la Demande ». Elle se manifeste par plus transversalité, de collaboration et d’agilité en brisant les « Silos » de l’entreprise. Les impacts sur l’organisation du travail, les hommes et leurs compétences sont nombreux (ex : Décentralisation des décisions, Environnement de travail modifié et développement de nouvelles compétences numériques, capitalisation et partage des connaissances…)
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