L’Observatoire de la laïcité un bouc-émissaire ?

L’Observatoire de la laïcité un bouc-émissaire ? 

« Ne faisons pas de l’Observatoire de la laïcité un bouc émissaire », appelle, dans une tribune au « Monde », un collectif d’universitaires parmi lesquels Jean Baubérot et Valentine Zuber. Ils mettent en garde contre la tentation de faire de la laïcité « un outil répressif, de contrôle et d’interdiction, en contradiction totale avec la loi de 1905 ». Un article intéressant mais discutable qui montre le glissement du concept de laïcité notamment dans certains milieux universitaires.  

 

 

La laïcité repose sur trois piliers. Le premier : la liberté de conscience, le droit de croire, de ne pas croire, de ne plus croire, de changer de religion, de pratiquer sa religion en privé comme en public sans troubler l’ordre public établi par la loi (article 10 de la Déclaration de 1789). Le deuxième : la séparation des Eglises et de l’Etat, qui entraîne l’obligation de neutralité de l’Etat en matière religieuse et sa parfaite impartialité pour garantir l’égalité de tous, quelles que soient les convictions ou croyances (loi du 9 décembre 1905). Le troisième : la citoyenneté, qui concourt à l’idéal républicain de fraternité – nous sommes toutes et tous, citoyennes et citoyens, à égalité de droits et de devoirs, nous respectons l’autre dans sa croyance ou sa conviction, tout en défendant le libre débat et la critique.


La laïcité n’est pas une vieille lune. Au contraire, sa force réside dans le potentiel universel des principes de liberté qu’elle garantit à tous et à chacun. La loi de 1905 constitue un trésor républicain. Bien sûr, il n’est pas interdit de procéder aux adaptations nécessaires. Mais, pour assurer la cohésion nationale, il faut maintenir l’équilibre entre la possibilité d’un exercice réel des libertés et le respect du cadre collectif. Bref, l’important consiste à rester fidèle à l’esprit conciliateur témoigné par son principal auteur, Aristide Briand, qui l’avait déjà pensée pour une société intensément plurielle.

Dans le débat actuel, une tendance s’exprime bruyamment pour élargir, sous prétexte de laïcité, le domaine d’application de la neutralité du seul Etat à la société en son entier. Cela pourrait inclure les usagers des services publics, les entreprises privées, les associations d’intérêt général, les voies publiques, les parents accompagnateurs de sorties scolaires… La liste n’est pas limitative !

Récupération politicienne

Cela reviendrait aussi à faire des croyances et des convictions, y compris irréligieuses, une affaire intime, condamnées à disparaître de l’espace démocratique. Au-delà des obstacles constitutionnels et conventionnels qu’affronterait ce changement radical d’interprétation du principe de laïcité, ces restrictions de l’expression des convictions dans l’espace public provoqueraient, par ricochet, la réduction progressive d’autres droits et libertés, qui nous sont pourtant si chers. Cette « nouvelle laïcité » deviendrait un outil répressif, de contrôle et d’interdiction, en contradiction totale avec son projet initial et avec la loi de 1905.

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