« Vivre avec nos morts « 

« Vivre avec nos morts « 

« S’il y a un monde que la mort ne peut pas toucher, c’est celui des mots », observe la rabbine Delphine Horvilleur dans son dernier livre, « Vivre avec nos morts ». Un livre lumineux et sans pathos qui invite à célébrer la vie.

 

Entretien du Monde .

 

 Voilà un ouvrage sur la mort que l’on se surprend à lire le sourire aux lèvres. Malgré la gravité apparente du sujet, Vivre avec nos morts (Grasset) est en réalité un puissant hymne à la vie. Il aurait pu tout aussi bien s’appeler LeH’ayim ! – « A la vie ! », en hébreu –, expression qui ponctue régulièrement ce récit plein de sensibilité et de finesse.

Si Delphine Horvilleur prend pour point de départ la narration de vies interrompues, inconnues ou célèbres – la psychanalyste Elsa Cayat, Simone Veil, Marceline Loridan-Ivens –, elle la prolonge d’une réflexion sur la manière de donner sens à cette mort, sans pathos. Pour la première fois, la rabbine se dévoile également de manière plus intime sur sa propre histoire, « ses propres fantômes ». Puisant dans les textes sacrés et, de manière plus inattendue mais tellement savoureuse, dans les objets les plus profanes du quotidien – Lego inclus –, Delphine Horvilleur nous offre ici les enseignements d’une sagesse lumineuse et riante.

Qu’est-ce qui vous a incitée à écrire sur la mort, thème souvent jugé repoussoir ?

Delphine Horvilleur. Si ce thème peut effectivement sembler un peu pesant, j’ai cherché au contraire à offrir des récits qui, face au surgissement de la mort, font gagner la vie et ne lui laissent pas le dernier mot. Quand les gens meurent, ce n’est jamais de leur fin ou de leur tragédie qu’il faut parler, mais de la vie et la façon dont ils l’ont célébrée. D’où le titre du livre, Vivre avec nos morts.

L’idée de cet ouvrage est beaucoup plus ancienne que l’actualité liée à la pandémie, qui a fait surgir la mort de manière visible autour de nous. Depuis des années, je passe un temps considérable dans les cimetières et les maisons des endeuillés. Je savais que je devrais un jour explorer cette question qui me hantait, mais j’appréhendais de le faire. J’avais conscience que cela m’obligerait à faire un travail très personnel pour explorer mon propre rapport à la mort, mes propres fantômes. Mes précédents ouvrages étaient des essais, format qui n’impose pas de se mettre à nu. Ici, je me livre de manière beaucoup plus forte.

Pourquoi étiez-vous, jusqu’alors, réticente à le faire ?

Comme toutes les femmes qui ont été amenées à investir des fonctions longtemps masculines, je voulais sans doute inscrire mon rabbinat dans le sérieux de mon rapport au texte, la neutralité de ma fonction et tenir à distance l’affect. Il me semble qu’il m’a fallu, pendant un temps, surjouer un peu l’exemplarité « cérébrale ». Mais aujourd’hui, du temps a passé, et une certaine reconnaissance me permet peut-être de prendre un peu plus de liberté. Je crois toujours à la quête de l’excellence et du sérieux intellectuel, mais il me semble que je suis prête à dévoiler davantage mes propres vulnérabilités, et à parler à la première personne du singulier.

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