Arrêter le bricolage de la constitution

Arrêter le bricolage de la constitution

Alors qu’a été déposé un nouveau projet de loi visant à modifier la Constitution, pour y inscrire la défense de l’environnement, l’ex-vice-présidente de la commission des lois de l’Assemblée nationale, Marie-France Bechtel s’interroge, dans une tribune au « Monde », sur le bien-fondé de ces multiples révisions.

Tribune.

 

Frénésie constituante. Le gouvernement vient de déposer un troisième projet de révision de la Constitution, faisant suite aux projets avortés de mai 2018 et d’août 2019. Mal reçus au Sénat, ces derniers n’étaient pas en tous points déraisonnables, notamment en ce qu’ils prévoyaient d’améliorer l’institution démocratique du référendum. Cela trouvait en tout cas sa place dans le texte fondamental.

Il est vrai que d’autres réformes accrochées à ce train laissaient davantage place à l’interrogation : la réforme du parquet, un serpent de mer, la « proximité territoriale » qui confond centralisation et bureaucratie (le vrai mal). Quant à l’engagement écologique, sa place est-elle bien dans la Constitution, du moins sous cette forme ?

Cet ensemble hétérogène pointe surtout une question fondamentale : lorsqu’une révision est envisagée, ne faut-il pas d’abord s’assurer qu’elle est bien au niveau du texte constitutionnel ? Nous ne parlons pas ici seulement de son niveau juridique mais aussi bien de sa capacité symbolique à surplomber le débat public, auquel il ne peut se réduire.

Car il est deux façons de porter outrage au texte constitutionnel : l’une, de défigurer les institutions autour desquelles est bâtie sa logique, l’autre d’affadir sa langue en lui faisant perdre sa consistance et par là son autorité.

Si l’on met à part les « permissions » constitutionnelles accordées pour l’intégration du droit de l’Union européenne, quelles sont les occasions dans lesquelles une révision est conforme à la vocation du texte fondamental ? Elles sont au nombre de deux.

D’abord, bien entendu, lorsque la révision porte soit sur l’équilibre des pouvoirs, soit sur les règles essentielles de fonctionnement des institutions. Dans la première catégorie, outre la tempétueuse révision de 1962 instituant l’élection du président de la République au suffrage universel, figure l’adoption du quinquennat. Quoi que l’on puisse penser de cette dernière, il est indéniable qu’elle a sa place légitime dans la Constitution. Dans la deuxième catégorie, figure notamment le train de réformes de 2008 voulues par Nicolas Sarkozy, comme la question prioritaire de constitutionnalité [QPC], qui porte sur l’intangibilité de la loi promulguée, ou bien le rééquilibrage des pouvoirs du gouvernement et du Parlement dans le processus législatif.

Rares ont été les autres réformes portant directement sur l’équilibre des pouvoirs : on ne comptera pour telle l’« organisation décentralisée de la République » voulue par Jean-Pierre Raffarin en 2003. On n’y inclura pas davantage l’irresponsabilité pénale du chef de l’Etat voulue par Jacques Chirac en 2007 et qui résultait déjà de la tradition. Plus proche du fonctionnement des pouvoirs institués était la réforme décidant de la « session unique » (1995) du Parlement qui a d’ailleurs eu pour effet de modifier profondément le statut réel du parlementaire.

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