Vaccins anti-Covid : repenser l’organisation de l’État
Face au dysfonctionnement des chaînes de décision pour gérer l’épidémie, la crise sanitaire appelle à repenser l’organisation de l’Etat, estiment, dans une tribune au « Monde », Vincent Jeanbrun et David Lisnard, deux maires Les Républicains.
Ordres et contre-ordres permanents : voici ce qu’est devenu le quotidien des maires engagés dans la campagne vaccinale. Nos concitoyens peinent à s’y retrouver entre les prises de parole successives et contradictoires de leurs décideurs ; les uns s’empressant de démentir en conférence de presse ce qui a été dit la veille par les autres au micro d’un média. Les élus locaux ne sont pas épargnés non plus par cette cacophonie généralisée au sommet de l’Etat.
Depuis plusieurs semaines, mobilisés sur le terrain pour la réussite des vaccinations, nous avons dû faire face, comme tant de nos collègues, à une succession de confusions, d’inexactitudes et de maladresses de la part des autorités. Faut-il acheter les seringues et le matériel médical ? Comment éviter les doublons sur les listes d’attente ? Peut-on administrer cinq ou six doses avec un flacon ? Comment prioriser les rendez-vous face au nombre considérable d’inscrits ?
En réalité, de stratégie il n’en existe pas : le gouvernement navigue à vue et demande à l’intendance de suivre. De surcroît, si celle-ci s’avise d’émettre des doutes ou de faire part d’inquiétudes, elle devient compteur de « fables », quand elle n’est pas « procureure ».
Par définition, tout ne peut pas être millimétré précisément dans cette gestion de crise sans précédent. Pour autant, à l’impréparation de l’Etat ne doit pas se superposer la désorganisation de ses autorités.
Or c’est bien au dysfonctionnement de la chaîne de décision que nous avons assisté jour après jour. Empêtré dans ses réflexes centralisateurs et bureaucratiques, l’Etat multiplie les intermédiaires entre le ministère et le terrain. Haute Autorité de santé, conseil scientifique, conseil d’orientation de la stratégie vaccinale, comité scientifique sur les vaccins, agence régionale de santé (ARS), Santé publique France… Au total, ce sont vingt et une instances de décisions et de contrôle qui marchent sur les mêmes plates-bandes. Avec pour conséquence une communication illisible qui peine à se traduire sur le terrain.
Les atermoiements sur le délai entre deux vaccinations ont pris, à L’Haÿ-les-Roses [Val-de-Marne], une tournure qui eût été comique si des vies n’étaient pas en jeu. De trois semaines initialement, voilà ce délai porté à six semaines par l’ARS, lors d’une conférence téléphonique un lundi… Avant d’être ramené à quatre semaines par le ministre [de la santé Olivier Véran] le lendemain même, en conférence de presse ! Le tout sous nos yeux médusés et ceux, bien moins tendres, de nos personnels municipaux qui devaient rappeler les patients incrédules pour leur rendre les rendez-vous décalés la veille. Faire et défaire, c’est toujours travailler…
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