Environnement : « L’affaire du siècle » ?
Ce qu’on qualifie l’affaire du siècle concernant l’action judiciaire entreprise au tribunal administratif pour faire condamner l’État pour non-respect des engagements concernant l’environnement est évidemment un événement. Reste qu’il ne faut pas sacrifier à l’emphase sémantique, tout ne changera pas après le jugement du tribunal administratif. Il faudra bien d’autres décisions judiciaires sans doute mais aussi des actions concrètes par secteur d’activité et avec les acteurs économiques et pas seulement les écolos bobos. Il ne suffit pas en effet de loi de décrets ou d’orientation centralisée pour modifier une problématique aussi complexe que celle du rappeur entre l’environnement et la vie quotidienne.
Cette action en justice climatique qui résonnera bien au-delà des frontières de la France doit absolument aboutir, expliquent, dans une tribune au « Monde », les principaux auteurs d’actions en justice climatiques à travers le monde. Mais que signifie aboutir ? Comme l’avait déjà fait le conseil d’État adressé des remontrances au gouvernement et le mettre en demeure d’agir davantage ? Sans doute mais ce sera bien insuffisant pour mettre en œuvre une politique concrète articulant aspects environnementaux, économiques et sociaux.
Tribune.
La question de savoir si nous serons collectivement en mesure de répondre au dérèglement climatique est bel et bien l’affaire de notre siècle. Car le climat nous concerne toutes et tous, avec d’importants impacts sur les écosystèmes, notre santé, notre capacité à vivre sur cette planète, et évidemment sur nos économies et nos modèles politiques.
Mais aussi, sur la justice sociale, car il devient de plus en plus évident que nous ne sommes pas tous touchés de la même manière par les modifications du climat, à travers le monde, ainsi que sur nos territoires ; et que de la même manière, nous ne sommes pas équitablement protégés. Les Etats n’ont pas plus le droit de violer les droits fondamentaux des citoyens que de ne pas agir pour le climat. Il s’agit d’un seul et même combat.
Le climat est donc une affaire de justice, et pas seulement des politiques. Ou pour le dire plus clairement : si les moyens et méthodes d’action pour le climat relèvent bien de choix politiques, agir pour le climat devrait déjà être compris partout comme une obligation s’imposant aux autorités publiques, et plus encore au sein des démocraties et états de droit.
Mille actions en justice
C’est ce que chacun d’entre nous défend dans son pays, c’est aussi ce que les jeunes Portugais défendent face à une trentaine d’Etats européens dont on attend encore une réaction politique à la hauteur de l’enjeu climatique. Au cours des dix dernières années, plus de mille actions en justice climatique ont été recensées à travers le monde. Parmi elles, celle de Urgenda a emporté victoire sur victoire depuis 2015, jusqu’à la toute dernière, en décembre 2019, devant la Cour Suprême néerlandaise.
Cette décision, de la plus haute juridiction d’un des Etats membres de l’Union européenne (UE), devrait inspirer les tribunaux du monde entier. Dans son arrêt, la Cour suprême néerlandaise a estimé que, sur la base des droits humains fondamentaux, les Pays-Bas ont le devoir de faire leur juste part dans la lutte contre la crise climatique et doivent donc réduire leurs émissions plus rapidement que ce à quoi la politique de l’époque était disposée à s’engager. Les droits et principes appliqués par la Cour suprême néerlandaise sont universels. Concomitante du lancement de « L’affaire du siècle », elle doit aussi éclairer la décision qui sera celle des juges français.
Les Etats n’ont pas plus le droit de violer les droits fondamentaux des citoyens que de ne pas agir pour le climat. Il s’agit d’un seul et même combat
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