De Gaulle : un costume trop grand pour Macron
Macron voudrait bien être le nouveau héros national mais son goût pour les commémorations des grands hommes du passé ne suffit pas en faire un personnage historique. De toute évidence, la comparaison avec De Gaulle montre que le costume du général est un peu grand pour Macron. Ce qui est expliqué de manière allusive et politiquement correct par l’ historien Pierre Nora
Tribune dans le Monde
C’était le 9 novembre à Colombey-les-Deux-Eglises, en Haute-Marne. Emmanuel Macron se recueillait sur la tombe du général de Gaulle, pour le cinquantième anniversaire de sa mort. Au matin de ce pèlerinage sans discours, le président lui rendait hommage dans un Tweet contenant une vidéo compilant des extraits de discours du Général : « Résilience et volonté. Cet esprit fut incarné par Charles de Gaulle, engagé pour la France dans les moments de douleurs comme dans ceux de gloires. Cet esprit est un héritage, celui de la France. »
Résilience et volonté ? Deux mots, plus macroniens que gaulliens, adressés aux Français quelques jours après le début du second confinement. En faisant appel à la résilience, le président renouait avec les accents gaulliens qu’il emprunta lors de sa conquête de l’Elysée. « La résilience, c’est aussi s’assurer que, en temps de crise, le pays ne doute pas, qu’il soit fort et sûr de ce qu’il est », avait-il tweeté, le 10 avril 2017.
La résilience, c’est aussi s’assurer que, en temps de crise, le pays ne doute pas, qu’il soit fort et sûr de ce qu’il est. #LutteTerrorisme
— EmmanuelMacron (@Emmanuel Macron)
Quant à la volonté, M. Macron en avait fait, lors de son discours de candidature, le 16 novembre 2016, une condition pour réussir une « révolution démocratique profonde », un projet qui, depuis, a été balayé par une série de tempêtes : politique avec l’affaire Benalla ; sociale avec le mouvement des « gilets jaunes », puis les grèves contre la réforme des retraites ; sécuritaire avec les attentats terroristes ; sanitaire et économique avec l’épidémie de Covid-19.
« Besoin de héros »
En 2020, le chef de l’Etat a rendu hommage au Général à trois reprises : le 17 mai, pour le quatre-vingtième anniversaire de la bataille de Montcornet dans l’Aisne où le colonel de Gaulle, en stratège, parvint à freiner avec ses blindés l’avancée allemande ; au Mont-Valérien, puis à Londres, pour les 80 ans de l’appel du 18 juin ; et le 9 novembre enfin, à Colombey-les-Deux-Eglises. Autant de commémorations qui ont donné l’occasion à Emmanuel Macron de revendiquer l’héritage du Général et de s’identifier à lui. Un recours symbolique au « dernier grand Français » dont on peut toutefois questionner l’impact réel : l’héritage gaullien peut-il encore aider la France à se projeter pour affronter les défis contemporains ? La société française est-elle encore à même d’adhérer au message du Général ?
« Dans une époque aussi peu lourde d’histoire que la nôtre et si profondément dominée par sa mémoire, le Général est incontournable », constate l’historien Pierre Nora
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