« Le constat de l’accord de Paris déjà dépassé »
François Hollande, ancien président de la République (2012-2017), estime dans une tribune au « Monde », que les parties signataires de l’accord trouvé lors de la COP 21, en 2015, doivent relever encore le niveau de leurs engagements pour le climat.
Tribune.
« Dans la vie publique, il s’agit de trouver la question préalable, celle qui prime tout et sans laquelle aucune autre ne saurait même être posée correctement. » C’est en ces termes qu’au lendemain de la seconde guerre mondiale, le résistant et universitaire néerlandais, Hendrik Brugmans, plaidait pour l’unité européenne.
Il y a cinq ans, les délégués de 195 Etats représentant près de l’ensemble du globe se réunissaient à Paris à l’occasion de la COP21, pour faire du changement climatique le grand enjeu du XXIe siècle. Le 12 décembre 2015, tirant les leçons implacables de la science et conjurant la fatalité de l’inaction, la communauté internationale approuvait à l’unanimité le premier accord universel et différencié pour le climat.
Aujourd’hui, dans un contexte mondial bouleversé par la pandémie de Covid-19, les parties de l’accord de Paris doivent aller bien au-delà que rappeler les objectifs fixés en 2015. Les Etats doivent relever le niveau de leurs engagements et réduire plus rapidement et plus fortement les émissions carbonées. Il ne s’agit rien de moins que de diminuer les gaz à effet de serre de plus de 7 % par an, de 2020 jusqu’à 2030.
Obligation morale et politique
Soyons lucides sans verser dans le catastrophisme, le constat établi en 2015 est d’ores et déjà dépassé. Les cinq années que nous venons de vivre ont été les plus chaudes jamais enregistrées. Le réchauffement, si des efforts supplémentaires ne sont pas consentis, sera bien supérieur à 2 degrés Celsius d’ici à la fin du siècle. Il pourrait dépasser 3,5 degrés, voire atteindre 5 degrés. Et d’ici là, les catastrophes naturelles, les feux, les tempêtes, les sécheresses se seront ajoutés à la dégradation irréversible de la biodiversité.
Au moment où les Etats-Unis retrouvent, avec Joe Biden, le chemin de l’accord de Paris, l’Europe a l’obligation morale et politique de franchir une nouvelle étape ; lors du Conseil européen des 10 et 11 décembre, l’Union a pour mission d’agir pour elle-même, mais surtout d’entraîner le monde. Ses dirigeants ne peuvent rester dans l’hésitation et la procrastination. Ils doivent s’accorder autour d’un objectif de diminution des émissions de CO2 d’au moins 55 % d’ici à 2030, et mettre en œuvre une véritable relance verte en soutenant les infrastructures et les technologies décarbonées.
Tout autre objectif climatique trahirait la promesse faite à Paris en 2015.
Le 12 décembre, à défaut d’une nouvelle COP repoussée à 2021, un sommet climat va se tenir pour prendre acte du caractère irréversible de l’accord de Paris. Mais le temps ne peut être ni à la fête ni à la célébration. Une génération s’est levée pour demander des actes pour la planète. Elle ne va céder sur aucune de ses exigences. Elle sera sévère à l’égard de ceux qui auront manqué à leur parole et tardé à prendre leurs responsabilités. Ce que le monde a réussi à dégager comme moyens financiers et humains pour se protéger du Covid doit être décuplé pour préserver la planète. Les deux questions sont d’ailleurs liées dans leurs causes comme dans leurs conséquences. Les plans de sortie de la crise doivent devenir des plans de sortie de l’économie carbonée. C’est aussi un nouveau compromis qu’il convient de nouer à l’échelle mondiale autour de la lutte contre les inégalités.
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