GAFAM: victime d’une vindicte ?

GAFAM: victime d’une vindicte ?

 

Le spécialiste des questions européennes Yves Bertoncini note, dans une tribune au « Monde », que l’agressivité contre les plates-formes numériques traduit une forme de ressentiment vis-à-vis de la réussite d’un écosystème propre aux Etats-Unis, et que l’Europe se désole de ne pouvoir reproduire.

Tribune. Alors que la crise causée par le coronavirus a encore renforcé leur utilité et leur usage aux yeux des consommateurs européens, les grandes entreprises du numérique, au premier rang desquelles les fameuses Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft), sont plus que jamais dans le viseur des autorités publiques nationales et communautaires.

Les orientations présumées du « paquet » législatif sur les services et les marchés numériques (Digital Services Act et Digital Markets Act), présenté par la Commission européenne courant décembre, devraient renforcer cette tendance, alors qu’une stratégie mieux calibrée, et donc plus efficace, serait souhaitable.

Jusqu’alors, le ciblage politique des Gafam semble d’abord traduire la tentation de poursuivre des objectifs industriels ou fiscaux. Après tout, Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft présentent des différences substantielles en termes de modèle commercial de leurs plates-formes numériques, d’usage des données personnelles, de localisation physique sur le territoire européen, d’effets collatéraux négatifs sur le débat public, sur la diffusion des « fake news » et sur l’économie des médias…

Quoi de commun, par exemple, entre des acteurs qui proposent une gratuité apparente, mécaniquement financée par la vente plus ou moins subreptice de services et de données, et d’autres qui tarifient clairement leurs produits et leurs abonnements ? Cibler de manière si globale et si fruste des acteurs économiques plutôt dissemblables ne contribue guère à la qualité du débat sur leur régulation.

L’acronyme baroque Gafam n’est-il pas dès lors le réceptacle d’une forme de ressentiment vis-à-vis de réussites devant beaucoup à un écosystème éducatif, fiscal, financier, industriel… propre aux Etats-Unis, et que les autorités nationales et européennes se désolent de ne pouvoir reproduire ?

La vindicte anti-Gafam n’est-elle pas une diversion au regard de la nécessité de politiques publiques plus volontaristes pour engager l’Europe vers les frontières actuelles de l’innovation (par exemple en matière d’intelligence artificielle), plutôt que de refaire un match déjà largement joué ? Toujours est-il que cette vindicte a ouvert la porte à des choix politiques hasardeux et d’ailleurs sanctionnés par les tribunaux…

C’est ainsi, pour cibler les Gafam, que la Commission Juncker a mobilisé la politique de concurrence en matière d’aide d’Etat, au point d’infliger une amende de 13 milliards d’euros à l’Irlande, présumée coupable d’avoir accordé des avantages fiscaux indus à Apple. Le collège bruxellois a été désavoué mi-juillet 2020 par le tribunal de l’Union européenne, qui, estimant que la Commission avait déclaré « à tort » l’existence de ces avantages, l’a invitée à ne pas outrepasser les prérogatives que lui accordent les traités communautaires…

 

 

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