Le renoncement du politique
Crise sanitaire, mouvement des « gilets jaunes », affaire Suez-Veolia, etc. Les exemples de heurts entre la République et l’Etat sont légion, constate le député (LRM) Pierre Person, qui appelle de ses vœux, dans une tribune au « Monde », à un sursaut démocratique.
Tribune.
Notre société est en proie à la défiance. Des relations individuelles jusqu’aux portes de la res publica, ce lent poison gangrène de nombreux pans de notre Etat et, au premier chef, les règles du jeu qui fondent notre démocratie, représentées par nos institutions.
L’abstention progresse à chaque élection ; les élus sont haïs, responsables de tous les maux ; le pouvoir économique est relégué ; l’intellectuel est dénigré et seule l’outrance suscite l’intérêt. Dans notre société contemporaine, le modéré est considéré tiède quand la parole radicale est considérée juste.
Nul autre quinquennat n’aura souffert avec autant de force de la déliquescence des corps sociaux. Du mouvement des « gilets jaunes » à la mobilisation contre la réforme des retraites en passant par la crise sanitaire que nous traversons avec les différents mouvements de revendications antimasque, antivaccins, anticonfinement…, les corps intermédiaires ont été évincés des cortèges tandis que les partis politiques n’ont pas su, entre toutes les revendications, les structurer et les porter aux élections. Seul le tissu associatif et les organisations non gouvernementales (ONG) auront résisté à la décomposition d’une société qui ne produit plus d’horizon commun.
Certes, la confiance ne se décrète pas. Mais pire, aujourd’hui, elle se refuse. C’est notre société qui perd foi dans sa croyance du collectif. Notre système démocratique, garant de nos institutions, n’a jamais été aussi proche de l’effondrement.
Défiance
La défiance, ce cancer de nos démocraties, se nourrit de l’opacité, des mensonges, des désaveux et des renoncements. Elle traque les décisions incompréhensibles et rend responsables de tous les maux ceux que les urnes ont mis en position de responsabilité.
Notre société perd foi dans sa croyance du collectif. Notre système démocratique, garant de nos institutions, n’a jamais été aussi proche de l’effondrement
Ma génération, née au crépuscule des années 1980, n’a jamais connu autre chose que cette défiance qui progresse contre la politique, mot devenu honteux, et ceux qui l’exercent, ontologiquement corrompus et coupés des réalités.
Loin des années 1960-1970 et d’une société profondément politique, notre époque marque la défaite du politique. Elle marque la défaite du débat qui se joue désormais en dehors des instances démocratiques ; la défaite des représentants élus au profit de dirigeants et de hauts fonctionnaires non élus ; la défaite d’une jeunesse qui ne va plus voter et qui considère que sa carte électorale lui donne moins de pouvoir qu’une carte de crédit, voire que sa carte SIM.
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