Economie-Veolia/Suez : un projet catastrophique
Le projet de regroupement entre Veolia et Suez mené au rythme de cavalerie par le président de Veolia risque de se révéler comme une véritable catastrophe pour chacune des sociétés. Première observation générale, les grandes fusions de très grands groupes réussissent rarement, de l’ordre de 70 à 80 % sont voués à l’échec. Dans le cas particulier, Veolia et Suez occupent le hit-parade mondial avec respectivement la première et la seconde place. Même s’il faut observer que le marché mondial est très éclaté puisque les deux sociétés détiennent environ 5 % du marché mondial. L’argument central avancé par Veolia est une illusion car il n’y a aucune menace chinoise actuellement contrairement aux affirmations du président de Veolia.
Deuxièmement chacune des sociétés se trouve souvent en concurrence dans les appels d’offres au niveau international. Le regroupement nécessairement va faire émerger d’autres concurrents dans ces appels d’offres. Le pire peut être, c’est qu’on va confier l’activité eau de Suez à un fonds d’investissement dont l’objet n’est évidemment pas de développer des technologies ou d’investir mais de faire des profits immédiats. En outre il y a des synergies évidentes entre la production d’eau , le traitement des déchets et autres eaux usées. En fait, c’est un peu un concours de circonstances fort discutable qui a amené à la vente précipitée des actions que détenait Engie dans Suez.
Engie a effectivement besoin de recentrer sérieusement sa stratégie car sa gestion laisse à désirer. Pour masquer cela la direction d’énergie a récupéré 2 milliards de la vente. Pourquoi une telle précipitation notamment du président d’Engie ? Tout simplement parce qu’il entend asseoir son autorité sur Engie avant la venue de la nouvelle directrice générale . Le problème du président d’Engie, c’est de considérer son entreprise comme sa société propre. Une attitude souvent rencontrée chez ses anciens fonctionnaires qui se convertissent aux délices du libéralisme mais sans engager évidemment leur propre fortune. Ils peuvent ainsi jouer au mécano capitaliste sans grand risque.
Du côté des pouvoirs publics, il y a une grande incompétence en même temps qu’une grande hypocrisie. L’État est largement dominant chez Engie et pouvait très bien bloquer la vente dans Suez. Ou alors exiger la démission du président. Cette position dominante du regroupement de Suez et de Veolia va constituer un énorme handicap pour les deux sociétés. Elles vont perdre inévitablement des parts de marché à l’international alors que souvent elles se trouvaient en concurrence et que l’une ou l’autre des entreprises était souvent choisie. Du côté des collectivités locales, on s’attend évidemment à ce qu’on profite de la fusion pour augmenter encore le prix des prestations. Des prix complètement incompréhensibles car les collectivités locales sont souvent bien incapables commercialement et techniquement de discuter des contrats.
Sauf accord qui paraît aujourd’hui peu vraisemblable à court et moyen terme, Veolia et Suez vont s’engager dans des procédures juridiques particulièrement complexes qui risquent de durer pendant des mois voire des années. Du coup, cette situation va générer des interrogations chez les clients que sont les collectivités locales en France comme ailleurs; mais aussi chez les actionnaires.
Cette opération d’OPA pourrait coûter une dizaine de milliards à Veolia, un investissement dont la rentabilité n’est pas assurée du faît des complications juridiques qui risquent d’imposer la vente par appartements en raison des règles de concurrence. Bref pas vraiment regroupement mais plutôt un éclatement. Ce ne serait pas la première fois qu’une fusion de deux grands groupes internationaux se traduit par un fiasco économique, financier et social. Enfin concernant le maintien de l’emploi, les déclarations du président de Veolia constituent des promesses de coiffeur qu’on a l’habitude d’entendre. Ce sont 3000 emplois qui sont en jeu en France. Les cours des actions des deux sociétés risquent par ailleurs d’être bousculés au cours de ces prochains mois.
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