Etats -Unis: un climat de plus en plus délétère
A quelques semaines du scrutin présidentiel aux Etats-Unis, l’historien Bruno Cabanes et le professeur de littérature Benjamin Hoffmann, tous deux Français et enseignants dans l’Ohio, s’alarment, dans une tribune au « Monde », des divisions, prémices de la « guerre civile », qui se sont accrues dans le pays.
Connaissez-vous Columbus ? Cette ville de 900 000 habitants, la quatorzième des Etats-Unis avant San Francisco, est la capitale de l’Etat de l’Ohio. En France, elle viendrait entre Paris et Marseille. Nous y vivons depuis le milieu des années 2010, durant lesquelles nous l’avons vue s’épanouir. Contrairement à d’autres agglomérations du Midwest, figées dans cette « ceinture de la rouille » qui s’étend de l’Etat de New York au Wisconsin, Columbus prospère, s’agrandit.
On s’y installe pour travailler dans les assurances, la recherche médicale ou la mode, dans les nouvelles technologies ou pour notre université, The Ohio State University, l’une des plus vastes institutions académiques du pays. Avec ses 60 000 étudiants, sa dotation de 5 milliards de dollars (4,2 milliards d’euros) et sa célèbre équipe de football américain, le campus fait la fierté de l’Ohio.
Nombreux sont ceux qui y envoient leurs enfants étudier après eux, même s’il se murmure qu’elle deviendrait l’un de ces bastions de gauche qui endoctrinent la jeunesse. En 2016, les habitants de l’agglomération votaient à près de 60 % pour Hillary Clinton ; avec 51,3 % des voix, Donald Trump remportait l’Ohio. Quatre ans plus tard, il y règne comme un parfum de guerre civile.
Prenez Bexley, cette banlieue aisée à deux pas de Columbus. Rares sont les habitants qui se disent partisans de Donald Trump. Face aux maisons, pourtant, des panneaux en l’honneur de la police locale sont apparus au moment même où le meurtre de George Floyd déclenchait une dénonciation collective du racisme « systémique » des forces de l’ordre.
C’est aussi à Bexley que réside la Dre Amy Acton, qui joua un rôle de conseillère auprès du gouverneur Mike DeWine, au début de l’épidémie de Covid-19, en défendant la fermeture temporaire des restaurants et des bars. Harcelée par des manifestations devant son domicile et des menaces contre sa famille, elle a été contrainte de démissionner, en juin, après que des milices armées de fusils automatiques eurent convergé vers l’Ohio Statehouse. D’autres pancartes ont alors célébré le « Dr Amy Acton Fan Club ».
A Hilliard, située entre Columbus et les vastes champs qui courent à l’ouest, les opinions sont déjà moins homogènes. C’est l’un de ces espaces suburbains que les républicains disputent à leurs adversaires en les accusant de vouloir y introduire davantage de mixité ethnique et sociale. En se toisant, les noms Trump et Biden mettent à mal l’utopie d’un habitat apaisé à l’écart de la métropole.
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