« L’erreur stratégique de la Chine »
La pandémie a révélé les limites internes du régime chinois. Dans le combat pour le leadership mondial, ce sera peut-être l’Europe et les valeurs humanistes qui l’emporteront, affirment, dans une tribune au « Monde », les experts en géopolitique Walter Lohman et Valérie Niquet.
Tribune.
La fin de l’Occident et de son modèle libéral semblait une évidence dominant les débats sur l’avenir du système planétaire. En dépit de son ralentissement, la croissance chinoise demeurait forte, masquant les lacunes du régime, dont des inégalités abyssales entre les privilégiés, souvent membres du Parti communiste (PCC) au pouvoir, et les laissés-pour-compte. Le modèle chinois et ses « nouvelles routes de la soie » semblaient devoir s’imposer inéluctablement, jouant de capacités d’investissements en apparence illimitées.
Idéologiquement, la stratégie « America First » de Donald Trump, ses critiques contre les alliés les plus proches des Etats-Unis, de l’Europe à l’Asie, donnaient du crédit à ceux qui, plaçant sur le même plan les ingérences américaines et une menace chinoise en apparence très lointaine, ne voyaient dans la guerre commerciale avec Pékin que la manifestation d’une rivalité pour dominer le monde.
La crise du Covid-19 impose toutefois de remettre en cause cette analyse. Le basculement du monde vers l’Asie, avec la Chine au centre, n’aura pas lieu.
Cette pandémie apparue en République populaire de Chine pour des raisons liées à la nature même du système a révélé les limites internes du régime, incompatibles avec son statut de deuxième puissance mondiale. La corruption, l’absence de transparence et de système légal sont rendues plus délétères encore par la place ultra-dominante que la Chine a prise dans les échanges mondiaux.
Mais la pandémie a aussi révélé les faiblesses externes d’un système totalement focalisé sur l’objectif étroit de maintien au pouvoir du PCC par n’importe quel moyen, dont le repli idéologique et l’hypernationalisme.
Alors que la crise faisait rage, on a vu Pékin se lancer dans une course aventuriste aux provocations les plus contre-productives, de la frontière indienne à la mer de Chine, de Hongkong au Xinjiang. Les « loups combattants » de la diplomatie chinoise ont multiplié les déclarations agressives, ruinant l’image positive de la Chine auprès de ses plus fidèles soutiens. L’Union européenne, pourtant traditionnellement prudente, a multiplié les déclarations de méfiance à l’égard d’un régime au comportement incompréhensible.
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