Liban: la mascarade politique

Liban: la mascarade politique

Bouleversé par la violence sidérante de l’explosion qui a ravagé Beyrouth, le metteur en scène, né au Liban, met en cause dans une tribune au « Monde », une classe dirigeante « qui ne dirige que ses propres intérêts et les intérêts de ceux qui l’ont placée à la tête du pays ».

Tribune. Une monstruosité est une tragédie dont on n’a pas trouvé de mots pour la raconter. On ne trouvera pas de sitôt les mots pour dire celle qui vient de dévaster les Libanais. Cette déflagration restera la monstruosité de ce pays. Et le hangar numéro 12 du 4 août 2020 est l’écho de l’autobus du 13 avril 1975 [l’attaque dans la banlieue de Beyrouth d’un autocar de militants palestiniens par les phalangistes chrétiens, faisant 27 morts, en représailles du meurtre d’un ou  selon les versions – de plusieurs chrétiens quelques heures plus tôt, est considérée comme le début de la guerre civile libanaise, qui durera jusqu’en 1990].

Entre ces deux dates, le courage d’un peuple affrontant mille épreuves, mille faillites, mille misères, mille et mille disparitions, quatre cent mille morts et des millions d’exilés, en butte aujourd’hui à un pouvoir constitué pour beaucoup des assassins d’hier et de voleurs. Nous pouvons dire que, tout comme elle a commencé, la guerre civile vient de s’achever : monstrueusement. Elle s’est achevée en une seconde de violence sidérante.

Une explosion si assourdissante que ce qui a explosé ce mardi 4 août n’est pas seulement un stock de 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium, mais aussi toute la colère contenue dans le cœur de 15 millions de Libanais, (4 au pays, 11 à l’extérieur) une colère à ce point refoulée, si condensée, si pressurisée, que plus rien ne pouvait plus la contenir. Plus aucune crainte, plus aucune inquiétude, plus aucune peur, rien n’était assez grand, aucune frayeur, ni de l’avenir ni du présent, tant l’avenir s’est fané et le présent est devenu un fardeau. Et quant au passé, il n’est que douleur et honte, honte, honte et honte encore.

L’indignation exprimée par la classe dirigeante est une insulte, un scandale

Voilà pourquoi l’indignation exprimée par la classe dirigeante est une insulte, un scandale. Et à cet étrange président de la République qui s’étonne, se demandant comment 2 750 tonnes de nitrate d’ammonium ont pu être laissées en déshérence pendant une période aussi longue et à un emplacement aussi sensible, on aurait envie de demander si la présence de quatre décennies de colère laissée en déshérence et à un emplacement aussi sensible que le cœur des Libanais ne soulève pas tout autant son étonnement et son indignation.

 

A cette classe dirigeante, qui ne dirige que ses propres intérêts et les intérêts de ceux qui l’ont placée à la tête du pays, nous aimerions demander si la violence de cette détonation, entendue paraît-il à Chypre, est enfin assez forte pour qu’elle parvienne à sa conscience ? Ces politiques font-ils seulement le lien ? Font-ils le lien entre cette explosion et la jeunesse de ce pays, descendue des mois durant pour exiger liberté et justice, faire entendre désir de vivre et manque d’espoir, cette jeunesse que l’on a menacée, méprisée, et à qui on a fini par envoyer les forces de l’ordre ?

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