« Contre l’idéologie du libre-échange absolu » (Thomas Piketty )
Dans sa chronique au « Monde », l’économiste propose un modèle de développement coopératif fondé sur la justice économique et climatique
Chronique.
Peut-on redonner un sens positif à l’internationalisme ? Oui, mais à condition de tourner le dos à l’idéologie du libre-échange absolu qui a jusqu’ici guidé la mondialisation, et d’adopter un nouveau modèle de développement fondé sur des principes explicites de justice économique et climatique. Ce modèle doit être internationaliste dans ses objectifs ultimes mais souverainiste dans ses modalités pratiques, au sens où chaque pays, chaque communauté politique doit pouvoir fixer des conditions à la poursuite des échanges avec le reste du monde, sans attendre l’accord unanime de ses partenaires. La tâche ne sera pas simple, et ce souverainisme à vocation universaliste ne sera pas toujours facile à distinguer du souverainisme de type nationaliste. Il est d’autant plus urgent de préciser les différences.
Supposons qu’un pays, ou une majorité politique en son sein, juge souhaitable de mettre en place un impôt fortement progressif sur les hauts revenus et patrimoines afin d’opérer une redistribution importante en faveur des plus modestes, tout en finançant un programme d’investissement social, éducatif et écologique. Pour aller dans cette direction, ce pays envisage un prélèvement à la source sur les profits des entreprises, et surtout un système de cadastre financier permettant de connaître les détenteurs ultimes des actions et des dividendes et d’appliquer ainsi les taux souhaités au niveau individuel. Le tout pourrait être complété par une carte carbone individuelle permettant d’encourager les comportements responsables, tout en imposant lourdement les plus fortes émissions, ainsi que ceux qui bénéficient des profits des entreprises les plus polluantes, ce qui exige, là encore, de connaître leurs détenteurs.
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