Dominique Meda : « Rebâtir une économie sans passer par la case chômage » (Dominique Méda )
Comment passer de La convention citoyenne aux travaux pratiques s’interroge dans le Monde la sociologue Dominique Méda
Le 14 juin dernier, le Président de la République annonçait solennellement : « Il nous faut aussi créer les emplois de demain par la reconstruction écologique qui réconcilie production et climat », promettant de détailler au début du mois de juillet le nouveau chemin proposé. Entre-temps, les 150 citoyens réunis dans la convention citoyenne pour le climat ont rendu leurs propositions, qui sont autant de précieuses balises. Rédigées dans un langage extrêmement clair, passées au tamis des expériences personnelles de chaque citoyen, et issues d’un savant dosage entre apports des experts et délibérations collectives (l’alchimie en sera analysée par la trentaine de chercheurs observateurs de la convention – dont je fais partie), ces mesures donnent en effet les clés d’une transition écologique concrète combinant relance verte et nouvelles pratiques de sobriété.
Certes, des milliards ont déjà été versés ou programmés pour soutenir notre économie frappée de plein fouet par la crise liée au Covid-19, certes il est urgent de soutenir les entreprises et les emplois qui risquent de disparaître massivement, mais nous ne devons pas pour autant le faire de façon aveugle, comme l’a rappelé notamment le Haut Conseil pour le climat. Ce dernier a en effet publié un rapport spécial au mois d’avril, destiné à rappeler que la crise sanitaire est sans doute une crise endogène – c’est-à-dire provoquée non pas par la colère des dieux, mais par la démesure des humains – et à conjurer le gouvernement de ne pas recommencer les mêmes erreurs qu’en 2008, c’est-à-dire de ne pas s’engager dans une relance « brune », qui aggraverait la situation climatique, mais au contraire dans une relance verte, qui nous permettrait d’engranger de nombreux bénéfices, notamment en termes de santé.Parmi les mesures proposées par la convention citoyenne pour le climat, nombreuses sont en effet celles qui auront une action déterminante en matière de santé : développer les autres modes de transport que la voiture individuelle, interdire les centres-villes aux véhicules les plus émetteurs de gaz à effet de serre, réduire la circulation des poids lourds devrait permettre de diminuer drastiquement la pollution de l’air, qui fait chaque année 48 000 morts, c’est-à-dire plus que le Covid ; mais également lutter contre la malbouffe, et donc s’attaquer résolument à ses comorbidités (obésité, diabète, hypertension…) dont on a constaté le caractère fatal pendant la crise sanitaire. On dispose donc bien d’un ensemble d’outils permettant de renforcer la résilience de la société et de satisfaire les aspirations prioritaires de nos concitoyens.
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