Coronavirus : 85 000 à 200 000 morts en France ?
D’après une modélisation effectuée par Public Health Expertise, société française spécialisée dans la modélisation des maladies, et une équipe d’épidémiologistes de l’AP-HP et de Columbia University spécialisée sur le Covid-19, le nombre de décès pourrait atteindre jusqu’à 85 000 ( avec des masques suffisants).
Basé sur la génération de modèles la plus évoluée, le document étudie l’impact d’un déconfinement progressif à partir du 11 mai, en prenant en compte le taux d’immunisation collective évalué par l’Institut Pasteur (5,7 %) et la capacité augmentée de lits de réanimation en France (14 000 dont 12 675 dédiés au Covid). Il fournit trois indications essentielles.
Premièrement, prolonger encore le confinement général, même avec une politique de testing efficace, n’apporterait pas de bénéfice sanitaire. Que l’on sorte le 11 mai ou en juillet, les courbes finissent par se rejoindre : les services de réanimation arrivent à saturation et, sans politique forte de gestes barrières, le bilan total pourrait atteindre 200 000 morts. Ce n’est pas ce qu’a choisi le Premier ministre, qui a rappelé mardi que « le respect des mesures de distanciation sociale prendra encore plus d’importance ».
. Deuxièmement, le masque est un outil efficace. Si la population en est dépourvue, la mortalité pourrait toucher à terme 165 000 personnes, même avec les gestes barrières. Avec des masques, le bilan tombe à 85 000 morts. Toutefois, le modèle de l’AP-HP prédit que les services de réanimation arriveraient là encore à saturation, malgré la stratégie « masques, tests, distanciation physique ». Ce triptyque serait donc efficace, mais insuffisant à empêcher une deuxième vague épidémique.
Le troisième scénario aborde le cœur du problème. En isolant les plus vulnérables, c’est-à-dire les quelque 17 millions de seniors et de personnes atteintes d’un handicap ou d’une maladie chronique, la courbe s’aplatit et la saturation hospitalière est évitée. Pour éviter que le nombre de morts dépasse les 30 000, il faudrait protéger toutes ces personnes vulnérables durant 38 semaines… jusqu’au 8 février 2021 ! Mais si les autorités se contentaient de protéger 75 % des plus fragiles (ce qui représenterait tout de même 12 millions de personnes), la France pourrait traverser la crise sanitaire sans saturer ses hôpitaux. Les épidémiologistes concluent : « La protection des personnes vulnérables est la clé pour préserver le système de santé et éviter un reconfinement. »
« Le problème, c’est que cela a été écarté alors que c’est la meilleure des choses à faire, commente Martin Blachier, médecin spécialiste en santé publique et dirigeant de Public Health Expertise. En Allemagne, l’épidémie repart. En Corée, les gens vivent en pseudo-confinement, à deux mètres les uns des autres. En Suède, les médecins ont regretté de n’avoir pas isolé les seniors. Tout montre que la distanciation physique et la protection des publics fragiles sont capitales. Mais la décision de différencier la population est très politique. »
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