Coronavirus : “liberté” ou “responsabilité”
Trois spécialistes en épidémiologie de l’université de Toulouse, associée à l’Inserm, présentent dans une tribune au « Monde » un éclairage éthique sur le traçage numérique de la propagation du Covid-19, entre intérêt public et libertés individuelles.
Tribune. L’hypothèse d’avoir recours à une application smartphone (par exemple StopCovid) pour combattre la propagation du Covid-19 en traçant les citoyens contaminés par le virus commence de plus en plus à faire son chemin, voire à se confirmer au sein du gouvernement. Cette méthode de traçage numérique aurait pour objectif de rendre la recherche et la notification des contacts instantanées dès la confirmation du cas par le propriétaire du téléphone portable.
En conservant un enregistrement temporaire des événements de proximité entre individus, le dispositif pourrait immédiatement alerter sur les interactions et contacts étroits récents avec des cas diagnostiqués et inciter les personnes alertées à s’isoler et à se faire tester. L’enjeu serait donc de suivre en temps réel l’évolution de la pandémie en retraçant le parcours des personnes infectées afin de repérer les populations susceptibles d’avoir été exposées au virus et de proposer des actions de santé publique adéquates en vue d’un déconfinement progressif.
Dès lors, ce traçage numérique fait débat et inquiète en France du fait qu’un tel processus ne s’intègre pas vraiment dans notre culture démocratique occidentale et porterait fortement atteinte aux libertés fondamentales. Dans les conditions actuelles de crise d’urgence sanitaire, ces libertés peuvent être légitimement réduites au nom de l’intérêt général et à la seule condition que les mesures soient proportionnelles et démocratiquement édictées.
Le respect des règles juridiques et de la loi Informatique et libertés sont quotidiennement réaffirmés par nos instances. Notamment, la présidente de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) vient de rappeler que des solutions de traçage numérique seraient acceptables si, et seulement si, elles étaient respectueuses des droits fondamentaux (consentement éclairé, volontariat), mais que la loi devrait être modifiée dans les cas non actuellement couverts.
Il n’en reste pas moins que de nombreux enjeux éthiques restent associés à cette pratique. Ces risques éthiques concernent en premier lieu la totale garantie du respect de la vie privée et de la confidentialité des informations relatives au citoyen (aspect intrusif), puis la protection et la sécurité relatives à ses données personnelles.
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