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«Municipales 2020: un scrutin infecté qu’il faut annuler

«Municipales 2020: un scrutin infecté  qu’il faut annuler

Il faut annuler le premier tour des élections municipales selon un collectif de juristes et d’avocats qui s’expriment dans une tribune de l’OPINION.

 

 

« L’annulation totale du premier tour des élections municipales serait, au nom de la démocratie représentative, la plus belle des réponses de notre société et la plus responsable face aux crises à venir. La démocratie ne peut réellement exister que si l’élection est entourée de toutes les garanties nécessaires. Reporter le second tour est une bonne chose. Mais ne nous satisfaisons pas d’une demi-mesure !

La raison du maintien du vote est politique

Une semaine avant le premier tour, la droite appelait le Président à prendre la mesure de l’enjeu du scrutin. « Emmanuel Macron ne pourra pas enjamber le résultat des municipales », tonnait Gérard Larcher dans les colonnes du Figaro. Le président du Sénat croyait alors rappeler l’évidence : les élections rythment la vie démocratique, impossible d’y échapper.

La semaine suivante, la totalité des Italiens sont renvoyés chez eux jusqu’à nouvel ordre. La France ferme tous les lieux publics non-indispensables à la vie du pays. Le coronavirus désintègre les certitudes. La veille du scrutin, six présidentes et présidents de région appellent au report des élections. Ce qui semblait immuable commence à s’effriter. Et pour achever le tout, quatre jours après l’élection, Olivier Faure, premier secrétaire du Parti socialiste, affirmait « n’avoir jamais été consulté pour le maintien du premier tour ».

Il n’y avait pas plus de consensus que dans un dîner de famille à Noël. Les propos de l’ancienne ministre des Solidarités et de la santé Agnès Buzyn renforcent cette métaphore : « Quand j’ai quitté le ministère, je pleurais parce que je savais que la vague du tsunami était devant nous. Je suis partie en sachant que les élections n’auraient pas lieu. » Au-delà de la zizanie, le constitutionnaliste Dominique Rousseau nous éclaire. Selon lui, « la raison du maintien du premier tour des municipales est purement politique ».

« Le coronavirus supprime le principe d’égalité des conditions de vote, inscrit dans le code électoral »

S’asseoir sur la sincérité du vote, c’est s’asseoir sur la démocratie

Outre ce contexte de fléchettes politiques, devons-nous rappeler qu’il en va de sauver des vies, de protéger les plus fragiles ? Alors que l’heure était au confinement, comment avons-nous pu, dans notre démocratie, laisser se tenir ce scrutin qui doit rassembler le plus de citoyennes et de citoyens ? Comment pouvions-nous penser que ce scrutin se déroulerait dans les meilleures conditions, alors que nous « sommes en guerre » ?

L’abstention record en a été le juge. Nice : 71,4 %, Marseille : 67,45 %, Montpellier : 66,6 %. Et cela pose de nombreux problèmes pour la suite. Les notions d’égalité et de liberté forment avec le secret du vote, ce qu’on appelle en droit la sincérité du scrutin. Pour le Conseil Constitutionnel, ces principes sont « si importants qu’ils font l’objet, dans la plupart des démocraties respectueuses de l’Etat de droit d’une consécration constitutionnelle ».

Autrement dit, s’asseoir sur la sincérité du vote, c’est s’asseoir sur la constitution et donc avec elle, la démocratie. Premièrement, le coronavirus supprime le principe d’égalité des conditions de vote, inscrit dans le code électoral. En se rendant dans leurs bureaux de votes, les plus fragiles et vulnérables s’exposaient à un risque sanitaire accru comparé aux autres.

Deuxièmement, le principe de liberté du vote, fondé sur la libre expression éclairée de l’opinion du peuple, semble également fortement détérioré par la pandémie. C’est en tout cas qu’a révélé un sondage Ifop pour Charles.co du 6 mars dernier. A la question : « Est-ce que les risques de transmission du coronavirus peuvent vous inciter à ne pas vous rendre dans un bureau de vote pour voter aux prochaines élections municipales ? », 16 % des sondés ont répondu « oui, certainement », et 12 % « oui, probablement ». Dès lors, 28 % « des électeurs sont susceptibles de ne pas se rendre à leur bureau de vote par crainte des risques de contamination ».

Enfin, le principe de sincérité du scrutin impose également que les deux tours soient connectés. Emmanuel Macron a annoncé lundi 16 mars le report du second tour des élections municipales. Or, dissocier les deux tours est contraire à l’esprit de ce scrutin de proximité. Didier Maus, spécialiste des questions de droit constitutionnel, nous l’expliquait simplement : « L’élection municipale est indissociable, elle forme un tout. »

Mieux vaut prévenir que guérir

Ce que cette mascarade révèle, c’est l’impréparation de notre société à garantir les moyens de notre démocratie en cas de crise. L’adage commun n’aurait-il pas été plus précieux que des jeux politiciens : mieux vaut prévenir que guérir. Maintenir la sincérité du scrutin est essentiel pour ne pas nourrir la défiance démocratique et l’atmosphère d’illégitimité de nos représentants et représentantes. Cette sincérité se mesure de manière collective à travers le corps électoral. En effet, plus le corps de suffrages exprimés diminue, plus la représentativité des élus se réduit. Ainsi, la forte abstention affaiblit les fondements mêmes de notre démocratie représentative. Une crise qui se retrouve dans la profondeur du corps républicain, dans les abîmes de son fonctionnement.

Par Joakim Le Menestrel, étudiant à Paris Dauphine et Sciences Po Grenoble, Mourad Zouine, avocate au barreau de Lyon, Edouard Raffin, avocat au barreau de Lyon et enseignant à l’Université Lyon 3, Sarah Just, avocate au barreau de Lyon, Sofia Soula Michal, avocate au barreau de Lyon et Damien Brahimi, avocat au barreau de Grenoble. »

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