Un scrutin municipal malade
LeCoronavirus d’une certaine manière à provoquer une maladie du scrutin municipal qui s’est manifesté par une abstention record Pour Céline Braconnier, politiste et spécialiste de l’abstention, si le contexte sanitaire est à l’origine de la faible participation au premier tour des municipales du 15 mars, il a amplifié l’effet des déterminismes sociodémographiques sur le vote.(Tribune dans le monde)
Tribune. Jusqu’au 15 mars 2020, les municipales avaient plutôt bien résisté à la démobilisation qui affecte nombre de scrutins depuis deux décennies : moins 4 points de participation en quinze ans, à comparer à la chute de 15 points pour les législatives au cours de la même période. On connaît depuis longtemps l’existence d’un important écart de participation entre les seniors, dont la constance électorale est avérée, et les plus jeunes, dont la mobilisation peut être jusqu’à 40 points inférieure.
L’écart de participation est traditionnellement aussi fort, pour ces élections, entre les communes de moins de 1 000 habitants et les villes de plus de 10 000 habitants, les premières enregistrant en moyenne une participation presque deux fois supérieure aux secondes depuis les années 2000. L’incitation communautaire au vote dans des environnements ruraux où il est difficile de dissimuler son abstention, tout comme la plus forte personnification de l’élection, font partie des facteurs explicatifs de cette situation.
En outre, les municipales n’échappent pas aux distorsions que les déterminants sociaux imposent : on y participe d’autant plus qu’on est politisé, diplômé, stable dans son travail, aisé financièrement, propriétaire, en couple.
Il y a encore une semaine, rien ne laissait penser que la participation aux municipales de 2020 pourrait obéir à d’autres logiques. Les sondages publiés avant le vote ne laissaient imaginer aucun bouleversement et la confiance des Français envers leurs élus préférés continuait de s’énoncer dans les enquêtes, laissant présager que l’expression des colères contre la réforme des retraites ou l’activation du 49.3 n’auraient pas d’autres répercussions que le mauvais score annoncé des candidats du parti majoritaire à cette élection qui devait rester cadrée par les enjeux locaux.
Contradictions
Les annonces successives du président de la République puis du premier ministre à la veille du scrutin, révélant publiquement l’aggravation de la situation sanitaire, ont changé la donne. Si les deux discours auraient dû se prolonger dans une annonce du report de la consultation électorale, la préservation de la continuité démocratique immédiate a prévalu sur l’impératif de santé publique. Tout en appelant au respect des consignes de prudence, notamment à destination des personnes âgées les plus exposées, le président comme le premier ministre les ont explicitement encouragées à accomplir, comme les autres, leur devoir civique.
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