« Coronavirus: l’hystérie économique » ( Frédéric Gonand)
Frédéric Gonand est professeur d’économie à l’Université Paris-Dauphine décrypte l’hystérie qui affecte actuellement la sphère économique dans un papier de l’Opinion
« L’effet économique direct du coronavirus en France était très limité. Avec la réaction hystérique des pouvoirs publics occidentaux, ses implications macroéconomiques vont être sensibles, et peut-être massives.
Sur l’effet économique direct : si l’on en croit les statistiques fournies par les pouvoirs publics, elle concerne un phénomène qui a coûté la vie à ce jour à 61 personnes (souvent déjà affaiblies par la maladie), soit environ 0,00009 % de la population, et contaminé 2 876 personnes, soit 0,00429 % de la population – tout cela en deux mois. Par conséquent, l’effet économique direct de l’épidémie aurait surtout transité par le ralentissement de l’activité chinoise et ses implications pour nos entreprises. Au total, l’effet direct aurait pu être contenu à 0,1 % du PIB, peu ou prou, dans notre pays.
En Chine, il sera plus important car le pouvoir en place a tiré profit de l’épidémie pour renforcer singulièrement les pouvoirs du Parti grâce à des mesures très fermes. L’activité commence déjà à redémarrer dans l’Empire du Milieu.
On pense à Philippe Seguin qui enseignait sagement qu’un vote unanime et émotionnel cache souvent mal une grosse erreur
Imprévisibilité. Las, les pouvoirs publics européens se sont lancés en mars 2020 dans une course à l’échalote autoentretenue particulièrement mortifère pour l’économie. Déficits publics illimités (les générations futures, qui rembourseront, vont encore apprécier), marchés financiers déstabilisés (alors qu’ils étaient déjà fragilisés), anticipations d’activité saccagées par tant d’incertitudes et d’imprévisibilité (y compris du côté de la Fed)… et désormais vie quotidienne des Français, jeunes et moins jeunes, désorientée : tout cela pour une maladie dont vous auriez peine à trouver des personnes atteintes dans votre entourage au cours des deux derniers mois. La situation est un cas d’école de phénomène irrationnel autoentretenu, une vraie montée aux extrêmes.
La disproportion entre le choc initial et la caisse de résonance à peine croyable que lui ont offerte les politiques économiques interroge. Elle est en tout cas bien en phase avec la littérature macroéconomique des années 2010 qui a beaucoup étudié l’influence sur la croissance des phénomènes informationnels. Elle reflète sans doute la pression qu’exerce un pays sur ses voisins lorsqu’il prend des mesures massives. Elle n’en demeure pas moins massivement anxiogène pour la population. La pression majoritaire fait taire toute voix se risquant à prendre le parti de souligner le hiatus pourtant très apparent.
L’on n’ose pas croire que les chiffres publics soient erronés. Et l’on pense donc à Philippe Seguin qui enseignait sagement qu’un vote unanime et émotionnel cache souvent mal une grosse erreur. Il est à craindre que telle soit aujourd’hui la situation : celle, dans le contexte d’une réforme des retraites devenue comme un coq sans tête, d’une nouvelle erreur d’appréciation et de pilotage, dont le coût économique apparaît bientôt comme considérable et surtout sans rapport étroit avec le choc sanitaire initial. »
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