« Afrique : la corruption responsable du surendettement»
Face à une dette qui a pratiquement doublé en 10 ans pour atteindre maintenant 7000 milliards d’euros dans les pays pauvres notamment d’Afrique, Uzziel Ndagijimana, ministre rwandais de la planification économique et des finances pointe la corruption comme un des responsables de l’endettement. Il signale notamment que la fuite illégale de capitaux est même supérieure à l’aide au développement.. (Interview dans le Monde)
Les pays à bas revenus sont-ils menacés par une crise de la dette ?
Les pays à faibles revenus n’ont plus les ressources pour financer le développement ; la dette sert maintenant à rembourser la dette. Son poids s’est alourdi avec la chute du prix des matières premières et la baisse de la croissance en Afrique. Les dons et l’aide publique au développement ont diminué, alors que nos besoins en financement augmentent pour construire des infrastructures, nous adapter au réchauffement climatique et atteindre les objectifs de développement durable. Les prêts à taux préférentiels délivrés par les banques multilatérales comme la Banque mondiale ou la Banque africaine de développement sont insuffisants. Les pays doivent donc chercher des financements ailleurs, sur les marchés financiers.
Les pays à bas revenus profitent-ils d’une baisse des taux d’intérêts sur les marchés européens et américains ?
C’est la question que je me pose moi-même, car l’argent qu’on emprunte via ces obligations ne va pas forcément dans les secteurs où on en a le plus besoin, comme l’éducation ou la santé. Ces obligations ne peuvent financer que des projets qui ont un rendement élevé à court ou moyen terme. Dans le cas du Rwanda, nous avons émis en 2013 des obligations libellées en devises étrangères pour construire un centre de congrès et développer le secteur du tourisme. Nous ne pourrions pas en faire usage dans le domaine de l’éducation ou de la santé, par exemple. Et malgré la baisse des taux d’intérêts sur les marchés européens et américains, les obligations libellées en devises étrangères nous coûtent cher.
La dette ne peut être transparente que si elle est contractée auprès des marchés financiers ou des bailleurs de fonds internationaux. Lorsqu’elle est négociée en bilatéral, de pays à pays, il est difficile de dévoiler les conditions de l’emprunt. Ce qui importe surtout dans la gestion de la dette, c’est la visibilité à long terme ; et nous devons surtout surveiller le risque de dette cachée.
Le moyen le plus efficace, c’est d’attirer les investissements étrangers. Et il faut pour cela améliorer la gouvernance, faciliter les démarches des entreprises, simplifier l’acquisition des terres, améliorer la transparence, raccourcir les procédures. Et si les investissements augmentent, alors les recettes fiscales aussi, et le poids de la dette diminuera.
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