« Le discours sur les métropoles comme locomotives du pays ne passe plus » (Pierre Veltz, géographe)
La mode de la métropolisation risque d’aboutir à un aménagement du territoire composé d’un côté d’une dizaine de villes de plus d’un million d’habitants concentrant une majorité d’emplois et de l’autre des zones en voie de régression voire de désertification. Un non-sens non seulement économique et social mais aussi environnementale et sociétal. En effet l’hyper concentration qui génère effectivement une croissance endogène provoque aussi des dégâts humains et environnementaux catastrophiques. Le géographe Pierre Veltz explique que la mode de la métropolisation est remise cause (tribune du« Monde) extraits
« En France comme ailleurs, la mondialisation a puissamment renforcé les emplois et les revenus des métropoles. Même si l’indicateur pose problème, on peut estimer que la moitié environ du PIB est produite dans les dix premières villes du pays (un tiers pour la seule région parisienne). Le réseau formé par cette grappe urbaine, fortement intégrée par le TGV, est un atout majeur pour la France. Elle permet en effet de bénéficier des effets d’agglomération urbains tout en limitant les effets de congestion.
Cette concentration soulève aussi de graves difficultés, illustrées par le mouvement des « gilets jaunes ». Une grande partie de la population aux revenus modestes ou moyens est poussée vers une périurbanisation mal organisée, émiettée en d’innombrables bouts de ville sans urbanité, à l’image de la fragmentation communale, qui engendre de fortes tensions sur les modes de vie.
Les enjeux écologiques exigent de repenser les métabolismes urbains à des échelles allant bien au-delà des zones denses
Ces effets occultent le fait que les inégalités territoriales et sociales restent en France nettement plus faibles que dans les pays anglo-saxons, sans parler des pays émergents ou pauvres. Comme l’ont montré les travaux pionniers de l’économiste Laurent Davezies, la redistribution publique (essentiellement par les transferts sociaux) lisse très fortement les écarts spatiaux, créant de fait un transfert massif de ressources des métropoles vers les autres territoires. Mais l’actualité montre que ces effets d’amortissement ont atteint leurs limites. Le discours sur les métropoles comme locomotives du pays ne passe plus, pour de bonnes raisons.
Perspectives très positives
Nous devrions donc réfléchir en priorité à de nouvelles formes actives (et pas seulement passives, résultant des automatismes de l’Etat social) de développement partagé entre les cœurs métropolitains et les territoires de faible densité.
La bonne nouvelle est que les mutations en cours offrent à cet égard des perspectives très positives. Le numérique devrait faciliter au plan régional ce que le TGV permet au plan national, c’est-à-dire des formes de croissance distribuée reposant moins sur les économies d’échelle que sur les économies de réseau.
Les enjeux écologiques exigent de repenser les métabolismes urbains à des échelles allant bien au-delà des zones denses. Pour l’énergie, la biodiversité, la gestion des déchets, les métropoles doivent inclure dans leur fonctionnement, sinon dans leurs périmètres institutionnels, ces espaces naturels avoisinants. … »
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