Des énergies renouvelables pas tellement propres

Des énergies renouvelables pas tellement propres

Expliquent deux spécialistes de l’énergie dur France Info.

Tripler la production du parc éolien, quadrupler celle du solaire. Ce sont les objectifs du gouvernement pour baisser nos émissions de carbone.  Le problème c’est que pour l’instant la plupart de ses ressources renouvelables sont également polluantes « Toute activité est polluante, rien n’est vert », explique même Bernard Multon, spécialiste de la conversion des ressources renouvelables en électricité.

En état de marche, une éolienne ou un panneau photovoltaïque n’émettent pas de carbone, c’est certain. Ces deux solutions sont-elles pour autant« décarbonées » ? Ce n’est pas si simple. 

La ressource, le soleil et le vent, est renouvelable. Mais maintenant, il faut la transformer, et pour ça, il faut entre autres des métaux. Bernard Multon, enseignant-chercheur à l’Ecole normale supérieure de Rennes à franceinfo

Beaucoup de métaux, explique ce spécialiste de la conversion des ressources renouvelables en électricité.  »Pour une même puissance produite, il faut cinq fois plus de matériaux avec l’éolien, par rapport au nucléaire par exemple », avance Jacques Treiner, physicien et membre du Laboratoire interdisciplinaire des énergies de demain.

Un socle d’éolienne en béton, un mât fait de tonnes d’acier, des fils en cuivre, des panneaux solaires fabriqués à partir de silicium… Ces composants, non renouvelables, ont consommé de l’énergie pour être extraits et transformés. « Pour le silicium qu’on trouve dans les panneaux solaires, il faut couper des bouts de roche, ça coûte beaucoup d’énergie« , donne pour exemple Jacques Treiner. Les machines qui tournent pour l’extraction fonctionnent, elles, avec des combustibles fossiles.

Dès la naissance, les panneaux photovoltaïques et les éoliennes ont un lourd passif en termes de CO2.Jacques Treiner, physicien, à franceinfo

En tout, pour 1 kilowattheure produit, une éolienne émet entre 12 et 15 grammes de CO2 et un panneau photovoltaïque, 48 grammes, selon une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (document en PDF). Ce qui place ces filières en dessous du gaz (469), du pétrole (840) et du charbon (1 001) mais au-dessus – en partie – du nucléaire (16 grammes). Les éoliennes et panneaux photovoltaïques nous viennent aujourd’hui souvent d’Asie du Sud.  »La production électrique en Chine vient majoritairement du charbon. L’éolien ne représente que 4% et le solaire, 1,5% », détaille Jean-Marc Jancovici, ingénieur conseil en « énergie et climat ». La fabrication se déroule donc dans un système énergétique très émetteur de gaz à effet de serre.

« A mesure que l’on introduit plus d’énergies renouvelables dans la production électrique, la pollution indirecte s’efface », affirme Cédric Philibert dans l’Obs (article payant). Cet expert de l’Agence internationale de l’énergie insiste : « Une transition [écologique, ici] est par définition… transitoire. » Les défenseurs des énergies renouvelables l’affirment : si les structures et équipements étaient produits en France, leur bilan carbone serait bien meilleur. Mais  »on en est loin », selon Jean-Marc Jancovici. Le coût serait tout d’abord supérieur, et « en France, on n’a plus de gisement de fer, pas de charbon métallurgique, pas de cuivre… » C’est la critique la plus fréquente faite aux énergies renouvelables : elles contiennent parfois des terres rares. Il s’agit d’un groupe de métaux, présents en petite quantité sur Terre. «  « Les terres rares sont si éparpillées que le processus d’extraction est très long et complexe. Il faut utiliser beaucoup d’eau, des produits chimiques, casser la roche… Ça pollue les sols », explique-t-il. Dans le documentaire La Sale Guerre des terres rares, le réalisateur Guillaume Pitron montre justement les conséquences sur l’environnement de leur extraction en Chine, entre sols souillés, air irrespirable et maladies à répétition. « En 2006, des tonnes de produits chimiques ont été déversées dans la rivière Xiang (province du Hunan) par des entreprises de production d’indium, un métal rare qui entre dans la fabrication des panneaux solaires », détaillait par exemple le journaliste auprès de 20 Minutes. Certaines éoliennes sont aussi concernées. « Celles qui utilisent des générateurs à aimant permanent contiennent du néodyme ou du dysprosium », dépeint Bernard Multon. Pour Bernard Multon, cela ne fait aucun doute : dans la fabrication, « c’est le marché qui fait foi »« Les terres rares ne coûtent pas cher. Avant, on ne les utilisait pas, on s’y est mis parce que c’est plus rentable et plus performant. » Les deux spécialistes l’affirment : dans le photovoltaïque comme dans l’éolien, les terres rares ne sont pas indispensables.  L’énergie provenant des éoliennes ou des panneaux photovoltaïques ne peut suffire. Sinon, « vous ne pourriez appeler que quand il fait soleil, vous ne pourriez prendre l’ascenseur que quand il y a du vent », lance en riant Jean-Marc Jancovici. Ces énergies renouvelables sont en effet intermittentes : leur production d’énergie dépend de la météo. Et  »le soleil brille quand il en a envie. Le vent souffle quand il en a envie. Pas forcément quand on en a besoin », décrit Jacques Treiner, qui parle de  »fluctuations importantes ». Les énergies renouvelables ne fournissent donc pas une puissance garantie, mais plus aléatoire. Ainsi, en décembre 2016, le Danemark avait réussi à assurer 100% de sa consommation électrique grâce à son parc éolien… pendant une seule nuit. Pour compléter, « pour pallier leur manque, il faut un plan complémentaire : du fossile ou du nucléaire », explique le physicien.  Jean-Marc Jancovici cite l’exemple de l’Allemagne :  »Le pays a installé 100 gigawatts de renouvelable. Mais en parallèle, il a dû garder la même puissance de sources pilotables : centrales à charbon et à gaz, barrages, nucléaire. »

Un panneau photovoltaïque ou une éolienne sont donnés pour 20 à 30 ans. A côté de ça, un barrage dure un siècle, une centrale à charbon 40 ans. Le rythme de renouvellement des équipements n’est pas le même.Jean-Marc Jancovici, ingénieur conseil en énergie-climat à franceinfo

Mais le recyclage serait tout à fait possible.  »On ne veut pas recycler car c’est trop cher. Nous sommes dans une logique de course au moindre coût. Et ça coûte moins cher d’aller à la mine que de recycler », déplore Guillaume Pitron. D’après les spécialistes interrogés, nous savons à l’heure actuelle recycler la plupart des composants des deux filières. Mais ce n’est pas rentable. « Voilà les règles du jeu, la loi du marché. Mais il faut recycler ! », défend-il. Bon signe : une première  »unité de recyclage de panneaux photovoltaïques » a ouvert en France, à Rousset, dans les Bouches-du-Rhône, comme le rapporte le journal Les Echos.

 

 

 

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