Réforme immigration : JM Clément (LREM contre)
Jean-Michel Clément menacé d’expulsion du groupe LREM explique sur Franceinfo pourquoi il votera contre ce projet de loi.
« Alors que le projet de loi était initialement baptisé « pour une immigration maîtrisée et un droit d’asile effectif », l’expression »intégration réussie » s’est, au terme des premiers débats parlementaires, invitée dans l’intitulé de la loi.
Cette nouvelle formulation résume l’idée que l’on se fait du phénomène migratoire :
- la France serait « submergée » par une vague migratoire ;
- la France accueillerait mal ceux qui cherchent chez nous une protection ;
- la France intégrerait mal ceux qui recherchent cet ailleurs protecteur.
Nombre d’avis vont dans ce sens, comme celui, éclairé, du Conseil d’Etat qui remet en cause l’opportunité d’un nouveau texte, alors que le dernier remonte à moins de… deux ans ! Un temps bien trop court pour en mesurer les effets, les bons comme les mauvais.
Le rapport d’évaluation, que j’ai rédigé avec mon collègue Guillaume Larrivé (LR), a été présenté le jour même où le nouveau projet de loi était examiné en Conseil des ministres ! Interrogeons-nous, à cette occasion, sur la considération accordée au travail parlementaire… Au caractère prématuré s’ajoute « une absence de stratégie publique éclairée par l’exacte mesure des défis à relever », constate le Conseil d’Etat dans son avis.
Tout cela fait de ce texte un problème de police, alors qu’il s’agit d’un problème de société pour Jacques Attali, mais aussi d’humanité ou d’inhumanité pour Etienne Pinte, président du Conseil national des politiques de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale. Pour Louis Gallois, président de la Fédération des acteurs de la solidarité, c’est un texte inutile et inefficace, qui risque, en plus, aux yeux de Benjamin Stora, président du conseil d’orientation du Musée national de l’histoire de l’immigration, de stigmatiser des personnes d’origine étrangère installées en France depuis longtemps !
Contrairement à une idée trop répandue, la France n’est pas « submergée » ; le solde migratoire est le même depuis 1975. Ceux qui frappent à notre porte sont vingt fois moins nombreux qu’au Liban, dix fois moins qu’en Allemagne. Notre pays de 67 millions d’habitants pourrait parfaitement prendre sa part et l’assumer, si nous le décidions ; et si nous décidions d’allouer « le budget du non-accueil » à un traitement digne des personnes arrivant sur notre sol.
Nous allons continuer de transformer de très nombreux exilés en des personnes instables, insécurisées sur le plan juridique. Beaucoup, non expulsables, resteront trop longtemps avec des droits incomplets, sans possibilité de travailler, ni de se loger ou d’apprendre le français. Cette clandestinité nourrira les simplismes et les amalgames inhumains.
Au-delà de l’accueil dont ne traite pas ce texte, nous réduisons les droits des demandeurs d’asile en raccourcissant les délais dont ils disposent pour solliciter une protection et en écartant le caractère suspensif du recours devant la Cour nationale du droit d’asile. Sans parler du placement en centre de rétention administrative 90 jours durant, pour des individus dont nous ne sommes pas sûrs d’obtenir le laissez-passer consulaire nécessaire à leur renvoi dans leur pays d’origine. Ils resteront enfermés dans des conditions de promiscuité comparables
Intégrer, nous ne savons pas le faire non plus. Les non-nationaux en France sont inférieurs à ceux d’Espagne, d’Allemagne ou d’Angleterre… Et le nombre de naturalisations a baissé en 2017. Il faut également dire la vérité sur ce sujet.
La vérité est que nous sommes engagés dans une spirale tragique.
Qu’est-ce que la France d’aujourd’hui ? Est-elle toujours fidèle à la tradition d’accueil qui a fait son histoire et son honneur ? »
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