Catalogne : un vrai dialogue de sourds
Le moins que l’on puisse dire c’est que la Catalogne est surtout victime d’un vrai dialogue de sourds. Du côté de Madrid, on fait semblant de n’avoir pas entendu l’appel à la concertation lancée par le président de la généralité de Catalogne. On oppose les institutions et la loi a toute de perspective de discussion avec les indépendantistes. Pire, on réfute toute spécificité culturelle et politique à la région. Pour le gouvernement espagnol, rien n’est négociable alors qu’on s’ait bien que certaines revendications pourraient être traitées comme elles l’ont été pour le Pays basque. Du côté des indépendantistes (en faite seulement environ 40 % des catalans sont pour l’indépendance), on cultive la plus grande ambiguïté en appelant au dialogue mais sur la base d’une perspective d’indépendance proclamée mais aussitôt suspendue. L’Europe elle ne veut pas se mouiller dans cette affaire complexe et laisse l’Espagne se dépatouiller. En cause évidemment les velléités d’indépendance de certaines régions qui pourraient être encouragées par la démarche scissionniste des catalans. L’Europe ne veut même pas envisager la perspective d’une éventuelle médiation. Du coup la crise ne peut que s’approfondir. Le gouvernement espagnol va sans doute montrer son flexibilité en menaçant de suspendre les autorités catalanes. Certes l’appel à la négociation du président catalan ne manque pas d’ambiguïté mais c’est une perche qu’on aurait dû saisir à la fois par le gouvernement espagnol et même par l’Europe. D’une certaine manière l’affaire catalane offre une opportunité de réfléchir à la perspective d’une Europe fédérale s’appuyant sur des états eux-mêmes largement plus décentralisés. Une sorte d’Europe fédérale s’appuyant sur des Etats eux-mêmes fédéraux. Au lieu de cela on privilégie le conflit qui devient de plus en plus inévitable et dont les conséquences pourraient être particulièrement malheureuses tant pour l’Espagne que pour l’Europe. Pour l’instant aucune perspective de compromis ne paraît possible puisque Mariano Rajoy pourrait prendre l‘initiative sans précédent de dissoudre le Parlement catalan et de convoquer de nouvelles élections régionales, ce qui est souvent qualifié d’“option nucléaire”. Madrid pourrait aussi demander à la justice de déclarer anticonstitutionnelle une déclaration d‘indépendance. L’objective de Madrid éclaire éliminer le président du Parlement catalan, faire éclater sa coalition et le tuer définitivement sur le plan politique. De son côté, Puigdemont est de plus en plus coincé entre des indépendantistes radicaux et des partisans d’une ligne plus conciliante avec Madrid. En clair chacun attend l’incident pour instrumentaliser des conséquences qui pourraient être difficilement maîtrisables. Pour parler clair pour l’instant c’est l’irresponsabilité qui l’emporte et le dialogue de sourds ne peut conduire qu’à une impasse voire à une crise encore plus grave.
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