Contre la gérontocratie politique, la retraite pour tous !
Dans un article de la Tribune de conseiller municipaux, Maxime Thory et Clément Gouveia souhaitent la mise à la retraite de nombre d’élus :
Selon une enquête réalisée par France info, 64 % des députés ont décidé de renouveler leur mandat , expression ô combien ironique lorsqu’il s’agira pour certains d’entre eux de leur 9e mandat consécutif. Tel est par exemple le cas de Gérard Bapt, député socialiste de 70 ans, qui confie que sa fédération l’a « supplié d’être candidat ». Le constat est donc clair : à moins d’un raz-de-marée frontiste ou macroniste, le renouvellement politique tant attendu par les Français n’aura pas lieu. Pourtant, seuls 2 % des sénateurs et 4 % des députés ont aujourd’hui moins de 40 ans, bien que cette classe d’âge représente la moitié des Français ! À l’inverse, sur 577 députés, le palais Bourbon accueille 280 élus entre 60 ans et 80 ans. Le système politique, verrouillé par les générations des baby-boomers, ne semble toujours pas décidé à s’ouvrir à de nouveaux profils. Pour justifier cet éternel retour des mêmes, les députés brandissent toujours la même panoplie d’excuses rocambolesques. La plus classique consiste à arguer que la « vraie jeunesse est dans la tête ». Ainsi un élu républicain de 69 ans affirme-t-il très sérieusement : « Je rencontre souvent les jeunes de ma circonscription, et ils me considèrent comme l’un des leurs . » Souvent centré sur la glorification d’une inestimable expérience, un député s’érige en Christ et explique qu’il s’est « sacrifié » et « reste pour son parti ». Enfin, d’autres font preuve d’un cynisme manifeste et considèrent que c’est la faute de leurs électeurs, ils n’ont qu’à voter pour des jeunes. Certes, mais encore faut-il leur en donner l’occasion ! En vérité, les responsables politiques masquent, sous des prétextes qui ne font plus illusion, une ivresse du pouvoir. L’homme politique moyen a 65 ans et est au pouvoir depuis 40 ans. Il s’accroche à son siège comme Harpagon à sa cassette. À ses yeux, la jeunesse symbolise moins la transmission d’un savoir que le risque d’une concurrence politique. Si un jeune s’intéresse à la vie de la cité et souhaite s’investir, il incarne dès lors un danger qu’il faut écarter. Désireux de mourir sur scène comme Molière, nos élus ont oublié que le plaisir de léguer valait bien celui de régner. En l’absence de garde-fous, la majorité des responsables politiques apparaît ainsi incapable de s’autoréguler. Dans son rapport de 2015 adressé au gouvernement, France Stratégie avançait déjà l’idée de plafonner à 70 ans l’âge d’un candidat à une élection parlementaire ou locale. Sans surprise, elle n’a jamais été reprise. Toutes les tentatives parlementaires se sont heurtées au mur des intérêts personnels. La rénovation de la vie politique ne peut passer que par référendum. Instaurer un âge de la retraite à 70 ans pour les hommes politiques répond à un impératif de renouvellement d’un système politique sclérosé. Certains l’ont compris. Le député PS de Côte-d’Or, Laurent Grandguillaume , a choisi de tirer sa révérence à 38 ans : « Je crois qu’il est grand temps de changer l’engagement politique par la preuve. Il doit en effet être conçu comme un engagement au service de l’intérêt général et non plus comme un métier. Faut-il attendre le changement des règles ou s’imposer les règles du changement ? » À l’exception d’initiatives individuelles louables, les parlementaires refusent donc d’être traités comme le commun des mortels. Depuis 2009, il existe en effet en France un âge maximum de travail fixé à… 70 ans. Ceux qui l’ont voté partageaient l’intuition qu’il existe un âge après lequel on a vocation à laisser la place à une nouvelle génération. Pourquoi refusent-ils aujourd’hui de s’appliquer ce qu’ils votent pour les autres ? La classe politique ne devrait jamais oublier qu’elle est au service des citoyens. Or, 70 % des Français plébiscitent un âge maximal pour se présenter à une élection . Pourquoi ignorer la volonté du peuple ? Pourquoi, à l’instar de la loi parité homme-femme, nos gouvernants ne légifèreraient-ils pas sur une parité intergénérationnelle ? In fine, cette mesure bénéficierait autant à la démocratie française qu’aux parlementaires concernés, comme l’explique justement le député André Chassaigne : « Les élus qui seraient poussés à une retraite forcée à 70 ans, qu’est-ce qu’il va leur rester ? Il leur restera beaucoup de choses : le soleil, les étoiles, les choses qui sont à tous sans qu’elles soient à chacun. Le bonheur de voir par exemple un petit filet d’eau qui sort des herbes à la campagne. Est-ce que ce n’est pas aussi beau que l’hémicycle de l’Assemblée nationale ? »
Maxime Thory est conseiller municipal à Montmorency et auteur de « Les jeunes meurent toujours les premiers » (avril 2016)
Clément Gouveia est conseiller municipal de Fosses (95)
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