LuxLeaks: un procès qui modifie les règles fiscales
Paradoxe, c’est au moment où se déroule un nouveau procès LuxLeaks que le Luxembourg décide d’assainir ses règles fiscales. Un nouveau procès en appel qui d’une certaine manière en creux est le procès du fric. Malheureusement pas celui des multinationales qui ont bénéficié des largesses fiscales du Luxembourg mais de ceux qui l’ont dénoncé. Cerise sur le gâteau l’actuel président de la commission européenne et Jean-Claude Juncker alors Premier ministre luxembourgeois. Dès lors il ne faut guère s’étonner que les moyens de la régulation européenne pour lutter contre la fraude fiscale ne soient pas à la hauteur des les enjeux en Europe. Ce procès fait à ce qui ont dénoncé la fraude fiscale constituent un véritable scandale Pour avoir soustrait à leur employeur, PricewaterhouseCoopers (PwC) Luxembourg, des centaines de copies d’accords fiscaux passés entre le cabinet d’audit et le fisc luxembourgeois pour le compte de grandes entreprises, Antoine Deltour et Raphaël Halet avaient écopé le 29 juin respectivement de 12 mois de prison avec sursis et 1500 euros d’amende, et de 9 mois avec sursis et 1000 euros d’amende, pour vol, violation du secret professionnel, accès frauduleux dans un système informatique et blanchiment de documents soustraits. Les deux Français avaient fait appel de la condamnation. Quant au journaliste français Édouard Perrin, 45 ans, qui avait récupéré les documents fiscaux auprès de Deltour et Halet avant de les utiliser dans deux émissions de Cash investigation diffusées sur France 2 en mai 2012 et juin 2013, il avait été acquitté en première instance des charges qui pesaient sur lui, à savoir complicité de divulgation de secrets d’affaires, de violation du secret professionnel et blanchiment d’informations volées. En première instance, Antoine Deltour et Raphaël Halet avaient dit avoir agi au nom de l’intérêt général et revendiqué le statut de lanceur d’alerte, ce que le tribunal avait bien voulu entendre. «Suite aux révélations LuxLeaks, ils ont contribué à une plus grande transparence et équité fiscale. Les deux prévenus ont donc agi dans l’intérêt général et contre des pratiques d’optimisation fiscale moralement douteuses», résume le jugement. Mais si le tribunal a reconnu aux deux Français le statut de «lanceur d’alerte», il a néanmoins constaté que celui-ci ne les protégeait pas, ni en droit national ni en droit européen. Le 5 novembre 2014, le consortium international de journalistes d’investigation (ICIJ) avait publié sur son site 548 rescrits fiscaux liant l’administration luxembourgeoise à plus de 350 sociétés, ainsi que 16 déclarations fiscales, soustraits respectivement par Antoine Deltour et Raphaël Halet. Hasard sans doute, le Luxembourg vient de décider de nouvelles règles fiscales. Ces nouvelles règles concernent « le traitement fiscal » accordé aux « sociétés de financement », des entités qui appartiennent aux groupes multinationaux et dont la seule activité consiste à fournir des services financiers, comme des prêts intragroupes. Ces nouvelles règles devraient « limiter les abus », a commenté Jean-Luc Fisch, du cabinet luxembourgeois Elvinger, Hoss & Prussen. Selon lui, « le Luxembourg joue un peu ici le rôle de premier de la classe et d’autres devront bouger, notamment l’Irlande et les Pays-Bas ». Parmi plus de 1.000 accords (ou « rescrits ») fiscaux passés entre les autorités fiscales de tous les États membres et les multinationales que la Commission dit avoir examiné, un grand nombre concerne des sociétés de financement au Luxembourg. S’ils procurent un avantage à une entreprise et restreignent la concurrence, ces accords fiscaux peuvent être assimilés à une aide d’État par l’UE, qui les considèrent alors comme illégaux.
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