Airbus Helicopters : le mépris de la Pologne
C’est essentiellement pour des motifs politiques le parti Droit et Justice (PiS) a annulé de façon illégale le contrat d’hélicoptères Airbus. Cela pour des raisons internes ; le parti droit et justice veut montrer sa rupture avec l’ancien gouvernement polonais. Ce parti très eurosceptique veut montrer des signes de rupture avec l’Europe. Une Europe dont pourtant elle a bénéficié du soutien pour se libérer du joug soviétique et pour opérer son démarrage économique. Dans une lettre ouverte au Premier ministre polonais, le PDG d’Airbus Helicopters, Guillaume Faury, accuse Varsovie d’avoir changé les règles du jeu de l’appel d’offres où Airbus était en concurrence avec les Américains et les Italiens, et d’avoir tenté de contourner les règles de l’Union européenne. « Airbus Helicopters regrette profondément cette décision et (…) réfute fermement certaines allégations rapportées dans les médias selon lesquelles il aurait conduit ce processus de négociation de mauvaise foi », écrit-il dans le courrier diffusé mardi. Il ajoute que le marché aurait entraîné la création de 3.800 emplois en Pologne et généré plus de valeur pour le pays que pour Airbus lui-même. L’annulation du contrat de 13,5 milliards de zlotys (3,14 milliards d’euros) suscite une vive crise diplomatique entre Paris et Varsovie, au point que l’Etat français, actionnaire d’Airbus Group à hauteur de 11%, envisage des mesures de rétorsion. L’accord avait été conclu par le précédent gouvernement polonais, battu aux législatives d’octobre 2015 par le parti Droit et Justice (PiS), eurosceptique. Airbus avait à l’époque été préféré à Sikorsky, filiale de l’américain Lockheed Martin, et à l’italien AgustaWestland. Tom Enders, président exécutif d’Airbus Group, maison-mère d’Airbus Helicopters, a accusé de son côté la Pologne d’avoir induit en erreur le groupe au cours des négociations et menacé de donner une suite à cette affaire, sans autres précisions. « Jamais nous n’avons été traités par un Etat client de la manière dont ce gouvernement nous a traités », dit Tom Enders dans une déclaration distincte envoyée par email. « Les déclarations controversées et contradictoires du gouvernement polonais au cours du processus ont donné l’impression d’une confusion sans précédent », ajoute-t-il. Des sources industrielles ont chiffré à plusieurs dizaines de millions d’euros le coût supporté par Airbus pour la campagne visant à obtenir ce contrat Des responsables gouvernementaux polonais ont estimé qu’Airbus avait eu largement le temps d’ajuster son offre, qui ne s’est pas avérée satisfaisante. « La fin des négociations avec Airbus entraîne une réaction émotionnelle, c’est compréhensible », a déclaré à des journalistes Radoslaw Domagalski-Labedzki, vice-ministre de l’Economie. « Je voudrais expliquer que le gouvernement n’a pas rompu les négociations mais y a mis un terme lorsque nous avons été convaincus que les poursuivre n’aurait aucun sens. Ces négociations ont duré un an, suffisamment longtemps pour s’assurer qu’il n’y avait pas de marge de manoeuvre pour un compromis». Levant le voile sur des clauses habituellement tenues secrètes dans les contrats relatifs à la défense, notamment sur la valeur des compensations industrielles exigées par la Pologne, Guillaume Faury précise que l’annulation du marché est survenue un jour après qu’Airbus a offert de nouvelles concessions. Airbus Helicopters, ajoute-t-il, a proposé une valeur des compensations industrielles représentant plus de 100% de la valeur nette des hélicoptères, soit 10,8 milliards de zlotys (2,5 milliards d’euros). A la demande du ministère polonais du Développement, il a également intégré dans cette compensation 23% de TVA, portant le montant total à 13,4 milliards de zlotys. « Bien que le la compensation d’une taxe sur la valeur ajoutée via les compensations industrielles ne soit pas une pratique standard, Airbus Helicopters a accepté de compenser cette valeur brute », poursuit le PDG dans son courrier. Il ajoute que le ministère a également introduit de nouvelles exigences en août, mais qu’Airbus n’a pas été en mesure de répondre à certaines d’entre elles car elles ne respectaient pas les régulations de l’Union européenne, sans plus de précisions. Selon Airbus, le contrat aurait conduit au transfert de 45 éléments de technologies sensibles, fourni 30 années de travail aux entreprises publiques et modernisé une industrie axée en grande partie sur la maintenance « d’hélicoptères russes d’ancienne génération ». Guillaume Faury ajoute qu’Airbus est allé plus loin que ses concurrents en offrant que l’usine d’assemblage soit détenue par l’Etat polonais. « Airbus Helicopters a proposé une ligne d’assemblage entière de H225M Caracal à l’image des capacités des sites actuels français », poursuit-il. Le groupe a également promis une usine de production de composants d’une valeur de 370 millions de zlotys, a-t-il ajouté.
(Avec Reuters)
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