SNCF : pourquoi la CFDT a signé ?
Dans une interview à Challenges Rémi Aufrère, secrétaire général adjoint de des cheminots CFDT justifie la signature de son organisation.
ANNE-CHRISTINE POUJOULAT / AFP
Pourquoi la CFDT Cheminots va-t-elle signer la convention collective du secteur ferroviaire et le projet d’accord d’entreprise sur l’organisation du temps de travail?
Rémi Aufrère, secrétaire général adjoint de la CFDT Cheminots: Nous avons fait ce choix car les propositions de base de la CFDTCheminots, poussées le 28 mai dernier, ont été reprises dans leur intégralité. Ces textes nous semblent désormais équilibrés. Au final, le parti pris est le suivant: on garde la réglementation actuelle en lui apportant quelques modifications qui pourront avoir un impact important à l’avenir. Nous estimons que la convention collective va par exemple permettre de réduire l’écart concurrentiel entre le public et le privé de plus de 25% aujourd’hui à 9%, et ce, en obtenant notamment des avantages significatifs pour les salariés du privé tels qu’une hausse du nombre de jours de repos supplémentaires.
Concrètement, que changeraient ces accords?
Nous avons accepté des concessions sur le travail de nuit. Si le seuil pour bénéficier du statut de « travailleur de nuit » est abaissé à 300 heures pour les roulants, 385 heures pour les sédentaires contre actuellement 330 heures et 455 heures d’heures travaillées, il reste toujours plus élevé que celui du privé, qui est de 270 heures. En contrepartie, les temps de repos compensés seront améliorés et les 35 heures de travail hebdomadaires seront maintenues comme cadre de référence.
Les accords dérogatoires seront désormais possibles et permettront aux syndicats signataires du projet d’accord de négocier à l’échelle nationale, après avis des instances des représentants du personnel locales, des aménagements dans l’organisation de travail en fonction des spécificités régionales et sectorielles. Sur ce qui ne bouge pas, nous avons en revanche obtenu que ne soit pas remis en cause l’encadrement des repos des personnels à l’échelle nationale. Le »19-6″[qui garantit aux roulants de ne pas travailler après 19H00 la veille d'un repos hebdomadaire et de ne pas reprendre le service avant 06H00 le lendemain] est par ailleurs maintenu. Nous espérons ainsi engager une certaine rénovation du dialogue social dans l’entreprise en sortant des postures dogmatiques qui nous semblent très passéistes.
Comment entrevoyez-vous la suite? La CGT et Sud-Rail, qui représentent à eux deux 51% des suffrages lors des dernières élections professionnelles, sont-t-elles susceptibles de bloquer les accords?
L’Unsa, qui doit se prononcer demain, devrait nous suivre. Nous représenterions ainsi 38% des voix, ce qui devrait nous permettre de conclure le projet d’accord d’entreprise [l'accord doit recueillir la signature de syndicats représentant au moins 30 % des voix aux dernières élections, et ne pas être refusé par les organisations dépassant 50 %, ndlr]. Je ne sais pas si la CGT ira jusqu’à signer ces accords, mais je suis presque convaincu qu’elle n’exprimera pas son droit d’opposition avec un tel compromis. Ce serait une catastrophe. On entrerait dans un nouveau cycle de conflits tant sur le plan social que politique en obligeant l’Etat à trancher. Le problème est que la CGT est aujourd’hui gênée par la posture très radicale qu’elle a endossée depuis le début des négociations. Cette pirouette en termes de communication est risquée mais je pense que la raison l’emportera. Quant à Sud-rail, l’organisation risque malheureusement de maintenir sa position jusqu’au-boutiste.
Quand entreraient en vigueur ces deux accords s’ils étaient approuvés?
A priori, dès le 1er juillet prochain pour la convention collective et début décembre 2016 pour l’accord d’entreprise. Les organisations syndicales ont quant à elles jusqu’au 9 juin pour se prononcer sur la convention collective et jusqu’au 14 juin sur le projet d’accord d’entreprise.
Doit-on attendre de nouveaux mouvements de grève à la SNCF dans les jours ou semaines à venir?
Il est probable que des mouvements perdurent; le préavis de Sud-rail court de mémoire jusqu’à début juillet. Mais, d’après moi, ils seront sporadiques. La mobilisation devrait mourir de sa petite mort.
Faut-il selon vous anticiper des perturbations pour l’Euro de football?
Aujourd’hui, on compte seulement 7à 8% de grévistes, c’est ridicule. Je pense que le trafic pendant l’Euro sera davantage perturbé par les conséquences des crues que par les grèves.
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