Emploi banques: un scénario catastrophe?
Il est clair que le secteur bancaire va connaître une vraie révolution avec la poursuite de l’informatisation, le développement des banques en ligne et la venue de nouveaux moyens de paiement comme le mobile. Les experts s’attendent à une diminution des effectifs du secteur bancaire traditionnel de leur de 50 % dans les 10 ans. Interview de dans challenges de Luc Mathieu, secrétaire général de la fédération CFDT.
Quels sont vos scénarios pour les banques à l’horizon 2025?
Une chose est sûre: l’emploi dans le secteur ne va pas repartir à la hausse. Cela ne veut pas dire que les banques et les compagnies d’assurance vont cesser de recruter, puisqu’il faut faire face au turn-over et aux départs à la retraite. Mais l’ensemble de ces départs ne sera pas remplacé. Dans un secteur employant environ 200.000 personnes, nous enregistrons aujourd’hui une diminution de l’emploi variant dans une fourchette de 1% à 2% par an. A ce niveau de baisse, la pyramide des âges du secteur est favorable pour gérer le phénomène en douceur. Mais ce ne sera pas le cas si l’on atteint 5% dans les prochaines années, soit parce qu’une nouvelle crise contraint les établissements à des économies drastiques, soit parce que le choix des clients pour des banques digitales et low-cost s’amplifie. Personne ne sait si nous éviterons le scénario catastrophe, qui serait synonyme de plans sociaux et de restructurations menés dans l’urgence. On a tous entendu les trois coups mais on n’a pas encore assisté à la levée de rideau pour découvrir la nouvelle scène.
Le secteur bancaire a-t-il les moyens de se montrer résilient?
Le secteur n’en est pas à sa première mutation. Lorsque j’ai commencé dans le métier, le traitement des chèques, des espèces ou des effets de commerce pesaient 40% de notre activité de détail. Les choses ont changé en profondeur depuis, sans provoquer d’effondrement. La dématérialisation des tâches a été engagée de longue date: la banque ne constitue pas par hasard le quatrième consommateur de services informatiques du pays. En outre, traditionnellement, les entreprises investissent dans la formation, indispensable pour s’adapter aux nouvelles technologies. Enfin, il faut reconnaître que le secteur est riche, ce qui permet de faire face plus sereinement. Pour autant, personne ne sait si ce fonctionnement perdurera et permettra de surmonter la vague qui arrive.
Comment comptez-vous vous adapter syndicalement à cette nouvelle situation?
Nous sommes naturellement impactés. Et c’est pour étudier les pistes possibles de nos évolutions que nous avons lancé cette étude sur les banques à l’horizon 2025. Il nous faut élargir notre offre syndicale pour accompagner les adhérents dans l’entreprise, mais aussi en dehors si nécessaire. Personnellement, je pense que notre réflexion doit tourner autour de la meilleure manière de devenir prestataire de services individuels tout en conservant nos objectifs collectifs. C’est à cette condition que nous aurons davantage d’adhérents et que nous pèserons dans les débats en cours.
Comment partagez-vous ces réflexions sur les mutations de la banque avec les employeurs de l’Association française des banques (AFB)?
L’AFB ne cesse de dire qu’elle a besoin d’interlocuteurs. Mais quand nous avons proposé de mener ensemble cette démarche prospective, l’AFB n’a pas voulu. C’est pourquoi nous avons travaillé de notre côté pour établir notre propre diagnostic. Au moment où tout bouge, nous ne pouvons pas nous contenter d’attendre les seuls constats des employeurs. Ces derniers sont dans une situation délicate: ils ont du mal à reconnaître qu’ils ne savent pas trop où nous allons. Et du coup, ils peinent à partager une vision et une stratégie avec les salariés.
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