Une Europe à plusieurs vitesses (Jean-Marc Ayrault)
Suite aux nouvelles concessions faites au Royaume-Uni pour son maintien dans l’union européenne, Jean-Marc Ayrault, le nouveau ministre des Affaires étrangères reconnaît de fait une Europe à plusieurs vitesses. Il y a bien sûr d’abord la zone euro qui ne concerne pas par exemple le Royaume-Uni mais au-delà de la zone euro des statuts différents selon les pays avec des modes de coopération de plus en plus différenciés. D’une certaine manière c’est la reconnaissances de la théorie des cercles avec un premier groupe de pays aux coopérations renforcées, un autre groupe de pays moins intégrés et moins contraints enfin un troisième pour les pays plus récemment accueillis au sein de l’union économique et ou qui ne souhaitent comme le Royaume-Uni qu’une intégration légère. Il restera toutefois à clarifier juridiquement cette théorie car les traités actuels ne rendent pas compte de cette évolution. L’ouverture de l’union économique à de nouveaux pays des Balkans devrait de ce point de vue précipiter des réformes nécessaires notamment pour maîtriser les flux d’immigration. (Interview de Jean-Marc Ayrault dans le JDD)
Une semaine après votre arrivée à la tête de la diplomatie, le Conseil européen a fini, au bout de deux jours de négociation, par un accord qui va permettre au Premier ministre David Cameron de faire campagne pour le maintien de la Grande-Bretagne dans l’UE. La France affirme qu’elle n’a rien cédé, mais l’Allemagne parle d’un compromis équitable. Qu’en est-il?
David Cameron avait demandé à l’Europe qu’elle l’aide à gagner son référendum sur le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne. C’est ce que nous avons fait samedi, à Bruxelles, tout en prenant une décision aussi dans l’intérêt de tous les Européens. Il n’y aura pas de révision des traités, pas de veto du Royaume-Uni sur un renforcement de la zone euro, pas de remise en cause du principe de libre-circulation. Le Royaume-Uni a obtenu des réponses à ses préoccupations et j’espère, sur cette base, que les Britanniques choisiront de rester dans l’Union européenne. C’est dans l’intérêt du Royaume-Uni, c’est dans l’intérêt de l’Europe, c’est dans l’intérêt de la France.
Mais est-ce que cela ne revient pas à défaire un peu plus l’Union européenne?
Il ne s’agit pas de défaire ce qui a été fait ni d’empêcher ceux qui veulent aller plus loin. Le socle des principes et des valeurs fondatrices de l’Union demeure. Avant de faire mon discours au moment de la passation de pouvoirs avec Laurent Fabius, je me suis arrêté un instant devant la photo de Robert Schuman* dans le salon de l’Horloge au Quai d’Orsay. C’est ici que le 9 mai 1950, l’année de ma naissance, cet homme a lancé la Communauté Européenne du charbon et de l’acier. C’est de cette histoire dont nous sommes comptables. Chacun doit accepter une Europe différenciée dans laquelle ceux qui veulent plus d’Europe pourront avancer et ceux qui ne veulent pas aller plus loin n’y feront pas obstacle. En outre, l’Europe doit être un espace de projets ambitieux qui soit en mesure de peser davantage dans les réponses aux problèmes du monde. On en a vu un très bon exemple lors de la COP21 sur le climat.
Cette Europe différenciée, c’est donc une Europe à deux vitesses?
Le Royaume-Uni a toujours eu une position particulière au sein de l’Union européenne et certains Etats membres ont déjà décidé d’aller plus loin, dans le cadre de la zone euro ou de l’espace Schengen. L’accord avec les Britanniques ne fait qu’admettre qu’il y a une Europe différenciée. Ce qui compte, c’est que ceux qui veulent aller vers plus d’intégration ne soient pas entravés, car il faut faire mouvement et redonner à l’Union européenne toute son ambition. Si l’Europe ne bouge pas, on verra les nationalismes et les populismes prospérer, ce qui est d’ailleurs le cas. Il faut donc recréer une envie d’Europe et redonner à tout le monde des raisons d’aimer l’Europe, surtout à la jeunesse.
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