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Droit du travail : projet de loi Myriam El Khomri : une réforme économiquement légitime mais sans légitimité politique

Droit du travail : projet de loi Myriam El Khomri : une réforme économiquement  légitime mais sans légitimité politique

 

 

À lire les différents réactions il y a plusieurs postures, celle de la gauche y compris de parlementaires du parti socialiste qui considèrent que le projet fait trop de concessions au patronat. À droite en général on soutient les réformes voulues par le Medef. Il y a enfin ceux qui pensent qu’il s’agit d’une manœuvre tacticienne de la part de Hollande pour mettre la droite dans l’embarras et brouiller les cartes. Il faut cependant convenir il s’agit du une réforme d’envergure en particulier avec l’in version de la hiérarchie des normes qui permet en fait au plan de l’entreprise de contourner les contraintes décidées au plan national et  au plan des branche ;  une sorte de révolution juridique mais aussi démocratique avec le contournement possible des syndicats. Une réforme toutefois qui manque d’équilibre qui est surtout marqué par un objectif de plus grande flexibilité au détriment de la sécurité. Mais la grande question qui se pose est de savoir si le gouvernement actuel dispose d’une légitimité politique pour effectuer une telle réforme. En l’état la réforme ne pourra être votée par la gauche et on voit mal un projet de loi proposée par un gouvernement de gauche qui serait soutenue uniquement par la droite au Parlement. Au-delà du calcul des majorités possibles au Parlement se pose aussi le problème de la légitimité pour ce gouvernement en fin de course pour effecteur une réforme d’ampleur qui ne correspond à aucune des engagements de la gauche. La réforme du droit du travail pourrait bien connaître le sort qui a connu le CPE avec un enterrement politique et juridique ;  une réforme utile à condition de rééquilibrer flexibilité et sécurité mais une réforme politiquement illégitime  même si institutionnellement l’autorité théorique du gouvernement ne peut être contestée. On peut comprendre la nécessité d’une plus grande flexibilité en matière de droit du travail mais elle ne peut s’imposer sans un minimum d’équilibre pour assurer la sécurité des contrats des salariés. En outre la principale critique qu’on peut adresser au gouvernement c’est  surtout de  vouloir opérer une révolution sociale dans le privé. Il serait sans doute plus prioritaire  de s’attaquer à la bureaucratie administrative et aux conséquences fiscales qu’elle entraîne. C’est en effet cette bureaucratie et ce niveau de prélèvement obligatoire qui tue la compétitivité et l’initiative. D’une certaine manière on va faire payer aux salariés du privé l’incapacité à moderniser la bureaucratie française et la fiscalité sera compensée par une baisse des salaires et une plus grande incertitude sur les contrats de travail. Sur chaque point, dans la droite ligne des recommandations du rapport Combrexelle, le projet de loi tend à donner la priorité aux accords de branche et d’entreprise. Il précise ce que ces accords peuvent prévoir, ce qui relève de l’ordre public intangible et, enfin, quelles sont les règles « supplétives » applicables à défaut d’accord. Et, déjà, sur ces questions, il comprend quelques dispositions « flexibilisant » le droit du travail. Ainsi, certes, la durée légale hebdomadaire du travail reste fixée à 35 heures. Ce qui signifie qu’au-delà, les heures supplémentaires doivent être majorées. Mais la loi fait sauter le verrou de l’accord de branche sur ce taux de majoration. Autrement dit, à la différence de ce qui était la règle jusqu’ici, même si un accord de branche prévoit un taux de majoration supérieur (20 % ou 25 % par exemple), un accord d’entreprise pourra fixer un taux de bonification inférieur dans la limite d’un minimum de 10%. Et cet accord s’appliquera, un salarié ne pourra pas revendiquer l’application du « principe de faveur » en estimant que l’accord de branche lui est plus favorable. Le principe de saine concurrence au sein d’une branche professionnelle va donc être mis à rude épreuve. Mieux encore, dans les entreprises où il n’y a pas de délégué syndical, l’employeur pourra unilatéralement remplacer le paiement des « heures sup » par un repos compensateur, si les délégués du personnel ne s’y opposent pas. Rappelons qu’en l’absence de tout accord, les huit premières « heures sup » doivent être majorées de 25 % et les suivantes de 50 %. Plus fort, le projet de loi prévoit que, toujours par accord, l’entreprise est autorisée à moduler le temps de travail sur une période pouvant atteindre… trois ans, au lieu d’un an jusqu’ici. Ce qui signifie que les « heures sup » ne seront pas dues si en moyenne sur cette période on a travaillé 35 heures. Même (hypothèse d’école) si l’on a travaillé 40 heures pendant 18 mois… dès lors que l’on a travaillé que 30 heures les 18 mois suivants. Encore plus fort : dans les petites entreprises démunies de délégué syndical, il sera désormais possible de signer des conventions individuelles de forfait jours… sans qu’un accord collectif sur cette question ait été préalablement conclu. Une disposition très attendue par les startups notamment. Rappelons que, sous condition de respect de certaines règles, le forfait jours permet de travailler jusqu’à 235 jours par an et de ne pas respecter les limites quotidienne et hebdomadaire de durée du travail. Autre point sur la durée du travail qui va satisfaire les entreprises : l’augmentation de la durée maximum hebdomadaire de travail. Actuellement, en vertu d’une directive européenne, cette durée est fixée à 48 heures. Or, le projet de loi prévoit qu’en cas de circonstances exceptionnelles, elle pourra être portée à… 60 heures avec l’autorisation de l’autorité administrative. Mieux, un accord d’entreprise pourra porter à 46 heures la durée du travail maximum sur un cycle de 16 semaines, là où elle est actuellement limitée à 44 heures. Par ailleurs, Jusqu’à présent, les entreprises avaient la possibilité de conclure avec les représentants du personnel un accord dit de « maintien de l’emploi » permettant durant cinq ans de diminuer les rémunérations et/ou de baisser ou d’augmenter la durée du travail afin d’éviter des licenciements. Ces accords étaient considérés comme défensifs, il fallait que l’entreprise soit confrontée à une difficulté conjoncturelle. Avec le projet de loi, les entreprises pourront conclure ce même type d’accord (mais ils s’appelleront cette fois « de développement de l’emploi ») pour une raison « offensive », par exemple si elles veulent conquérir de nouveaux marchés. Le patronat va être satisfait… d’autant plus que si un tel accord est conclu, le salarié ne pourra pas s’y opposer, ou alors ce simple refus sera considéré comme une « cause réelle et sérieuse de licenciement ».  Les règles de validation des accords d’entreprises sont profondément revues, comme on le savait déjà. C’est le principe de l’accord majoritaire qui va désormais prévaloir. A l’avenir, une fois la loi votée, les accords collectifs devront être signés par des syndicats représentant au moins 50% des salariés (la règle s’apprécie en fonction du résultat obtenu aux dernières élections professionnelles). Mais, grande nouveauté, afin d’éviter des situations de blocage – comme c’est le cas à la Fnac actuellement à propos du travail dominical – des syndicats représentant au moins 30 % des salariés pourront prendre l’initiative d’organiser un referendum auprès des salariés pour voir s’ils valident ou pas un accord négocié. Si une majorité de salariés disent « oui », alors l’accord s’appliquera même si des syndicats représentant 50 % des salariés n’avaient pas signé.

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