Twitter à plus de 140 caractères : ou la mort de la littérature française contemporaine
On vient à peine de banaliser le « fast aphorisme numérique » que déjà les écrivains au bestseller d’une ligne sont renvoyés aux principes premiers de l’écriture. En effet Twitter veut faire sauter le verrou de 140 caractères et passer à 10 000. Une vraie révolution culturelle. Dommage car nombre de succès littéraires était fondés sur le rétrécissement de la pensée et du verbe. Un seul exemple, un des grands succès de 2015 « Le crime du compte Neuville » d’Amélie Nothomb paru chez Albin Michel écrit sans doute en une journée-ceci expliquant cela- ne compte que 130 pages avec en plus une énorme police de caractères et de très grandes marges. Pour donner une idée cette œuvre magistrale dans son volume (comme dans son contenu), ne représenterait qu’une trentaine de pages si l’on retenait la mise en page d’« A la recherche du temps perdu » de Proust (texte intégral paru chez Gallimard en 1999). Du coup cette décision de Twitter constitue un coup d’arrêt à la logique d’écriture des romans réalisés en une journée entre deux verres de beaujolais à la terrasse du Café de Flore. Décidément, Twitter ne sait plus quoi faire pour séduire de nouveaux utilisateurs ! Après avoir expérimenté en décembre 2015 l’affichage des tweets par pertinence et non plus dans un ordre chronologique, voilà que le site de microblogging réfléchit à abandonner à sa fonction historique, la limite des 140 signes pour un tweet… comme une rumeur le laissait déjà entendre en septembre. La nouvelle limite pourrait être de 10 000 caractères ! De quoi porter un coup fatal à la logique de production intellectuelle dans le domaine philosophique et surtout politique. Un aspect positif toutefois : la retombée sur l’emploi. On prévoit en effet la création de milliers de postes de nègres pour aider nos élites à produire au-delà de trois lignes de réflexion.