Fraude à la TVA : « rue du commerce » coincé
Comme souvent en matière de d’optimisation fiscale, on a recours à des sociétés intermédiaires pour des prestations fictives. Mais cette fois c’est le site Rue du commerce qui a été coincé il est vrai après presque 15 ans d’enquête. Ce que révèle aujourd’hui des FM. Vendredi 31 juillet, le Conseil d’Etat a débouté Rue du Commerce, mettant ainsi un point final à une procédure qui avait démarré au début des années 2000. A l’époque, la police a découvert un vaste système de fraude à la TVA impliquant le site de commerce électronique, qui a toutefois réussi à ne jamais ébruiter l’affaire jusqu’ici. La fraude portait sur les CD et les DVD vierges vendus sur le site. Rue du Commerce les achetaient à des « sociétés taxis »: des sociétés immatriculées en France dotées de noms exotiques: Jem Trading devenue Dataworld, Micram, Duncan Distribution… Rue du Commerce se faisait ensuite rembourser la TVA sur ces achats auprès du fisc, arguant que cette TVA avait été acquittée précédemment par les sociétés taxis. En réalité, les sociétés taxis s’évanouissaient rapidement dans la nature sans jamais payer la moindre TVA. Après avoir découvert cette fraude, le fisc a notifié en 2005 à Rue du Commerce un redressement de 2,5 millions d’euros portant sur les années 2002 à 2004. Le site avait contesté ce redressement devant toutes les juridictions possibles, mais toujours en vain. Pour se défendre, Rue du Commerce arguait ne pas être au courant de la fraude à la TVA. Mais le fisc a ressorti les propres déclarations de l’ancien dirigeant de Rue du Commerce faites en 2003 devant les gendarmes de Bobigny. Lors de son audition, « l’ancien dirigeant de Rue du Commerce a reconnu l’existence d’un circuit d’approvisionnement frauduleux afin d’échapper au paiement de la rémunération pour copie privée, ainsi que la dépendance envers Rue du Commerce des fournisseurs défaillants. Tandis que les gérants des sociétés Dataworld et Duncan Distribution ont révélé leurs liens de connivence avec Rue du Commerce », indique le jugement d’appel. A noter que Jem Trading réalisait 80% de son chiffre d’affaires avec Rue du Commerce. Le fisc a mis en avant de nombreux autres faits accablants. Ainsi, les sociétés taxis étaient de simples boîtes aux lettres, »ne disposant pas des moyens humains et matériels » pour faire du commerce de CD et DVD, « et notamment pas des structures qui leur auraient permis de recevoir et de stocker des marchandises ». En pratique, les marchandises, venant de Hong Kong ou d’Espagne, ne transitaient même pas par les sociétés taxis, mais étaient « directement livrées à Rue du Commerce ». Certes, une des sociétés taxis, Duncan Distribution, exerçait bien une activité réelle: elle créait des sites web… En outre, les sociétés taxis « ne disposaient pas des ressources financières » pour acheter les marchandises. Elles se voyaient avancer l’argent par Rue du Commerce. Il est vrai que ces sociétés taxis étaient aussi détenues par des actionnaires communs.Enfin, et non des moindres, l’économie réalisée par les sociétés taxis en échappant à la TVA leur permettait ensuite de revendre les marchandises à Rue du Commerce à « des prix inférieurs au marché, et avec des marges commerciales négatives ». Bref, pour le fisc, Rue du Commerce « ne pouvait ignorer qu’elle participait à un circuit de fraude sur la TVA », et y a bien « participé » elle-même. Le fisc a donc infligé une amende se montant à 50% des sommes détournées. Rue du Commerce a trouvé la facture salée: « le cumul des rappels de TVA, des intérêts de retard, et des pénalités aboutit à une taxation représentant 84% du chiffre d’affaires », a argué le site, mais sans convaincre les juges. Toutefois, on ignore ce qu’a donné l’enquête pénale. Dans son dernier document de référence datant de mi-2012, Rue du Commerce indique juste: « les dirigeants de Rue du Commerce sont susceptibles d’encourir, en tant que primo-délinquants, une peine pouvait être prononcée par le tribunal de grande instance ».
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