Les réformes structurelles du Nobel d’Economie
Contrairement à d’autres Jean Tirole, le Français qui a obtenu lundi le Nobel d’Economie, ne se concentre pas sur les études macro économiques dont les données très disparates négligent les interactions réelles entre les facteurs explicatifs et leurs effets systémiques . Il a plutôt choisi des champs plus restreint comme la méso économie, l’économie industrielle ou des secteurs socio économiques plus précis. En outre bien qu’il soit mathématicien, il ne s’en remet pas uniquement aux modèles économétriques traditionnels qui ont souvent tendance prolonger les tendances et ignorer certains facteurs de rupture, sans négliger les modèles, il utilise les connaissances de la politique économique.
Le Comité Nobel a assuré lundi que Jean Tirole, lauréat 2014 du prix de la Banque de suède en sciences économiques, était « l’un des économistes les plus influents de notre époque ». Pourrait-il l’être en France, lui qui est revenu des Etats-Unis il y a dix ans pour cofonder l’Ecole d’économie de Toulouse? Depuis vingt ans, à Boston ou dans la Ville rose, il martèle quelques principes qui, selon lui, pourraient permettre de faire évoluer le système. Dun certain point de vue le nouveau prix Nobel ne s’inscrit pas dans le clivage libéral ou keynésien mais ailleurs en proposant en particulier de rééquilibrer les forces du marché par la régulation. Quelques exemple de se propositions qui risquent de faire grincer des dents à gauche comme à droite (ce qui ne signifie pas pour autant qu’il ait raison sur tout).
Un contrat de travail unique
Mais c’est bien Jean Tirole et Olivier Blanchard, ce dernier étant désormais l’économiste en chef du FMI, qui l’ont théorisé les premiers. Dans un rapport effectué pour le Conseil d’analyse économique en 2003, ces deux chercheurs proposaient un contrat unique afin de casser les effets pervers du CDD. « Depuis 30 ans, 40 ans, il y a du chômage et les jeunes, on leur propose des CDD dans leur très grande majorité parce que les entreprises ont trop peur de donner des CDI. Donc, on a une situation complètement absurde qui est, qu’à force de trop protéger les salariés, on ne les protège plus du tout », expliquait Jean Tirole lundi en conférence de presse.
Licencier à bon escient
Selon lui, les procédures existantes ne sont pas pragmatiques et deux réformes permettraient un système plus équitable tant pour les entreprises que pour les salariés. D’abord, l’économiste veut en finir avec le système actuel d’assurance chômage. Explication : pour Jean Tirole, les entreprises qui doivent faire des économies ont tendance à licencier ses salariés, lesquels bénéficieraient d’allocations trop élevées. Le chercheur nobélisé veut éviter un effet d’aubaine qui encouragerait les entreprises à créer un chômage payé par l’Etat. Pour ce faire, il veut instaurer une taxe sur les licenciements.
Une étude du CNRS, qui compile les écrits de Jean Tirole, résume l’idée ainsi : « C’est le principe du pollueur-payeur appliqué au droit du travail, comme le pratiquent déjà certains États américains. » Pour éviter que les entreprises perdent en compétitivité, Jean Tirole propose de simplifier la procédure de licenciement. Ainsi, serait-il plus facile de licencier, mais il faudrait le faire à bon escient. Enfin, l’expert préconise de confier la gestion de la caisse d’allocation chômage à une agence indépendante de l’Etat plutôt qu’aux partenaires sociaux.
Réguler les banques pour pérenniser l’euro
Dès le déclenchement de la crise, en 2008, Jean Tirole a cherché des solutions durables pour pérenniser l’euro, après avoir fait le constat qu’il était impossible d’en sortir. « Mon avis, c’est que la création d’une union bancaire est quelque chose de tout à fait important », a déclaré l’économiste lundi en conférence de presse. Au sein de son Ecole de Toulouse, il défend l’idée de réguler les banques et la spéculation financière à l’échelle communautaire. Dans une étude publiée en 2013, il met en avant trois principes : une surveillance centralisée au niveau de la Banque centrale européenne (BCE), un mécanisme commun de résolution des crises bancaires (ce qu’ont partiellement mis en place les membres de la zone euro avec le MES – Mécanisme européen de stabilité – en 2012) et un fonds européen d’assurance des dépôts alimenté par les banques. Ce dernier servirait à garantir les dépôts en cas de faillite d’un établissement financier : ce ne sont plus les Etats qui paieraient donc.
Un permis de polluer
Le réchauffement climatique a été l’un des premiers thèmes de travail de Jean Tirole. Dans les années 90, il a eu une certaine influence dans le débat sur le recours aux droits d’émission négociable, c’est-à-dire le permis de polluer. Une mesure entrée en vigueur en 2008 pour les seuls gaz à effet de serre dans le cadre du protocole de Kyoto. L’économiste français a également milité, lors de la Conférence de Copenhague de 2009, afin d’allouer des quotas aux entreprises pour leurs émissions polluantes. Selon lui, ces leviers seraient la façon la plus équitable – et la plus acceptable pour les pays en voie de développement – de contrôler le réchauffement climatique.
0 Réponses à “Les réformes structurelles du Nobel d’Economie”