Les bizarreries méthodologiques du chômage
Au départ, il y a d’abord le bidouillage des chiffres par Pôle emploi (radiations qui peuvent atteindre 125 000 par mois, souvent non justifiés à comparer à la réduction du chômage d’octobre de 20 000 chômeurs ou à l’augmentation de 17 000de novembre) ) ; il y a ceux qui ont renoncé à s’inscrire soit bénéficiaires du RSA, soit complètement tombés dans la précarité et qui n’espèrent plus rien surtout pas de l’inutile Pôle emploi ; Enfin le tripatouillage méthodologique. Noël, le Nouvel an, les cadeaux, les réveillons. Autant d’évènements qui génèrent un surplus d’activité, en particulier dans les commerces en fin d’année. Pourtant, les chiffres du chômage pour le mois de décembre, dévoilés ce lundi 27 janvier, n’en seront pas artificiellement impactés. Les chiffres des demandeurs d’emploi, publiés chaque mois par le ministère du travail, sont en effet corrigés des variations saisonnières. La Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Darès) du ministère du Travail, retraite en effet les données individuelles collectées par Pôle emploi. Par des calculs savants, elle en gomme les effets de saison qui pourraient perturber l’évolution de la conjoncture. Florilège des bizarreries des corrections des variations saisonnières, les fameuses CVS en jargon de statisticien. Certains phénomènes susceptibles de biaiser les chiffres du chômage sautent aux yeux, comme les vendanges, le travail saisonnier ou l’arrivée d’étudiants sur le marché du travail en septembre. Mais d’autres laissent perplexe. La Darès constate par exemple que, chaque année, quelle que soit la conjoncture, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A (ceux qui n’ont pas du tout travaillé sur le mois) baisse de février à mai et augmente de juin à août. Une récurrence d’autant plus inexplicable qu’elle se combine à un facteur qui devrait entraîner une situation inverse: une atonie traditionnelle des offres collectées par Pôle emploi en début d’année, et une hausse en fin d’année. La Darès pondère aussi ces données des « chocs » ou « phénomènes temporaires », autrement appelés « fluctuations résiduelles non périodiques ». Une formule qui désigne, entres autres, les faillites d’entreprise. « Une entreprise qui ferme, engendrera un nombre accru d’inscriptions à Pôle emploi un mois donné, mais ce phénomène ne persistera pas pour autant », explique le service statistique du ministère du Travail. Ainsi, la liquidation de Virgin ou la cessation d’activité chez Fagor-Brandt, ne gonflent pas les chiffres du chômage du mois où elles interviennent, mais sont « lissées » sur une plus longue période. Mais les fermetures d’entreprises ne devraient-elles pas au contraire être considérées comme révélatrice de la conjoncture au moment où elles interviennent? Une fois les phénomènes saisonniers identifiés, il faut adopter des formules de calcul statistique adaptées. Et pour cela, la Darès utilise un logiciel nommé SAS, pour « Statistical Analysis System« . Ce logiciel qui corrige les données françaises, est Américain, édité aux Etats-Unis par SAS Institute. Les formules ont été théorisées il y a des années par le Census Bureau, le bureau du recensement outre-Atlantique. Evidemment, précise la Darès, ce logiciel est totalement « programmable, personnalisable ». Pour les CVS françaises, les données sont soumises à des coefficients calculés par des analystes nationaux, en observant les spécificités saisonnières sur les séries statistiques françaises. D’ailleurs, tous les chiffres passent par ce software « ultra puissant » et « très sophistiqué », à même de « traiter des bases de données très lourdes, avec des variables énormes ». Pas seulement celles qui doivent être corrigées des CVS. Et au-delà du ministère du travail, il est utilisé par la majorité des instituts qui produisent de la statistique publique, Insee en tête.
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