Bettencourt : Woerth va payer pour Sarkozy
Une tradition bien française, les seconds couteaux payent pour les frasques de leur patron, Juppé pour Chirac, Donnedieu de Vabres pour Balladur, maintenant Worth sans doute pour Sarkozy. Son ex-ministre et trésorier de campagne Eric Woerth, est renvoyé devant le tribunal correctionnel, ainsi que neuf autres personnes. Ils ont raison les juges, Sarkozy pourrait redevenir Présidente de la République, autant être prudent ! Les juges Jean-Michel Gentil, Cécile Ramonatxo et Valérie Noël avaient mis en examen Nicolas Sarkozy le 21 mars, sous le soupçon d’avoir profité de la faiblesse psychique de Liliane Bettencourt, avérée depuis septembre 2006, pour se faire remettre de l’argent destiné à financer sa campagne électorale de 2007. A l’appui des soupçons, notamment, une ou deux visites du futur président au domicile de la milliardaire début 2007. Mais ces éléments ne font pas une preuve. L’ensemble des protagonistes du dossier avaient estimé depuis que les charges pesant sur M. Sarkozy étaient trop faibles pour le renvoyer devant un tribunal. Dans leur ordonnance de 267 pages, les juges affirment cependant que l’ex-président « avait connaissance de l’état de vulnérabilité particulièrement apparent de Mme Bettencourt », qu’il est bien allé « deux fois » et non une au domicile des milliardaires, dont la seconde pour « obtenir un soutien financier » de l’héritière de l’Oréal. Ce qui sauve l’ex-président est qu’ils ne peuvent établir « un lien direct » entre ce qu’ils estiment être « le comportement abusif de Nicolas Sarkozy » vis-à-vis de la vieille dame, et la remontée de 400.000 euros en liquide opérée depuis les comptes Bettencourt en Suisse le 26 avril 2007 par Patrice de Maistre, l’ancien homme de confiance des milliardaires, qui avait rapatrié des fonds de la même manière antérieurement à la visite supposée du 24 février. ‘La présomption d’innocence, un principe fondamental’ Pour la première fois depuis le 25 mars, quand il avait commenté une mise en examen « injuste » et infondée », M. Sarkozy est sorti de son silence sur l’affaire, sur sa page Facebook. « En décidant d’un non-lieu, la justice vient de me déclarer innocent dans le dossier Bettencourt », annonce-t-il. Il remercie ceux qui l’ont « soutenu, aidé, (lui ont) témoigné leur confiance » dans cette affaire, notamment sa femme, l’UMP « et notamment son président Jean-François Copé », et « les Français dont la fidélité envers et contre tout m’a bouleversé ». Il attaque en revanche les « responsables politiques qui durant ces longs mois ont utilisé cette +affaire+ et participé à cultiver le soupçon ». « Je veux rappeler combien la présomption d’innocence est un principe fondamental. On ne gagne jamais à calomnier. On ne fait qu’abaisser la démocratie », dit l’ex-chef d’Etat. Plusieurs personnalités de l’UMP ont salué le non-lieu lundi. Jean-François Copé s’est dit « heureux » de ce dénouement. « Il est heureux de constater que la justice disculpe » Nicolas Sarkozy, a déclaré de son côté l’ex-premier ministre François Fillon. L’ex-ministre de la Justice Rachida Dati a souligné qu’ainsi, « le calendrier politique » de l’ancien chef d’Etat « n’est plus tenu par le calendrier judiciaire ». Le nom de l’ex-président est pourtant encore cité dans diverses autres affaires. Son avocat Me Thierry Herzog, interrogé par l’AFP, n’a cependant pas souhaité « apporter de commentaire sur des affaires, qui, de mon point de vue, n’existent pas pour Nicolas Sarkozy ». L’ex-ministre du Budget puis du Travail Eric Woerth, quant à lui, n’échappe pas au renvoi devant le tribunal, pour « recel » d’une infraction non précisée. Cette situation pourrait embarrasser le parquet qui avait requis pour lui (ainsi que pour M. Sarkozy et quatre autres mis en examen) un non-lieu en juin. M. Woerth aurait perçu des fonds pour la campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, de la part de l’homme de confiance des Bettencourt, Patrice de Maistre. Son avocat Jean-Yves Le Borgne a déclaré lundi « ne pas s’expliquer » ce renvoi. « Les facultés d’analyse des juges, s’agissant de l’innocence, se sont en quelque sorte concentrées » sur « l’une des personnes en cause ». Il s’est dit en tout cas « certain » d’une relaxe de M. Woerth devant le tribunal. Parmi les autres personnes renvoyées, figurent aussi un autre gestionnaire de fortune de Mme Bettencourt, l’avocat Pascal Wilhelm, et l’homme d’affaires Stéphane Courbit, pour un investissement de 143 millions d’euros que le premier a fait souscrire à la milliardaire dans la holding du second. Sont aussi renvoyées deux anciens notaires de l’héritière de l’Oréal, le gestionnaire de son île seychelloise et son dernier infirmier. Figure également dans la liste l’homme dont l’amitié lucrative avec la milliardaire a été à l’origine de l’affaire, François-Marie Banier, et son ami Martin d’Orgeval. C’est la plainte contre M. Banier de la fille des milliardaires, Françoise, fin 2007, qui a suscité l’enquête d’abord menée par le parquet de Nanterre puis par les juges bordelais après dépaysement du dossier en novembre 2010. Outre M. Sarkozy, un douzième mis en examen échappera au jugement, l’avocat fiscaliste Fabrice Goguel. Si le parquet ne fait pas appel, ce qui sera sans doute su mardi, l’affaire Bettencourt s’achève donc. L’étape suivante sera le procès, pas avant 2014, ou plutôt les procès: le majordome de Mme Bettencourt qui avait réalisé des enregistrements dans son salon, et cinq journalistes qui les ont publiés, seront jugés pour atteinte à la vie privée. MM de Maistre et Woerth auront aussi à répondre de trafic d’influence. Une juge du tribunal de Nanterre, Isabelle Prévost-Desprez, devra rendre des comptes pour violation du secret professionnel.
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